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A l'ombre de ma vie

A l'ombre de ma vie

Titel: A l'ombre de ma vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Florence Cassez
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vous faisiez partie de la
famille. Je vous sortirai de là.
    C’est quelque chose, tout de même ! J’ai envie de le
croire, moi. Ce sont exactement les mots que j’avais envie d’entendre de la
part du président de la République. J’en avais envie, mais je n’osais même pas
espérer qu’il me parlerait ainsi. Et ce n’est pas fini !
    — Carla voulait venir vous voir à la prison, mais ce ne
sera pas possible. D’ailleurs, je vais vous la passer, elle va vous expliquer.
    Une petite voix, douce, craquante, pleine de sentiment et
d’attention, reprend la conversation. Elle me parle d’abord de ma santé et,
comme son mari me l’avait dit, elle m’explique :
    — Je voulais venir, mais Nicolas me le déconseille. Je
suis très déçue, mais il me dit que cela te ferait plus de mal que de bien. On
ne sait pas comment cela serait perçu par l’opinion mexicaine.
    Elle m’a tutoyée. Elle me fait craquer, je pleure. Nicolas
Sarkozy, ce n’est pas pareil : c’est le président, je ne peux pas lui
faire perdre son temps. Elle, c’est plus amical, une barrière est tombée.
    Elle me repasse son mari. Il répète alors que je dois lui
faire confiance, que je ne dois pas écouter tout ce qui se dira pendant son
séjour et qu’il faudra peut-être que lui-même laisse dire certaines choses. OK,
j’ai compris. Je suis capable de tout entendre, s’il le veut. Pourvu qu’il me
tire d’ici, je veux bien qu’il laisse dire ce qu’il veut.
    Quand je raccroche, j’ai l’impression, avec tous les mots
que j’ai entendus, avec le ton qu’ils ont employé, que je parlais à un oncle et
une tante. Il y a ce type que j’avais complètement oublié, le gars de
l’ambassade, avec une tête plutôt sympa, qui me regarde fixement. Mais il ne me
dit rien, et pendant que j’allume une cigarette il s’en va. Il faut que je
remonte tout ce couloir, avec la grande salle des visites sur la droite et les
fenêtres qui donnent sur la cour fermée de l’autre côté, ce long couloir aux
murs fatigués, au carrelage bosselé, mais cette fois je ne vois rien de tout
cela. La vie est belle, je suis sur un nuage. Je rentre dans ma cellule et je
réalise à peine que je viens de parler au président. Des chocs émotionnels,
j’en ai eu depuis trois ans, et pourtant celui-ci m’a complètement bouleversée.
    C’est une chose de savoir que mes parents sont reçus à l’Elysée,
une autre que d’entendre le président en personne, avec sa voix si singulière,
si souvent entendue, me parler comme si j’étais son amie, comme si j’étais une
proche ; il ne peut pas savoir à quel point il m’a touché. Il m’a
regonflée, c’est sûr, avec lui, avec toute cette détermination qu’il a pour
moi, je vais m’en sortir. Il m’a bien dit : « Je ne vous laisserai
pas tomber. » Et : « Il faut que vous me fassiez
confiance. » Ces mots-là sont gravés en moi, je le sais déjà ; il ne
réalise pas à quel point ils m’aident, ces mots, à quel point ils me portent,
et combien de fois je vais réécouter leur chanson. De telles personnes ne se
rendent pas compte de leur force. Après des moments comme ceux-là, on ne peut
pas y échapper : on rêve, on flotte, et forcément, quand on retombe, ça
fait mal.
    Le lendemain, la directrice m’appelle et me demande si j’ai
appelé le président français. Il m’a dit que c’était secret, évidemment. Alors
je serre les poings, comme un bon soldat qui ne veut pas lâcher, qui ne trahira
pas, et je jure que ce n’est pas vrai :
    — Vous pensez bien que je serais fière de vous le
dire !
    Je ne suis vraiment pas crédible parce que, encore une fois,
je ne sais pas mentir. Je mens comme une enfant et elle ne me croit pas une
seconde.
    — Florence, tu as appelé ton président…
    Rien à faire, je dois être à la hauteur, je ne lâcherai pas.
Elle me regarde longuement, elle ne dit plus rien mais je crois qu’elle a
compris que j’ai promis la discrétion. Elle me laisse partir, je n’ai pas
avoué, j’ai tenu avec tout l’aplomb dont j’étais capable, et la semaine
suivante ce coup de téléphone fera la une des journaux.
    Il m’a promis qu’on se rappellerait le lendemain soir, après
leur entrevue chez les Calderón, mais le lendemain je ne vois personne venir.
Je l’ai espéré, pourtant, ce type de l’ambassade, mais la soirée passe et je
n’ai pas de nouvelles. Évidemment, parce que c’est dans mon caractère, je me
force à

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