Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
dîner: un chiton qui lui tombait jusqu'aux pieds, et dont les bords étaient brodés de fils d'argent.
" Pourquoi tant d'intérêt ?
--Les femmes sont toujours le point faible de l'homme. "
Memnon glissa son bras sous celui de son épouse et se ren dit en sa compagnie à la salle à manger, o˘ des tables étaient disposées devant des lits de repas, à la grecque.
~ ndis qu'il prenait place, une servante lui servit un peu de ce Yin frais et léger en inclinant un cratère corinthien vieux de deux cents ans qui reposait sur la table centrale.
Memnon indiqua un tableau d'Apelle, accroché au mur qui lui faisait face.
Il représentait une scène d'amour particulière ment osée dont les protagonistes étaient Arès et Aphrodite.
" Te souviens-tu du jour o˘ Apelle vint peindre ce tableau dans cette demeure ?
--Oui, je m'en souviens fort bien, répondit Barsine qui avait l'habitude de tourner le dos à cette oeuvre d'art, ne s'étant jamais habituée à
l'effronterie des Grecs et à leur facon de dépeindre la nudité.
--Et tu te rappelles la jeune femme qui posait pour lui dans l'attitude d'Aphrodite ?
-- Bien s˚r. Elle était magnifique: une des plus belles femmes que j'aie jamais vues, digne de personnifier la déesse de l'amour et de la beauté.
--C'était la maîtresse d'Alexandre.
--Tuplaisantes?
--Non, c'est la vérité. Son nom est Campaspé. Le jour o˘ il la vit nue pour la première fois, il fut tellement frappé par sa beauté qu'il demanda à Apelle de la peindre nue. Par la suite, il comprit que le peintre était éperdument amoureux d'elle. Sais-tu ce qu'il fit alors ? Il la lui offrit en échange du tableau.
340 ALEXANDRE Ll~ GRAND~ |~ L~S SABLEs D'AMMON
Alexandre ne se laisse jamais assujettir, pas même par I amour je le crains. Oui, je le répète, c'est un homme dangereux. "
Barsine le regarda droit dans les yeux. " Et toi ? Te laisses tu vaincre par l'amour ? "
Memnon lui rendit son oeillade. " C'est le seul adversaire dont j'accepte la domination. "
C'est alors que survinrent les enfants. Ils avaient coutume d'embrasser leurs parents avant d'aller se coucher.
" quand nous ernmèneras-tu sur le champ de bataille papa ? demanda l'aîné.
--Il est encore trop tôt, répondit Memnon. Il faut que vous grandissiez.
" Puis il ajouta après leur départ, en baissant la tête: " Et que vous choisissiez votre camp. "
Barsine observa un moment de silence.
" A quoi penses-tu ? lui demanda son époux.
--A la prochaine bataille, aux dangers que tu devras affron ter, à
l'angoisse avec laquelle j'attendrai sur la tour l'arrivée d'un messager venu m'annoncer que tu es vivant... -~u mort.
--C'est ma vie, Barsine. Je suis un soldat de métier.
--Je le sais, mais cela ne m'aide en aucune façon. quand cela se produira-t-il ?
--quoi ? L'affrontement avec Alexandre ? Bientôt, même si je ne suis pas d'accord. Très bientôt. "
Ils terminèrent le repas en l'arrosant d'un vin sucré de Chypre. Memnon contempla le tableau d'Apelle qui lui faisai t face. Les armes du dieu Arès gisaient à terre, dans l'herbe, sa tête reposait sur le ventre d'une Aphrodite nue et ses mains étaient appuyées sur les cuisses de la déesse.
Il se tourna vers Barsine en la prenant par la main: " Allons nous coucher ", dit-il.
Après avoir terminé son tour d'inspection, Ptolémée longea le mur d'enceinte du camp et se dirigea vers le corps de garde principal afin de vérifier l'ordre des rondes suivantes.
~ loyant que le pavillon d'Alexandre était éclairé, il s'en approcha.
Péritas, qui sommeillait sur sa paillasse, ne daigna même pas le regarder.
Ptolémée se fraya un chemin parmi les gardes et glissa la tête à
l'intérieur de la tente. " Y aurait-il ici un verre de vin pour un vieux soldat, fatigué et assoiffé ?
--J'ai compris que c'était toi dès que je t'ai vu pointer le nez, plaisanta Alexandre. Viens, sers-toi. J'ai envoyé Leptine se coucher. "
Ptolémée se versa une coupe de vin et en avala quelques gorgées. " que lis-tu ? demanda-t-il en lorgnant derrière les épaules du roi.
--Xénophon, la "retraite des Dix Mille".
--Ah, ce Xénophon ! Il a réussi à faire d'une retraite une entreprise plus glorieuse que la guerre de Troie... "
Alexandre griffonna une note sur un bout de papyrus, il posa son poignard sur le rouleau et leva la tête. " Eh bien, c'est un ouvrage follement intéressant. Ecoute:
Comme le soir approchait, ce fut pour les Perses le moment de s'éloigner;
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