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Un long chemin vers la liberte

Un long chemin vers la liberte

Titel: Un long chemin vers la liberte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nelson Mandela
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consternation.
     
    Dès le premier jour, j’avais protesté contre l’obligation de porter un short. J’ai demandé à voir le directeur de la prison et présenté une liste de doléances. Les gardiens ont ignoré mes protestations mais à la fin de la deuxième semaine j’ai trouvé un vieux pantalon long jeté négligemment sur le sol de ma cellule. Aucun costume rayé trois-pièces ne m’a jamais fait autant de plaisir. Avant de le mettre, j’ai vérifié que l’on en avait donné à mes camarades.
    Ils n’en avaient pas et j’ai demandé au gardien de reprendre le mien. J’ai insisté pour que tous les prisonniers africains aient des pantalons. Le gardien a marmonné   : « Mandela, tu dis que tu veux un pantalon et quand on t’en donne un, tu n’en veux plus. » Il n’a pas voulu toucher à un pantalon qu’avait porté un « Noir et finalement l’officier commandant la prison est venu en personne dans ma cellule pour le prendre. « Très bien, Mandela, m’a-t-il dit. Tu auras les mêmes vêtements que tout le monde. » Je lui ai demandé pourquoi il ne donnait pas des pantalons à tout le monde s’il voulait bien m’en donner à moi. Il ne m’a pas répondu.
    60
    Au bout de quinze jours sur l ’ île, on nous a informés que nos avocats Bram Fischer et Joel Joffe allaient nous rendre visite le lendemain. Quand ils sont arrivés, on nous a escortés jusqu ’ au parloir pour que je les rencontre. Leur visite avait un double but   : voir comment nous étions installés et vérifier si nous refusions toujours de faire appel. Je ne les avais pas vus depuis seulement quelques semaines mais cela m ’ a paru une éternité. Ils ressemblaient à des visiteurs venus d ’ un autre monde.
    Nous nous sommes assis dans une pièce vide et, à l’extérieur, un commandant surveillait notre entretien. J’ai eu envie de les prendre dans mes bras mais la présence du commandant m’en a empêché. Je leur ai dit que nous allions bien et je leur ai expliqué que nous refusions toujours de faire appel pour les raisons que nous avions déjà énoncées, y compris le fait que nous ne voulions pas que notre appel interfère avec le procès d’autres membres de l’ANC. Bram et Joel semblaient résignés à cette idée, mais je savais que Bram pensait que nous avions tort.
    Alors que nous terminions notre entretien, j’ai demandé à Bram des nouvelles de sa femme, Molly. Dès que j’ai prononcé son nom, Bram s’est levé et est sorti brusquement. Il est revenu quelques minutes plus tard, s’étant repris   ; nous avons continué à parler mais il n’a pas répondu à ma question.
    La visite s’est achevée et, alors que nous revenions dans nos cellules avec le commandant, il m’a demandé   : « Mandela, tu as été frappé par le comportement de Bram Fischer   ? » J’ai acquiescé. Il m’a alors expliqué que Molly était morte dans un accident de voiture, la semaine précédente. Bram qui conduisait, avait fait un écart pour éviter un animal et la voiture avait basculé dans une rivière. Molly s’était noyée.
    La nouvelle nous a entièrement brisés. Molly était une femme merveilleuse, d’une générosité et d’une abnégation incomparables, et absolument sans préjugés raciaux. Elle avait soutenu Bram plus qu’on ne pouvait l’imaginer. C’était une épouse, une collègue et une camarade. Bram avait déjà connu un malheur dans sa vie   : son fils diabétique était mort adolescent.
    Sa façon de quitter la pièce quand je lui avais demandé des nouvelles de sa femme était typique de son caractère. C’était un homme stoïque, qui n’avait jamais fait porter à ses amis le fardeau de son malheur et de ses problèmes. En tant qu’Afrikaner, forcé par sa conscience à renier son propre héritage et à être rejeté par les siens, il montrait un courage et un sens du sacrifice exceptionnels. Je luttais contre l’injustice, pas contre les miens.
    J’ai dit au commandant que j’avais l’intention d’écrire une lettre de condoléances à Bram et il m’a répondu que je pouvais le faire. Les règles concernant la correspondance étaient extrêmement strictes. Nous n’avions que le droit d’écrire à notre famille proche et seulement une lettre de cinq cents mots tous les six mois. La réponse du commandant m’a donc surpris et rendu heureux. Mais il n’a pas tenu sa promesse. J’ai écrit une lettre, je la lui ai donnée mais elle n’a jamais été

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