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Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II

Titel: Vie de Benjamin Franklin, écrite par lui-même - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benjamin Franklin
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au lieu d'un jeûne, un jour d'action de graces.»
L'avis de ce bon cultivateur fut goûté ; et depuis ce moment, les habitans de la colonie ont eu, chaque année, assez de motifs de félicité publique, pour pouvoir en remercier Dieu ; et en conséquence, un jour d'action de graces a été constamment ordonné par eux et religieusement observé.
    Je vois dans les différentes gazettes des Etats-Unis, de fréquentes réflexions sur la dureté du temps, la décadence du commerce, la rareté de l'argent.—Mon intention n'est point d'affirmer que ces plaintes sont totalement dénuées de fondement. Il n'y a aucun pays, aucun état, où quelques individus n'éprouvent des difficultés à gagner leur vie ; où des gens qui n'ont point de métier lucratif, manquent d'argent, parce qu'ils n'ont rien à donner pour s'en procurer ; et il est toujours au pouvoir d'un petit nombre d'hommes, de faire beaucoup de bruit.—Mais observons froidement la situation générale de nos affaires, et peut-être nous paroîtra-t-elle moins triste qu'on ne l'a imaginé.
La grande occupation du continent de l'Amérique septentrionale, est l'agriculture. Four un artisan ou un marchand, nous comptons au moins cent laboureurs qui, pour la plupart, cultivent leurs propres champs, et en retirent non-seulement leur subsistance, mais aussi de quoi se vêtir, de sorte qu'ils ont besoin de fort peu de marchandises étrangères ; et qu'ils vendent, en outre, une assez grande quantité de denrées pour accumuler insensiblement beaucoup d'argent.
La providence est si bienfaisante envers ce pays, le climat y est si favorable, qu'à compter des trois ou quatre premières années de son établissement, où nos pères eurent à y supporter beaucoup de peine et de fatigue, on n'y a presque jamais entendu parler de disette : au contraire, quoique quelques années aient été plus ou moins fécondes, nous avons toujours eu assez de provisions pour nous nourrir, et même pour exporter. La récolte de l'année dernière a été généralement abondante ; et cependant le fermier n'a jamais vendu aussi cher ce qu'il a livré au commerce, ainsi que l'attestent les prix courans qu'on a publiés.
    La valeur des terres augmente continuellement, à mesure que la population s'accroît. En un mot, le fermier est en état de donner de si bons gages à ceux qui travaillent pour lui, que tous ceux qui connoissent l'ancien monde, doivent convenir qu'il n'y a pas d'endroit où les manouvriers soient si bien nourris, si bien vêtus, si bien logés, que dans les États-Unis de l'Amérique.
Si nous entrons dans nos cités, nous voyons que, depuis la révolution, les propriétaires des maisons et des terreins qui y sont compris, ont vu considérablement augmenter leur fortune. Les loyers se sont élevés à un prix étonnant ; ce qui fait multiplier les bâtisses et fournit du travail à un nombre immense d'ouvriers. L'accroissement du luxe, et la vie splendide de ceux qui sont devenus riches, entretiennent aussi beaucoup de monde. Les ouvriers demandent et obtiennent un prix plus haut que dans aucune autre partie du monde, et ils sont toujours payés comptant. Cette classe n'a donc pas à se plaindre de la dureté du temps ; et elle compose une très-grande partie des habitans des villes.
Comme je vis fort loin de nos pêcheries américaines, je ne peux pas en parler avec beaucoup de certitude. Mais j'ai entendu dire que l'estimable classe d'hommes qu'on y emploie, est la moins bien payée, ou qu'elles ont moins de succès qu'avant la révolution. Ceux qui font la pêche de la baleine, ont été privés d'un marché où ils alloient vendre leur huile : mais je sais qu'il s'en ouvre un autre qui pourra leur être également avantageux ; et les demandes de chandelle de spermaceti augmentent chaque jour ; ce qui conséquemment, en fait hausser le prix.
Restent à présent les détailleurs, ou ceux qui tiennent des boutiques.
    Quoiqu'ils ne composent qu'une petite partie de la nation, leur nombre est considérable, et même trop pour le genre d'affaires qu'ils ont entrepris ; car dans tous les pays, la consommation des marchandises a ses limites, qui sont les facultés du peuple, c'est-à-dire, ses moyens d'acheter et de payer. Si les marchands calculent mal ces proportions, et qu'ils importent trop de marchandises, ils doivent nécessairement trouver difficilement à vendre l'excédent ; et quelques-uns d'entr'eux diront que le commerce languit. L'expérience les

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