Une histoire du Canada
la plupart des terres arables cultivables aient été prises par des colons-agriculteurs. simultanément, cependant, dans les grandes villes – Halifax, Montréal, toronto, Winnipeg, vancouver et même victoria – les manoirs des nouveaux riches pullulent. Le Canada est encore en développement, et sa politique, sa culture même, demeure, par définition, sous-développée.
10•explosioneTmarasme,1896–1914
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cHEminS DE FER ET SURDéVELOppEmEnT
en ce qui a trait à Laurier, la chance cède place à l’optimisme, et l’optimisme à la confiance. Laurier (il devient sir Wilfrid Laurier en 1897) fait son entrée dans le nouveau siècle en remportant une nouvelle victoire aux élections de novembre 1900 et en obtenant le mandat de poursuivre le développement du pays. Ce dont le pays a besoin, selon le premier ministre, c’est davantage de colons et, pour les attirer, il opte pour les chemins de fer.
Laurier est déjà intervenu dans des dossiers ferroviaires. Les agriculteurs de l’Ouest avaient besoin d’un accès peu coûteux aux marchés et les chemins de fer ont une soif inétanchable de subventions. en 1897, donc, Laurier et son ministre de l’intérieur, sifton, signent une entente avec le Canadien Pacifique, l’entente de la passe du nid-du-Corbeau, afin de réduire les tarifs ferroviaires des expéditions de céréales en échange d’argent comptant destiné à la construction de lignes de chemin de fer dans le sud de la Colombie-Britannique.
Le ministre des Chemins de fer, andrew Blair, a un petit côté réformateur. Les sociétés ferroviaires privées ne l’enchantent guère et la réglementation publique ne lui fait pas peur. il prolonge le chemin de fer intercolonial, toujours propriété du gouvernement, jusqu’à Montréal et, dans les dossiers importants, le tient à distance de tout favoritisme de la part des partis. il crée également un Conseil des commissaires des chemins de fer de manière à assurer une supervision experte et impartiale de la question controversée des tarifs ferroviaires – c’est du moins ce qu’il espère8.
Le point culminant de la politique ferroviaire de Laurier est la question, très débattue et attendue, d’une deuxième ligne ferroviaire transcontinentale canadienne. son point de départ doit se trouver non pas à Montréal, mais bien à Québec, la propre base politique de Laurier. elle doit traverser le centre du Québec vers le nord de l’Ontario, dans l’espoir d’ouvrir ce territoire au développement et, peut-être, au peuplement, comme ça a été le cas dans le reste de l’Ontario. Mais, tout aussi attrayantes qu’elles soient sur le plan politique, les perspectives sont décourageantes sur le plan économique, car l’itinéraire dans le nord du Québec n’apportera vraisemblablement aucun revenu et constituera un fardeau financier pour quiconque le construira.
Faisant preuve d’un sens de la prudence, et de la responsabilité des deniers publics, beaucoup plus développé, Blair préfère concocter un nouveau réseau en tirant parti des lignes en place et en en construisant de nouvelles au besoin. L’itinéraire de Québec n’est, selon lui, absolument pas nécessaire. Laurier persiste, négocie avec le Grand tronc si bien qu’en 234
UnE HIsTOIRE dU Canada
1903, son projet est presque concrétisé. Blair remet sa démission, qualifiant les idées de Laurier de « folles, visionnaires, dénuées du sens des affaires et de tout ce qu’on voudra ».
Blair finira par avoir raison mais, à court terme, les retombées sous forme de contrats et de développement local de la construction du chemin de fer présentent un attrait énorme. au bout du compte, ce n’est pas une mais deux nouvelles lignes ferroviaires transcontinentales que l’on construit au Canada : le Grand Trunk Pacific , prolongement du Grand tronc, et le Canadian Northern , œuvre de deux capitalistes torontois, sir William Mackenzie et sir donald Mann.
Le financement des deux chemins de fer consiste pour l’essentiel en capitaux britanniques, fournis par les proverbiales vieilles dames et des colonels à la retraite qui pullulent dans les documents sur les investissements.
sur le plan des profits ou même de la sécurité des placements, l’argent investi est englouti dans un trou à rat avec tous les signes d’assentiment des gouvernements canadiens, qui investissent eux-mêmes dans les plans de Mackenzie et Mann, de même que dans les dettes en
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