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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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d’un œil
soupçonneux :
    — Pourrais-je garder cet argent
même si l’on m’ordonne de t’éconduire ?
    — Oui.
    — Dans ce cas, c’est un risque
que je suis prêt à courir. Mon dos en a vu d’autres.
    Il revint peu de temps après et se
montra plus aimable :
    — Le seigneur Ataulfus te salue
et te présente ses respects. Il est heureux de te savoir en ville. Il est très
occupé et te demande de patienter jusqu’à ce soir. Si tu le souhaites, j’ai
ordre de te conduire dans les appartements qu’il met à ta disposition.
    — N’en fais rien. Je repasserai
à la tombée de la nuit.
    Gundisalvus mit à profit le reste de
la journée pour se promener dans les rues tortueuses et boueuses de la cité. Le
moindre espace était occupé et le prêtre remarqua l’absence quasi totale de
places et de jardins. Les boutiques étaient rares et mal approvisionnées. Dans
l’une d’entre elles, on vendait des étoffes de laine grossière. Croyant avoir
affaire à un client, le marchand lui proposa un manteau et le prêtre sursauta
en entendant le prix qu’on exigeait de lui. En al-Andalous, il n’aurait pas eu
à dépenser autant pour une aussi piètre marchandise. À sa réaction, le
commerçant devina d’où il venait :
    — Je suppose que tu habites
chez les Infidèles. On m’a rapporté que leurs villes étaient fort belles.
    — On ne t’a pas menti.
    — Les négociants y font,
paraît-il, de bonnes affaires. Ce n’est pas mon cas. Je n’ai encore rien vendu
aujourd’hui et je doute qu’un acheteur se présente. Un jour ou l’autre, j’irai
m’installer chez ces maudits païens ! Pardonne-moi, j’oubliais que je
m’adressais à un prêtre. Je te supplie de ne pas me dénoncer auprès de tes
semblables. Ma femme me le répète assez : je ne sais pas tenir ma
langue ! Elle me la baille belle. Avec quoi vais-je payer les impôts et la
dîme ?
    — Rassure-toi, je n’ai aucune
envie de te nuire ni de t’infliger une pénitence. Après tout, on pourrait me
reprocher de ne pas être dans une église en train de prier. J’ai mieux à faire
que de me promener. Cela dit, ici, du moins, tu as la possibilité de pratiquer
librement notre sainte religion et c’est un bonheur que tu n’auras pas si tu
vas chez les Infidèles.
    — Je ne l’ignore pas et c’est
bien la raison pour laquelle je ne mettrai jamais mon projet à exécution. Tu
m’es sympathique. Viens avec moi à la taverne. Je veux te remercier de ta bonté
en te régalant d’un peu de vin.
    Ils pénétrèrent dans une pièce
sombre et s’assirent à une table. Le tenancier déposa devant eux une cruche et deux
gobelets de terre cuite. Tout autour d’eux, des hommes discutaient ou, plutôt,
se disputaient. Deux d’entre eux en vinrent aux mains et roulèrent par terre
dans l’indifférence générale. Son nouvel ami dit à Gundisalvus :
    — Ne t’inquiète pas. Dans quelques
instants, ils se seront réconciliés et commanderont une cruche de vin… La ville
est infestée de ces vauriens. On parle beaucoup d’une prochaine expédition du
roi contre les Musulmans et ils espèrent pouvoir être engagés comme soldats. Je
prie tous les jours pour qu’Alphonse se décide à partir en campagne. Quand ces
coquins auront touché leur solde, ils auront besoin de s’équiper. L’hiver sera
rude et il leur faudra un bon manteau s’ils ne veulent pas geler. J’ai de quoi
les satisfaire. Tu ne peux pas imaginer le froid qu’il fait ici vers la Noël.
L’année dernière, l’eau gelait dans les tonneaux. Une famille pauvre, qui vit
près de chez moi, a perdu deux de ses huit enfants. Ils n’avaient pas de quoi
se chauffer. Avec mes étoffes, ces soldats seront au chaud. Je suis sûr qu’ils
me les achèteront.
    — Pas au prix que tu m’as
proposé !
    — C’était une mauvaise
plaisanterie de ma part. En fait, je m’ennuyais ferme et j’avais envie
d’engager la conversation avec toi. J’ai trouvé le prétexte idéal pour quitter
mon échoppe sans encourir la colère de ma femme. Elle n’apprécie pas que je
passe trop de temps à la taverne.
    — Retourne à tes affaires. Ah,
j’oubliais, voilà une pièce d’argent. Qu’elle te serve à donner à la famille
dont tu m’as parlé de quoi se vêtir chaudement. Je te préviens, je reviendrai
pour m’assurer que tu n’as pas empoché pour toi ce don.
    L’homme soupesa attentivement la
pièce :
    — Voilà de la bonne monnaie. Le
changeur

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