Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
prétexte pour déclencher les hostilités.
Il retourna à Miéza dès qu'il se fut libéré des multiples devoirs que son retour à Pella avait engendrés: participation aux réunions du gouvernement, à la réception des hôtes étran gers, des ambassades et des (lélégations, et aux assemblées de l'armée, fondamentales pour les relations que la couronne entretenait avec les nobles qui l'appuyaient.
Aristote avait déjà quitté les lieux, mais son neveu Callisthène était encore là. Il mettait de l'ordre dans la col lection de plantes de son oncle et s'occupait de l'édition des oeuvres que le philosophe avait expressément dédiées à son royal élève: une étude consacrée à la monarchie et une autre à la colonisation, o˘ il théorisait sur la diffusion, dans le monde, du modèle de la cité grecque, seul et véritable véhicule de liberté, laboratoire de civilisation spirituelle et matérielle.
quoi qu'il en soit~ Alexandre demeura quelques jours à Miéza afin de se reposer et de méditer, prenant ses repas en compagnie de Callisthène, un jeune homme d'une grande culture, qui possédait une profonde connaissance de la situa tion politique des …tats grecs.
Passionné par l'histoire, il s'était procuré non seulement les grands ouvrages classiques d'Hécatée de Milet, d'Hérodote et de Thucydide, mais aussi ceux des historiens occidentaux tels que le Syracusain Philistos, qui relatait l'histoire des cités grecques de Sicile et d'Italie, un pays o˘
émergeaient de nou velles puissances, comme la ville de Rome, fondée par le héros troyen …née et visitée par Héraclès au cours du voyage qui l'avait ramené de la lointaine Ibérie.
Après le dîner, ils s'asseyaient à l'extérieur, sous le portique, et discutaient jusqu'à une heure avancée. " Pendant que ton père se battait contre les Scythes, dit un soir Callisthène, le conseil du sanctuaire de Delphes a déclaré une nouvelle guerre sainte contre les habitants d'Amphissa.
--Je le sais, répliqua le prince. Mais aucun des deux partis n'est en mesure de l'emporter. Les Thébains se cachent der rière Amphissa, ils refusent de sortir à découvert pour éviter d'encourir les foudres du conseil. La situation est à nouveau critique, notamment si l'on considère la future décision d'Athènes. Le conseil nous a déjà envoyé une demande d'in tervention officielle, et je ne crois pas que mon père se le fera dire deux fois. "
Callisthène se versa un peu de vin après avoir servi le 1~6 ALEXANDRE LE GRAND | LE FILS~U SONGE 137
prince. a Le conseil est présidé par les Thessaliens, qui sont vos amis...
Connaissant ton père, je ne m'étonnerais pas d'ap prendre qu'il est l'auteur de cette manoeuvre. "
Alexandre l'observa tandis qu'il sirotait négligemment sa coupe de vin. "
Doisje penser que tu as les oreilles qui traî nent, Callisthène ? "
Le jeune homme reposa sa coupe. " Je suis un historien, Alexandre, et je crois être un bon élève de mon oncle, comme tu l'as été toi-même. Tu ne devrais pas être surpris de me voir utiliser les instruments de la logique, plutôt que les racontars de deuxième ou troisième main.
" Maintenant, laisse-moi deviner: ton père sait que l'opi nion publique athénienne n'est pas favorable aux Thébains mais il sait aussi que Démosthène fera tout ce qui est en son pouvoir pour que les Athéniens changent d'avis et soutiennent Thèbes, laquelle appuie Amphissa contre le conseil du sanc tuaire, c'est-à-dire contre Philippe.
" Démosthène, quant à lui, sait que le seul espoir de faire obstacle à
l'hégémonie macédonienne sur la Grèce est d'unir les forces d'Athènes à
celles de Thèbes. Il s'efforcera donc de conclure un pacte avec les Thébains, même s'il lui faut pour cela défier le plus grand consensus religieux des Grecs, l'oracle du dieu Apollon.
-- Et à ton avis, comment réagiront les Thébains? " demanda Alexandre, curieux de connaître dans les moindres détails les hypothèses de son interlocuteur.
" Cela dépendra de deux facteurs: la réaction des Athéniens, et celle de l'armée macédonienne én Grèce cen trale. Ton père tentera d'exercer la plus forte pression possible sur les Thébains pour les dissuader de se lier à
Athènes. Il n'ignore pas qu'une alliance l'obligerait à affronter la plus grande puissance terrestre et la plus grande puissance navale de toute la Grèce, un morceau trop gros à avaler même pour le roi des Macédoniens. "
Alexandre
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