Une histoire du Canada
oublier que l’économie américaine est ouverte aux immigrants en provenance du Canada et de l’europe. Ceux qui arrivent au Canada par erreur ou sont déçus de leur choix peuvent poursuivre leur route. Mais la plupart ne le fait pas. À l’échelle nationale, le nombre d’ouvriers d’usine passe de 543 000
en 1891 à 933 000 en 1911. d’autres catégories d’emplois progressent elles aussi, celle des propriétaires et des cadres, par exemple, qui comprend les entrepreneurs occupés par l’essor de la construction qui chevauche le tournant du siècle et se poursuit longtemps après celui-ci.
C’est l’électricité qui est la clé de l’essor industriel et, grâce à ses nombreuses chutes et rivières au débit rapide, le Canada est bien placé pour tirer parti de la nouvelle technologie grâce à la production hydraulique.
dans l’ensemble du pays, la puissance des installations hydroélectriques passe de 72 000 hp en 1890 à 977 000 en 1910 ; ce chiffre double pendant les quelques années suivantes pour atteindre près de deux millions en 1914.
L’électricité représente un élément particulièrement important en Ontario, qui ne dispose pas de charbon et de très peu de pétrole et de gaz pour faire fonctionner ses usines et garder ses citoyens au chaud. Pour l’Ontario, l’hydroélectricité signifie sécurité individuelle et compétitivité industrielle.
Pour reprendre l’expression utilisée par un responsable d’aménagements hydroélectriques, c’est un « génie sorti d’une bouteille » ou, selon celle du Globe de toronto, « la magie fusionnée aux affaires7 ». La transformation de l’économie et de l’existence quotidienne attribuable à l’électricité est tellement profonde et manifeste que celle-ci en vient bientôt à être perçue 232
UnE HIsTOIRE dU Canada
comme une nécessité absolue, ce qui ne tarde pas à avoir des conséquences sur le programme politique.
C’est l’électricité qui alimente les tramways, jusque-là tirés par des chevaux. des « voies radiales » électriques relient les villes situées autour des Grands Lacs, rendant possibles en théorie les voyages de toronto à Cleveland en passant d’un tramway à l’autre. Certains appareils ménagers électriques, cuisinières, aspirateurs, réfrigérateurs même, font leur apparition dans les habitations des très bien nantis.
La production minière augmente elle aussi. sa manifestation la plus spectaculaire est la dernière des grandes ruées vers l’or, dans le Klondike canadien du territoire du Yukon créé depuis peu. On découvre de l’or près de dawson en 1896 et, dès 1898, un nombre évalué à cent mille mineurs, ou mineurs en herbe, font leurs bagages et prennent le chemin du Yukon, certains par voie terrestre, d’autres, plus nombreux, par voie maritime en passant par l’alaska, une possession américaine. dawson City devient brièvement une véritable ville ; elle compte trente mille habitants en 1898.
Cette année-là marque l’apogée de la ruée vers l’or, qui est pratiquement terminée en 1900. il reste une voie ferroviaire reliant skagway, en bord de mer, à Whitehorse, ainsi que toute une série de sociétés minières. La ruée vers l’or contribue aussi à l’éclatement d’un différend frontalier entre le Canada et les états-Unis, comme nous le verrons plus loin (en page 249).
d’autres sociétés minières sont plus durables et plus professionnelles.
La Commission géologique du Canada sonde les roches du Canada en quête de formations prometteuses avec, sur ses traces, des géologues et prospecteurs privés. en 1914, on extrait de l’or, de l’argent, du plomb, du zinc et du nickel, plutôt rare à l’époque, dans des mines situées depuis les rocheuses jusqu’au Québec. déjà, on trouve des mines de charbon dans le sud de l’alberta et de la Colombie-Britannique, de même que les mines productives et durables du Cap-Breton, où prend naissance une industrie sidérurgique.
dans un certain sens, certains de ces développement sont illusoires.
L’exploitation minière, la foresterie et les lots de colonisation agricoles sont des activités propres à la limite des terres colonisées, alimentant la notion canadienne que le Canada demeure un pays en pleine adolescence même lorsqu’on le compare aux états-Unis. selon l’historien Frederick Jackson turner, la frontière américaine est « fermée » ; le Canada demeure ouvert quoique, en 1914,
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