Une histoire du Canada
se dirigent vers les villes en expansion et la prospérité encourage le taux de natalité. Les familles devant se loger, il faut du bois d’œuvre pour construire les habitations et du blé pour nourrir les gens.
dans la lointaine amérique du nord, la limite des forêts recule.
La fréquence et la taille des clairières augmentent jusqu’à ce que, dans les années 1840, le terrain se transforme – le couvert forestier peut sembler être en voie de disparaître5 (paradoxalement, la reforestation débute à peu près à la même époque puisqu’on commence à abandonner les terres marginales le long de la côte atlantique pour des fermes plus fertiles à l’intérieur du continent). La déforestation de vastes secteurs de l’amérique du nord britannique est une indication de l’efficacité et de l’efficience du système colonial, le sous-produit d’une philosophie mercantile par laquelle la mère patrie et ses colonies vivent dans un cocon de soutien mutuel. Les gouverneurs locaux se contentent d’émettre une conception traditionnelle de la relation appropriée entre une colonie et sa mère patrie, contre laquelle Howe, Papineau et Mackenzie se battent en vain.
dans les années 1840, la relation entre les colonies américaines et l’empire britannique se transforme. Pour la première fois, les colonies deviennent plus ou moins autosuffisantes – en tout état de cause, elles n’ont pas à recourir à un renflouement constant de la part du gouvernement local. La dépendance coloniale par rapport à l’empire passe du domaine physique – plus d’immigrants et de soldats et encore plus de subventions pour le développement des colonies – au domaine psychologique.
Parallèlement, à mesure que le souvenir des guerres napoléoniennes s’estompe, la dépendance psychologique britannique par rapport aux colonies en tant que source d’approvisionnement sûre en temps de guerre diminue – pour la nourriture ou le bois d’œuvre. néanmoins, il est difficile d’abandonner de vieilles habitudes. il est encore tentant de céder aux colonies – et au début des années 1840, le gouvernement britannique accorde, pour ce qui semble être la dernière fois, l’entrée libre des céréales 8•decoloniesàprovinces
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coloniales (ou « maïs », comme on l’appelle dans les îles Britanniques) sur le marché britannique. il s’agit cependant d’une perte de temps puisque le mécontentement persiste dans les colonies, en particulier en amérique du nord.
en 1815, la victoire sur l’ennemie traditionnelle, la France, a été si totale que cette dernière n’a ni le pouvoir militaire, ni le pouvoir économique, ni la volonté politique de menacer les intérêts britanniques. La révolution industrielle et la croissance de la richesse et du pouvoir britanniques font en sorte qu’au milieu du siècle, la Grande-Bretagne n’a pas de concurrent sérieux. L’industrie et les produits britanniques n’ont à craindre d’aucun rival. ils ne nécessitent ni tarif coûteux, ni protection rigide. de plus, ils constituent des sources d’approvisionnement moins chères et moins éloignées que les colonies. On assiste à des émeutes contre le coût élevé de la vie et une façon évidente de répondre au mécontentement public consiste à réduire les tarifs sur les denrées alimentaires et les matériaux de construction. Comme il faut s’y attendre, les chefs politiques britanniques et l’opinion britannique en général commencent à tirer des conclusions appropriées.
Malheureusement pour les colons, on regroupe les tarifs et les colonies en une question politique d’importance suprême. La Grande-Bretagne doit-elle adopter le libre-échange et abandonner la protection tarifaire incorporée dans ses « lois sur les céréales » et, par le fait même, le système de contrôles et de mesures incitatives qui la lie aux colonies ?
À l’époque comme aujourd’hui, la réponse des économistes est adéquate en principe mais, comme toujours en politique, la vraie question est assez différente. d’un point de vue plus concret, la Grande-Bretagne devrait-elle abandonner une politique qui procure des aliments chers et des importations coûteuses à une population rétive, qui a tendance à provoquer des émeutes ?
devrait-elle maintenir une politique en faveur des aliments chers face à une famine imminente en irlande causée par la perte de la récolte de pommes de terre ? en 1848, le premier
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