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Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
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postée.
     
    Au bout de quelques mois, notre vie avait trouvé son rythme. La vie en prison se répète à l’infini   : chaque jour est semblable à la veille   ; chaque semaine ressemble à la précédente, et les mois et les années finissent par se mélanger. Chaque chose qui sort de l’ordinaire trouble les autorités, car la répétition est le signe d’une prison bien tenue.
    Ce train-train est aussi réconfortant pour le prisonnier, et c’est pourquoi cela peut devenir un piège. La routine peut être une maîtresse agréable à qui il est difficile de résister, car elle fait passer le temps plus vite. Les montres et les pendules de toute sorte étaient interdites sur Robben Island, et nous ne savions jamais exactement l’heure. Nous dépendions des cloches, des sifflets et des cris des gardiens. Comme chaque semaine ressemblait à la précédente, il fallait faire un effort pour se souvenir du jour et du mois. Une des premières choses que j’ai faites a été de tracer un calendrier sur le mur de ma cellule. Perdre le sens du temps est une façon aisée de perdre toute prise sur la réalité et même de perdre l’esprit.
    Le temps passe lentement en prison   ; les jours semblent sans fin. On associe en général le temps qui passe lentement avec l’oisiveté. Mais ce n’était pas le cas à Robben Island. Nous étions occupés presque en permanence, avec le travail, les études et les différends à résoudre. Pourtant, le temps n’en filait pas moins de façon glaciale, cela tenant en partie au fait que ce qui prend quelques heures ou quelques jours à l’extérieur exige des mois voire des années en prison. On peut attendre six mois ou un an pour obtenir une réponse à une demande de brosse à dents neuve. Ahmed Kathrada a dit une fois qu’en prison les minutes peuvent sembler des années, mais les années filent comme des minutes. Un après-midi passé à casser des cailloux dans la cour peut sembler durer une éternité, mais brusquement c’est la fin de l’année et on ne sait pas où sont passés tous les mois écoulés.
    Pour chaque prisonnier, en particulier pour chaque prisonnier politique, le défi est de réussir à survivre intact à la prison, d’en sortir en étant resté le même, de conserver et même de renforcer ses convictions. La première tâche c’est d’apprendre exactement ce qu’il faut faire pour survivre. D’abord, il faut connaître le but de l’ennemi avant d’adopter une stratégie pour lui faire échec. La prison est destinée à briser l’esprit et à détruire toute volonté. Pour y arriver, les autorités essaient d’exploiter chaque faiblesse, de tuer toute initiative, de nier tout signe d’individualité  – tout cela avec l’idée d’écraser cette étincelle qui fait de chacun de nous un être humain et de chacun un être à part.
    Pour survivre, nous devions comprendre ce que les autorités essayaient de nous faire et partager cette compréhension avec les autres. Il est très difficile, voire impossible, de résister seul. Je ne sais pas ce que j’aurais fait dans une telle éventualité. Mais les autorités ayant fait la grande erreur de nous mettre ensemble, notre détermination s’en trouva renforcée. Nous nous soutenions mutuellement et chacun donnait sa force à l’autre. Tout ce que nous savions, tout ce que nous apprenions, nous le partagions, et ce partage multipliait le courage qui restait à chacun. Cela ne veut pas dire que nous répondions de façon semblable aux épreuves que nous subissions. Les hommes possèdent des capacités diverses et réagissent différemment aux tensions. Mais les plus forts élèvent les autres et tous deviennent ainsi plus forts. En fin de compte, nous avons dû créer notre vie en prison. Les autorités elles-mêmes durent reconnaître que l’ordre carcéral était maintenu non pas par les gardiens mais par nous-mêmes.
    En tant que responsable, on doit parfois prendre des décisions qui ne sont pas populaires ou dont on ne connaîtra les résultats que des années plus tard. Il est des victoires dont la gloire réside dans le fait qu’elles ne sont connues que par ceux qui les ont remportées. Cela est particulièrement vrai de la prison, où l’on doit trouver une consolation dans la fidélité à son idéal, même si personne ne le sait.
    J’étais maintenant hors de course, mais je savais que je n’abandonnerais pas la lutte. Je me trouvais dans une arène différente et plus

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