1943-Le souffle de la victoire
les
wagons.
Que vaut la vie ?
« Personne ne sait ce que demain nous apportera et nous
vivons dans une peur et une terreur perpétuelles. »
Les Allemands viennent filmer les rues du ghetto pour
montrer ces « poux » de Juifs dans leur misère. Et les SS paradent au
milieu de cet enfer où l’on veut retirer à l’homme sa dignité.
Himmler a décidé de « transporter » les Juifs du
ghetto de Varsovie.
Ils ne sont donc plus que 60 000 en janvier 1943 dans
un espace muré de 1 000 mètres sur 300 mètres. Mais il est
sillonné d’égouts, de caves, de souterrains.
Là sont ceux qui veulent mourir en combattants : Juifs
de l’Organisation Juive de Combat (ZOB) et ceux de l’Union Militaire Juive (ZZW).
Ils disposent de quelques armes, certaines vendues ou données par l’AK, l’Armée
Intérieure Polonaise.
Mordechaï Anielewicz, le chef de l’Organisation Juive de
Combat, comme ses camarades, ne s’illusionne pas sur l’issue des combats.
« Il a une appréciation exacte du combat inégal »,
note après une conversation avec lui Emanuel Ringelblum, qui s’emploie à écrire
l’histoire du ghetto, dans l’espoir que ces « archives » seront
découvertes, un jour, la guerre finie.
« Mordechaï Anielewicz prévoit la destruction du ghetto
et est certain que ni lui ni les combattants ne survivront à la liquidation du
ghetto.
« Il est certain qu’ils vont mourir comme des chiens
errants et que personne ne connaîtra leur dernière demeure. »
Mais tous voulaient mourir en combattant. Et que pour la
première fois dans l’histoire du III e Reich des Juifs résistent,
les armes à la main, à leurs bourreaux.
Alors chaque cœur de Juif, celui d’un homme juste, deviendrait
pour l’éternité leur dernière demeure.
Ils voient s’avancer ce 19 avril 1943 – veille de
Pâques – les 2 000 SS et policiers disposant de chars, de
lance-flammes, d’artillerie, d’automitrailleuses.
Ils sont commandés par le Brigadeführer et major général de
la police, Juergen Stroop.
Le général SS estime que trois jours suffiront pour en finir
avec le ghetto.
Il méprise trop « ce rebut, ces êtres inférieurs »
pour les imaginer capables de résister à ces hommes bardés de cuir, casqués, bottés,
armés, soldats expérimentés, décorés. Et aux SS se sont joints 355 miliciens
lithuaniens, et même quelques policiers et pompiers polonais.
Le général Stroop est si sûr de lui qu’il n’a pas tenu
compte de l’exécution par les combattants de l’Organisation Juive de Combat de
plusieurs « traîtres juifs », informateurs des SS.
Il ne prête pas attention au fait que le ghetto semble vidé
de ses derniers occupants qui se sont terrés, refusant de quitter les lieux.
Stroop donne donc le signal de l’attaque.
« L’opération venait à peine de commencer, écrira-t-il,
quand nous nous trouvâmes sous un feu nourri et concerté des Juifs et des
bandits. Le char et deux automitrailleuses furent criblés de cocktails Molotov.
Devant cette contre-attaque ennemie, nous fûmes contraints de nous replier. »
Jour après jour, durant plus de quatre semaines, les
combattants juifs résistent.
« Les Juifs et les criminels se défendent pied à pied, réussissent
à s’échapper au dernier moment », note Stroop.
Les Juifs refusent de se laisser « regrouper ».
« Sans cesse de nouveaux groupes de combat, composés de
20 à 30 hommes accompagnés d’autant de femmes, opposaient une nouvelle
résistance. »
Les femmes tirent à « deux mains », font exploser
des grenades qu’elles ont dissimulées dans leurs jupes.
Stroop décide alors de mettre le feu à tous les immeubles du
ghetto. Mais les Juifs se battent jusqu’au bout, préférant sauter du haut des immeubles
en flammes plutôt que de se rendre.
Certains s’enfoncent dans les égouts.
Des familles, pour éviter de voir périr leurs enfants dans
les flammes, se rendent.
Et l’on voit ces enfants faméliques, mains levées face à ces
molosses humains que sont les SS.
Stroop capture ainsi 27 464 Juifs.
« Je vais essayer d’obtenir un train pour Treblinka, écrit
le général SS. Sinon dès demain nous opérerons ici même la liquidation. »
Il fait inonder les souterrains, laisse tomber des bombes
fumigènes dans les égouts.
Quelques combattants réussissent cependant à fuir, atteignant,
en rampant dans les canalisations, les berges de la
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