1944-1945-Le triomphe de la liberte
garde d’honneur devant le bâtiment, des
officiers postés le long de l’escalier. La France souveraine reçoit un allié.
Le Gouvernement Provisoire a été reconnu par la plupart des
États européens. Les FFI se battent partout.
Les massacres accomplis par la division Das Reich sont
l’aveu criminel de cette bataille de la France : 99 pendus à Tulle,
plusieurs centaines de victimes à Oradour-sur-Glane. Voilà la France martyre et
debout.
Il a le sentiment, en serrant la main du secrétaire d’État
au Foreign Office, de parler au nom de cette France-là.
Les journaux anglais ont fait le récit de son voyage à
Bayeux. Ils ont parlé de l’enthousiasme et des cris « Vive de
Gaulle ! ». Et même du manque d’égards des autorités militaires
britanniques.
Mais tout cela n’a plus désormais que peu d’importance. On
réglera la question de la monnaie. Il se rendra à Washington pour rencontrer
Roosevelt.
Dès lors que la souveraineté française est entrée dans les
faits, la colère et le refus ne sont plus de mise. On doit, on peut se montrer
magnanime.
De Gaulle écrit à Churchill. Il le remercie de l’avoir
accueilli en ce « moment d’une importance décisive ». Il salue
l’effort de guerre du peuple britannique.
« Pour votre pays qui fut dans cette guerre sans
exemple le dernier et imprenable bastion de l’Europe et qui en est à présent
l’un des principaux libérateurs, comme pour vous-même, qui n’avez cessé et ne
cessez pas de diriger et d’animer cet immense effort, c’est là, permettez-moi
de vous le dire, un honneur immortel. »
Il va quitter Londres pour Alger.
On lui apporte la réponse de Churchill. Il la lit lentement.
Les phrases sont pleines d’aigreur, de regrets et de ressentiments.
« Aussi est-ce pour moi un grand chagrin qu’aient été
et soient élevés des obstacles, écrit Churchill. Si je peux néanmoins me permettre
un conseil… »
De Gaulle plie la lettre. Il imagine Churchill maugréant,
disant, comme on vient de le rapporter : « Je dénoncerai de Gaulle
comme l’ennemi mortel de l’Angleterre. »
Mais ce soir du 16 juin 1944, de Gaulle veut un instant
oublier ces conflits.
Il pense à ces années passées ici, à Londres la Courageuse
qui reçoit, après des milliers de bombes, le premier V1. Il a tant de
souvenirs.
Philippe de Gaulle demeure encore en Angleterre, achevant ses
cours à l’école militaire de l’armée de terre à Ribbesford. Quand le
reverra-t-il ? Il lui écrit.
« Mon bien cher Philippe,
« Quittant l’Angleterre ce soir, je t’envoie mes
meilleures et profondes affections, sûr que tu feras honneur à ton nom et à la marine
dans la bataille de France où tu seras engagé…
« Mon voyage en Normandie a été très réconfortant…
« Je t’embrasse de tout mon cœur, mon cher petit
Philippe.
Ton papa très affectionné. »
21.
Ce fils que de Gaulle appelle « mon bien cher petit
Philippe » a 23 ans, en ce printemps 1944.
Engagé dès juillet 1940, dans la Marine de la France Libre,
il veut participer à la « bataille suprême… La bataille de France, la
bataille de la France », celle de la Libération de la patrie.
Fusilier marin, il sera incorporé dans la 2 e DB
du général Leclerc qui doit débarquer en France le 2 août. Il attend ce
jour-là avec impatience.
Et ils sont des dizaines de milliers de jeunes Français qui,
comme Philippe de Gaulle, n’aspirent qu’à se battre afin de chasser l’Allemand
du sol national.
L’ordre du jour du Comité Militaire d’Action (COMAC), daté
du 21 juin 1944, appelle à « intensifier partout la guérilla
mobile ».
« L’ennemi tentera d’écraser nos forces victorieuses et
les assassins SS ont déjà exercé des représailles sanglantes sur des
populations de civils désarmés. »
D’un bout à l’autre du pays, les SS pendent, torturent,
fusillent, brûlent.
Ils tuent des lycéens à Nice, et pendent 2 FTP aux
réverbères de l’avenue principale de la ville.
Ils incendient des villages de Bretagne et de Savoie. Ils
achèvent les blessés.
Sous l’uniforme des Waffen-SS, on trouve des Russes, des
Géorgiens, des « Cosaques », des Tatars, tueurs sauvages,
« barbares » qui ont rompu toutes les amarres.
« Alors, il faut mobiliser tous les hommes
valides », a dit de Gaulle à Bayeux, quand il s’est adressé à la
population rassemblée sur la place du
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