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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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même chambre. À leur retour, ils me racontent
ce qu’ils ont vu en chemin et je fais semblant d’être captivé par leurs récits.
Le moindre bruit est bon à prendre.
    — Tu n’as aucun regret de ce
que tu fais ?
    — Je te l’ai dit, seuls les
riches en ont, une fois morts.
    À son arrivée à Oviedo, Gundisalvus
reconnut sans peine la ville. Elle n’avait guère changé depuis son départ même
si l’ancienne muraille avait été remplacée par de solides remparts, flanqués, à
intervalles réguliers, de hautes tours. Il se signa machinalement en entendant
les cloches sonner. Son compagnon le regarda curieusement :
    — Que sont ces simagrées ?
Jamais je n’ai vu un prêtre se comporter de la sorte.
    — C’est vrai. Rien ne nous
oblige à nous signer en cette occasion. Mais, vois-tu, c’est un bruit que
j’avais fini par oublier. Chez les Infidèles, nous n’avons pas le droit de
faire sonner les cloches ni d’organiser de processions publiques et nous
respectons scrupuleusement ces interdits.
    — Ici, c’est tout le contraire.
Les cloches nous dérangent à toute heure du jour. En revanche, tu n’entendras
pas l’appel à la prière du prédicateur Musulman comme cela se pratique à
Bobastro où j’ai eu l’occasion de me rendre.
    — Y a-t-il des disciples de
Mohammad dans cette ville ? Quand j’y vivais, il n’y en avait aucun.
    — En théorie, ils n’ont pas le
droit de résider ici. Seuls sont autorisés à séjourner, pour une brève période,
des voyageurs ou des négociants, s’ils en demandent la permission et paient une
taxe spéciale. En fait, beaucoup de familles possèdent des esclaves Musulmans.
Ce sont des hommes ou des femmes capturés lors des expéditions organisées par
le roi. Ils ont refusé d’abjurer leur religion. La plupart du temps, leurs
maîtres veillent à ce qu’on ne les oblige pas à manger du porc et leur
permettent d’observer leur carême. En tous les cas, ils n’ont pas de lieu de
culte, contrairement aux Juifs qui possèdent deux synagogues.
    Gundisalvus s’installa chez son
guide. Ce dernier ne lui avait pas menti. Son auberge était un véritable
taudis, une suite de pièces crasseuses et enfumées où gens et animaux, porcs ou
volailles, vivaient pêle-mêle dans un joyeux désordre. Par respect pour lui,
Fredenandus le logea dans une chambre située au-dessus de la grande salle. Il y
accédait en grimpant à une mauvaise échelle de bois, craignant à chaque fois de
se rompre le cou. Son hôte lui avait conseillé de la retirer durant la nuit
pour dissuader d’éventuels voleurs. Hésitant à se rendre chez ses frères, il
resta enfermé pendant plusieurs jours, ne sortant que pour assister à la messe
dans l’église voisine. Finalement, il se fit conduire chez Ataulfus, son cadet
de dix ans, parce que c’était son préféré. Ce gamin avait beaucoup pleuré quand
il avait appris que son aîné devait quitter Ishbiliyah après cette pénible
affaire de meurtre. Quand il se présenta à son domicile, une maison de pierre
dépourvue de fenêtres donnant sur l’extérieur, le portier l’interpella
grossièrement :
    — Que veux-tu ? Mon maître
n’aime pas que les mendiants le dérangent et j’ai ordre de les chasser. Un bon
conseil : passe ton chemin avant que je ne m’énerve.
    — C’est pourtant lui que je
veux voir.
    — Il ne te recevra pas.
    — Je suis convaincu du
contraire. Dis-lui qu’un amateur de chasse s’est présenté à sa porte.
    — Te moques-tu de moi ? Je
n’ai pas envie qu’il m’administre dix coups de fouet pour l’avoir dérangé sous
un prétexte futile. Je le connais, il a la main leste et nous tremblons devant
lui.
    Gundisalvus parut surpris. La
dernière fois qu’il avait vu Ataulfus, c’était un gamin doux et chétif. Tout
effort lui était interdit pour ménager sa santé, comme monter à cheval ou
s’aventurer dans la rue. Un jour, bravant l’interdiction de ses parents, il
l’avait emmené avec lui poursuivre sangliers et biches et le garçonnet avait
été ravi de cette escapade sur laquelle il avait juré d’observer le plus grand
silence. Pouvait-il avoir changé à ce point et être devenu une brute capable de
battre ses domestiques ? Le prêtre réfléchit. Finalement, il tira une
pièce d’argent de sa bourse et la tendit au portier :
    — Tu vois que je ne suis pas
ici pour mendier. Voici un gage de ma bonne foi. Fais ce que je te dis.
    L’homme le regarda

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