1944-1945-Le triomphe de la liberte
lance de Gaulle, j’en ai assez de cette
question de sécurité, entendez-vous ? Je ne veux plus qu’on en
parle. »
Il va. Lyon. Marseille. Toulon. Toulouse. Bordeaux. Orléans.
« Ici, devant la statue de la Sainte Libératrice, la statue
de Jeanne d’Arc… nous apercevant à quel point nous sommes près les uns des
autres, nous allons exprimer cela en chantant pieusement le même chant, notre
hymne national, La Marseillaise. »
Il va. Besançon. Dole. Nancy. Lille. Lens. Arras. Le Havre.
Rouen. Louviers. Évreux. Lisieux. Caen. Troyes. Chaumont. Luxeuil. Dijon.
Partout, il dit la vérité.
« Nous sommes une grande nation appauvrie… Certains ont
pu croire que le concours des Alliés serait puissant et rapide. Ce sont là des
illusions. »
Il répète que la guerre sera encore dure et longue.
« Je puis vous dire que, depuis le commencement de la
bataille de France, nous n’avons pas reçu de nos alliés de quoi armer une seule
unité française. »
Il évoque « l’Europe une », même si les États de
l’Ouest doivent nouer entre eux des rapports particuliers.
Partout La Marseillaise comme la trame d’une ville à
l’autre. Partout encore, il doit marteler :
« Vous parlez d’honneur, de liberté, de purification.
Et la victoire, qu’en faites-vous ? Ce que je vois, moi, par-devers tout,
c’est la France victorieuse. »
Il serre les poings, lève le bras :
« Nous allons montrer que nous sommes la France. »
Au sud et dans l’Ouest surtout, il doit affronter les chefs
FFI, leur montrer, comme à Marseille ou à Toulouse, où est l’autorité de
l’État. Il fait sortir les gendarmes des casernes où les FFI les ont cantonnés.
Il rappelle au « colonel Ravanel », héros de la Résistance
toulousaine, qu’il n’est que le lieutenant Asher. Il nomme « vol et
pillage », « abus de pouvoir », « meurtre », ce que
l’on désigne sous les mots de « réquisition »,
« arrestation », « exécution ».
Il fait arrêter sa voiture au centre de Toulouse, malgré les
objurgations du préfet qui parle de miliciens armés, de risque d’attentat.
« Écoutez ! Pour éviter les attentats, monsieur le
préfet, il suffit d’un peu d’autorité. Et pour acquérir cette autorité, que je
ne suis pas certain que vous possédiez, monsieur le préfet, il convient de la
montrer. »
Il préside ces défilés militaires « pittoresques ».
Mais aucun mépris. Il voit les larmes dans les yeux de ces hommes qui
s’essaient à la discipline militaire, qui feront les combattants de la première
armée française, où nombreux sont ceux qui s’engagent et qu’il retrouve, quand
il les passe en revue, aux côtés du général de Lattre.
Amalgame entre vieux et jeunes soldats, comme en 1792. Il
lui semble qu’il a eu, autrefois, quand il écrivait La France et son armée ,
la vision de cela, comme si le destin avait voulu le préparer à sa mission.
Mais il faut aller jusqu’au bout de cet amalgame, imposer la
dissolution des milices patriotiques, ces groupes armés que le plus
souvent les communistes contrôlent, mais que d’autres résistants défendent
aussi comme l’expression de leur combat, la garantie de leur autonomie.
Il faut agir avec prudence et autorité, se servir des
communistes pour faire plier les communistes.
Il reçoit de Moscou un nouveau télégramme de Maurice Thorez,
qui ne peut toujours pas rentrer en France puisqu’il est condamné à mort pour
désertion et qu’il lui faut donc obtenir une « grâce amnistiante ».
Il lit le texte de Thorez :
« Me référant à vos paroles sur l’union nationale plus
que jamais nécessaire, et n’ayant pas reçu de réponse à mes télégrammes
antérieurs, je demande à nouveau au gouvernement de faciliter mon retour
immédiat en France. »
Donnant donnant.
Le 24 octobre, le gouvernement adopte une ordonnance
permettant d’amnistier les condamnations prononcées par les tribunaux
militaires avant le 17 juin 1940…
De Gaulle dicte, le 25, un télégramme pour Robert Garreau,
le représentant de la France à Moscou :
« L’application de cette ordonnance permettra, sans
doute très prochainement, à M. Maurice Thorez, de rentrer en France. Vous
êtes autorisé à le lui dire. Toutefois, vous ne pourrez lui accorder le visa
nécessaire qu’après réception d’une nouvelle instruction télégraphique… »
40.
C’est le Conseil
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