Vidocq - le Napoléon de la Police
Pan ! j’l’abas et j’le cache. Mais on avait été vus et
dénoncés. Le seigneur nous a fait condamner au fouet et la marque. J’me suis
ensauvé du bagne de Brest mais j’ai été repris. »
Du second, Sébastien Boitel qui
pleure du matin au soir, on finit par tout savoir. Ce laboureur pendant la
disette, a dérobé pour nourrir sa femme et ses enfants un boisseau de grain,
pas même du blé. En pleine terreur, il est condamné au bagne à perpétuité. Sa
famille n’a plus personne pour la protéger et la nourrir. Plusieurs habitants
de sa commune, Annoulin, ont écrit des pétitions demandant une commutation de
peine. Personne n’a pris la peine de leur répondre.
Être enfermé avec de tels voisins de
paille rend Vidocq morose et Francine, bourrelée de remords. Toujours aussi
amoureuse de son bel amant de vingt ans, elle convainc les gendarmes puis
l’officier rossé, de retirer leurs plaintes. Huit jours après il n’y a plus
aucun motif de le maintenir en prison. Mais le juge est en voyage. Impossible
de faire annuler le jugement en son absence. En attendant son retour, Francine
offre ses économies à Vidocq pour qu’il loue une cellule privée, l’œil de bœuf.
C’est un privilège que lui envient les autres prisonniers. Vidocq en profite
pour y inviter Francine qui passe tous ses après-midi dans ses bras. Mais le
soir venu, rien à faire, le règlement c’est le règlement. Elle doit rentrer
chez elle et son amant rester sous les verrous.
Parfois, Vidocq pour tromper son
ennui, invite certains de ses compagnons dans sa cellule à partager les
provisions et les petits plats que Francine lui fait porter et à terminer la
soirée en jouant.
Tout en continuant leur partie de
cartes avec deux anciens faux officiers, Grouard et Herbaux qui avaient connu
Vidocq au temps de l’armée roulante, les trois hommes évoquent le cas du
prisonnier qui pleure toujours.
Émus par sa situation, ils mettent
au point un plan. Pourquoi ne pas utiliser les armes dont l’administration se
sert pour écraser les gens, la paperasse.
Les deux anciens faussaires de
l’armée roulante n’ont aucun problème pour rédiger un mémoire d’élargissement.
Mais comment réaliser ce délicat travail dans cette salle commune, au milieu du
brouhaha et des disputes incessantes des détenus. Vidocq met sa cellule à la
disposition des deux ingénieux faussaires, deux heures par jour :
« Pour la bonne cause. » Le reste du temps il la récupère et s’isole
avec Francine. Huit jours plus tard, un ordre de libération arrive pour Boitel.
Tout semble en règle. Le concierge le félicite et Boitel quitte la prison, sans
même dire au revoir aux autres détenus.
« Quel ingrat ! Cela ne
lui portera pas chance ! », se plaignent les deux anciens de l’armée
roulante.
De fait, dix jours plus tard, il est
ramené par les gendarmes qui l’ont trouvé tout bonnement chez lui, auprès de sa
famille. Devant le juge, il dénonce sans se faire prier, Grouard, Herbaux et
Vidocq.
Tout cela devient bien trop sérieux.
Vidocq et Francine passent en revue les moyens les plus rapides de
sortir : « Je n’en peux plus d’être ici, j’étouffe ! »
Pourquoi pas une évasion. Tous les gardiens connaissent Francine et lui
adressent des plaisanteries chaque fois qu’elle vient rendre visite à son
amant.
« Écoute-moi bien, chaque
semaine un officier passe visiter la prison. Personne ne le regarde vraiment,
l’uniforme suffit. Tu vas m’en apporter un et je partirai, à leurs yeux et à
leurs barbes. Ils n’y verront rien.
— Mais c’est impossible, tout
le monde te reconnaîtra.
— J’ai appris à me grimer au
cirque, cela va enfin me servir. Je serai méconnaissable, soit tranquille. La
dernière visite remonte à dix jours, il faut donc être prêt avant celle de la
semaine prochaine. Agissons pour le 30 décembre. C’est la fin de l’année, tous
les gardiens auront la tête ailleurs et ne regarderont pas sous le nez le haut
personnage dont je vais prendre la place. » Vidocq se frotte les mains et
éclate de rire à la pensée de cette farce.
« Mais comment te le faire
passer ? Un costume, c’est volumineux, trop difficile à dissimuler, on va
me repérer.
— Passe-le en plusieurs fois.
Un peu tous les jours. Tu as un manchon. Sers t’en. C’est quoi un
uniforme : une veste, un pantalon, un chapeau avec un plumet. Surtout
n’oublie pas l’écharpe tricolore. Tu as bien ça dans
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