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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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monarque.
    Les Chrétiens demeurés obstinément
fidèles à leur foi espéraient qu’avec la disparition d’Euloge et la fin de
l’agitation, Servandus perdrait de son pouvoir ou que la révélation de sa
cupidité lui vaudrait une disgrâce. Hélas, les temps avaient bien changé et l’émir
se montra, sous cet angle, infiniment moins circonspect que ses pères. Il
n’ignorait rien des agissements du comte, mais, entre lui et les Chrétiens,
existait un fossé infranchissable. Il se méfiait de ces traîtres potentiels et
éprouvait un étrange malaise en leur présence. Servandus l’amusait et lui
permettait de vérifier jusqu’à quel point un homme pouvait faire preuve de
servilité et de bassesse.
    Mohammad rit beaucoup quand on lui
rapporta les démêlés du personnage avec l’abbé Samson. Le comte avait pour
parent Hostegensis, évêque de Malaka [30] .
Bon sang ne pouvant mentir, le prélat était aussi corrompu que son cousin. Dans
son diocèse, les prêtres devaient acheter leur charge, quitte à se rembourser
sur les fidèles des frais engagés en marchandant les sacrements. Épris de
théologie, Hostegensis aimait à discuter avec les cadis et les rabbins de la
cité et ses conversations l’avaient conduit à mettre en doute certains dogmes
de son Église. Ne parvenant pas à faire comprendre à ses interlocuteurs comment
une femme, vierge de surcroît, avait pu donner naissance au Fils de Dieu, il
finit par leur concéder qu’il s’agissait d’une simple image. Marie avait porté
Jésus non dans ses entrailles, mais dans son cœur, comme un sentiment pur et
aimable. Pris au jeu de ces belles paroles, il se mit à prêcher publiquement
cette doctrine. De passage à Malaka, un ami de Paul Alvar, l’abbé Samson, fut
scandalisé par ses sermons. Il n’avait pas haute estime du prélat, toutefois,
il n’aurait jamais pu imaginer que celui-ci, après avoir mis à l’encan les
charges et les sacrements, sombrerait dans l’hérésie. De retour à Kurtuba, il
fit un rapport circonstancié à l’évêque de la capitale, Valentius, lequel
publia un mandement mettant en garde les fidèles contre cette abominable
doctrine.
    Furieux de cette attaque visant son
parent, Servandus convoqua Valentius et le menaça de destitution s’il ne
réunissait pas immédiatement un concile pour faire condamner l’abbé. Durant
cette assemblée, des gardes furent postés devant la salle, ce qui ne fut pas
sans influer sur la décision prise : Samson fut démis de sa charge et
excommunié. Indignés, des moines francs, de passage dans la capitale, firent
honte à Valentius de sa conduite et le menacèrent d’alerter Rome. L’évêque,
profitant de l’absence de Servandus, convoqua un nouveau concile qui annula les
décisions du précédent. De retour, le comte des Chrétiens entra dans une
violente colère, remplaça Valentius par l’une de ses créatures, et demanda à
Hostegensis de convoquer un troisième concile. Lassés de cette agitation et
soucieux de ne froisser ni Servandus ni Rome, la plupart des prélats
d’al-Andalous ne se présentèrent pas, sous différents prétextes. Il en fallait
plus pour décourager l’évêque de Malaka qui combla les vides en invitant des
cadis et des rabbins. Les clercs présents virent avec indignation les
dignitaires Musulmans et juifs discuter gravement de Marie et de sa maternité.
Ils furent même autorisés à voter et donnèrent, bien entendu, raison à leur
ami. L’affaire fut vite oubliée, en raison du décès d’Hostegensis ; elle
montrait toutefois que les Chrétiens d’al-Andalous ne constituaient plus une
force redoutée et redoutable, mais une masse d’individus sans défense que le
pouvoir pouvait manipuler.
     
    Une fois calmée la fronde des
Nazaréens, Mohammad usa de la ruse pour venir à bout du seigneur muwallad de
Tudela, Musa Ibn Musa Ibn Kasi, qui lui avait marchandé sordidement sa
neutralité lors de la révolte des Tolédans.
    Depuis, ce vieux guerrier avait
multiplié les exploits. Ayant mis le siège devant Barcelone, il avait fait
prisonnier deux aristocrates francs de haut rang, les comtes Sanche de Gascogne
et Emenon de Périgord. Il en avait tiré une belle rançon avec laquelle il avait
fait construire plusieurs châteaux forts. L’émir se débarrassa de lui de
manière particulièrement habile. L’un des voisins de Musa, Izraq Ibn Muntil,
seigneur de Guadalajara, était un jeune homme d’une beauté à couper le

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