1944-1945-Le triomphe de la liberte
leur fourniment, ne gardant
que leur fusil. La nuit, une moitié de la compagnie doit monter la garde pour
qu’on puisse se reposer sans rien craindre des partisans. Chaque village
traversé porte les traces de la férocité impitoyable de cette guérilla… »
Plus au nord, les Russes entrent en Estonie et en Lettonie.
Ils atteignent la frontière de la Prusse-Orientale.
En Hongrie, l’avance des Russes vers Budapest incite le
régent Horty à prendre ses distances avec l’Allemagne.
Il veut faire sortir son pays de la guerre. Aussitôt, les
nazis, appuyés par les fascistes hongrois du mouvement des Croix Fléchées,
s’emparent du pouvoir, et organisent la déportation de milliers de Juifs
hongrois vers les chambres à gaz d’Auschwitz.
« Tournez vos armes contre les oppresseurs allemands,
clament les résistants hongrois. Aidez l’armée Rouge pour une Hongrie libre et
démocratique. »
En fait, les Hongrois craignent que derrière un paravent
démocratique ne se cachent les communistes embarqués sur les tanks de l’armée
soviétique.
Et les Russes rencontrent une farouche résistance des
Allemands et des Hongrois lors du siège de Budapest.
C’est bien l’équilibre des forces dans l’Europe de
l’après-guerre qui pèse déjà sur ces derniers mois de 1944.
Hitler le sait.
Malade, bourré de médicaments par le docteur Morell, il ne
peut dissimuler le tremblement qui désormais affecte tout le côté gauche de son
corps. Mais ses facultés intellectuelles, quand elles ne sont pas emportées par
la colère ou la paranoïa, restent vives.
Il invoque auprès de ses généraux ou d’un Doriot les armes
secrètes, mais en fait il compte sur l’éclatement de l’Alliance des
Anglo-Américains et des Russes.
« Jamais l’Histoire, dit-il au général Guderian, n’a
connu une coalition comme celle de nos adversaires, composée d’éléments aussi
hétérogènes poursuivant des buts aussi divergents… Des États super-capitalistes
d’un côté, des États super-marxistes de l’autre.
« D’un côté, un Empire en train de mourir, la
Grande-Bretagne, de l’autre, une colonie aspirant à la succession des
États-Unis. Chaque partenaire est entré dans la coalition avec l’espoir de
réaliser ses propres ambitions politiques. »
Il ajoute que les Anglo-Saxons sont l’élément le plus faible
moralement et matériellement.
« Une bonne raclée les ramènera à la raison »,
lance-t-il.
Le Führer écarte avec un rugissement de colère les propos
qu’il appelle défaitistes et qui prétendent que la Wehrmacht et les divisions
SS n’ont plus les moyens d’arrêter la progression des Alliés vers le Rhin.
« Toute retraite en bon ordre est devenue impossible,
écrit le général Speidel. Les armées alliées motorisées cernent par petits groupes
les divisions d’infanterie allemandes et les écrasent séparément… Aucune force
terrestre allemande de quelque importance ne peut être jetée dans la bataille
et il n’y a pratiquement aucun secours à attendre de l’air. »
Hitler ignore l’amère plaisanterie qui circule au sein de la
Wehrmacht en Normandie :
« Si tu vois un avion blanc, c’est un Américain ;
un noir, c’est un Anglais ; si tu ne vois rien, c’est la Luftwaffe. »
Himmler, Reichsführer, commandant l’Armée de l’Intérieur et
les divisions SS et Waffen-SS, connaît l’état d’esprit de bien des soldats
allemands.
Le 10 septembre, il diffuse à toutes les unités un
ordre du jour menaçant :
« Certains éléments indésirables croient que la guerre
sera terminée pour eux aussitôt qu’ils se seront rendus à l’ennemi… Ils se
trompent. Tout déserteur trouvera son juste châtiment. De plus, sa lâche
conduite entraînera les suites les plus désastreuses pour les membres de sa
famille qui seront fusillés sans jugement. »
Des chefs d’unité vont plus loin encore.
Ils s’adressent souvent à de jeunes recrues qui n’ont pas
encore 17 ans et qui constituent ces divisions de Volksgrenadier, qui
n’ont aucune expérience du front.
« Des traîtres ont déserté nos rangs, écrit leur
colonel. Ces misérables ont livré d’importants secrets militaires. Des Juifs
calomniateurs et fourbes vous travaillent à coups de propagande et tentent de
vous enrôler parmi ces misérables. Laissez-les en vain cracher leur
poison ! Quant aux misérables traîtres qui ont oublié leur honneur, leur
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