Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
Vom Netzwerk:
correctement boutonnés. Chacun devait ôter sa casquette au passage du gardien. Si nos boutons étaient défaits, si nous gardions notre casquette ou si notre cellule n ’ était pas en ordre, nous étions accusés de violation du règlement de la prison et condamnés à l ’ isolement ou à la privation de repas.
    Après l ’ inspection, nous allions casser des pierres dans la cour jusqu ’ à midi. Il n ’ y avait pas de pause   ; si nous ralentissions l ’ allure, les gardiens nous hurlaient d ’ accélérer. A midi, la cloche du repas sonnait et l ’ on apportait dans la cour un tonneau en fer plein de nourriture. Le déjeuner des Africains se composait de mealies bouilli, c ’ est-à-dire d ’ épis de gros maïs. Les Indiens et les métis avaient du gruau ou du maïs écrasé dans un mélange qui ressemblait à de la soupe. Parfois, il y avait des légumes dans le gruau, mais jamais dans notre bouillie.
    On nous donnait souvent de la phuzamandla, ce qui veut dire « boisson de force   », une poudre faite de maïs et d ’ un peu de levure. On doit la délayer dans de l ’ eau ou du lait et, quand le mélange a épaissi, cela peut être assez bon, mais on nous donnait si peu de poudre que l ’ eau s ’ en trouvait à peine colorée. En général, j ’ essayais de garder un peu de poudre pendant plusieurs jours jusqu ’ à ce que j ’ en aie assez pour me préparer un bon mélange, mais si les autorités découvraient que vous mettiez de la nourriture de côté elles la confisquaient et elles vous punissaient.
    Après le déjeuner, nous travaillions jusqu’à 16 heures   ; les gardes sifflaient et nous nous mettions à nouveau en rang pour être comptés et inspectés. On nous accordait alors une demi-heure pour nous laver. La salle de bains au bout de notre couloir avait deux douches d’eau de mer, un robinet d’eau salée, et trois grands baquets de tôle galvanisée qui nous servaient de baignoires. Nous nous y tenions debout ou accroupis, en nous savonnant dans l’eau saumâtre pour enlever la poussière de la journée. Se laver à l’eau froide quand il fait froid dehors n’est pas agréable, mais nous nous en accommodions. Parfois, nous chantions en nous lavant, et l’eau nous semblait moins glacée. Dans les débuts, c’était un des seuls moments où nous pouvions parler.
    A 16 h 30 précises, on frappait violemment à la porte de bois, au bout de notre couloir, ce qui voulait dire qu’on avait apporté le souper. Les prisonniers de droit commun nous donnaient une assiette de nourriture et nous allions manger dans notre cellule. Nous avions de nouveau de la bouillie de maïs, parfois avec une carotte solitaire, ou un morceau de chou ou de betterave  – mais en général nous devions le chercher pour le trouver. Si nous avions un légume, en général nous en avions pendant des semaines, jusqu’à ce que les carottes ou les choux soient moisis et que nous en soyons écœurés. Tous les deux jours, on nous donnait un petit morceau de viande avec notre bouillie. La plupart du temps c’était du cartilage.
    Pour le souper, les prisonniers métis et indiens avaient droit à un quart de miche de pain (qu ’ on appelait katkop, c ’ est-à-dire « tête de chat   », à cause de la forme du pain) et une tranche de margarine. On supposait que les Africains n ’ aimaient pas le pain car il s ’ agissait d ’ une nourriture « européenne   ».
    Systématiquement, on réduisait encore les maigres portions stipulées par les règlements, parce que les cuisines faisaient du trafic. Les cuisiniers  – tous des prisonniers de droit commun  – gardaient la meilleure nourriture pour eux et leurs amis. Souvent, ils réservaient les meilleurs morceaux pour les gardiens en échange de traitements de faveur.
    A 20 heures, le gardien de nuit s’enfermait dans le couloir avec nous et passait la clef à l’extérieur à un autre gardien par un petit trou de la porte. Ensuite, il descendait et remontait le couloir en nous donnant l’ordre d’aller nous coucher. A Robben Island, on ne criait pas « extinction des feux   » parce que dans nos cellules, les ampoules protégées par un grillage restaient allumées toute la nuit. Plus tard, ceux qui faisaient des études pour passer un examen ont été autorisés à lire jusqu’à 10 ou 11 heures.
    Le couloir avait une très bonne acoustique et nous essayions de bavarder un petit peu avant de nous endormir. Mais si nous

Weitere Kostenlose Bücher