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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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Rex ne peut être qu’un
militaire, évidemment un général. Comment vit-il ?
Il ne m’en a riendit 20 .

    Une fois qu’il a fini, il me demande de me rendre
demain à Annecy, chez un certain François de
Menthon. Il habite un château construit au bord du
lac, à quelques kilomètres de la ville. Je dois organiser avec lui une « liaison permanente », selon la formule consacrée. *Rex me dit qu’il est rapporteur duCGE 21 . Sans m’éclairer sur le rôle de cet organisme,
il m’indique verbalement le lieu et la date de la prochaine réunion et me confie l’ordre du jour manuscrit que je dois soumettre à de Menthon afin de
recueillir ses observations.

    Il part dans l’après-midi et sera de retour demain
à 7 heures du soir. Je devrai l’attendre à l’extérieur
de la gare Perrache, devant la sortie principale.

    Après l’avoir quitté, je cherche un café pour
m’asseoir afin de consulter le plan de Lyon et repérer les rues où je dois porter les plis. Quand j’ai terminé mon pointage, je m’aperçois que les adresses
sont éparpillées dans une sorte de quadrilatère bordé
par la Saône et le Rhône et représentant le centre de
la ville, de la place des Terreaux à la gare Perrache.
Cet itinéraire mord parfois sur les deux rives.

    Le reste de la matinée, je cours d’une rue à l’autre.
Ignorant le numéro des tramways desservant mes
destinations, je marche jusqu’à l’épuisement et perds
beaucoup de temps dans mes recherches. Malgré
tout, j’achève mon travail en début d’après-midi.
Revenu près de la place Bellecour, dont l’immensité
désertique me rassure, je déjeune dans un bouchon
de la rue voisine des Marronniers. J’ai trouvé cette rue
par hasard lors de mes pérégrinations, en remarquant
qu’elle était occupée par des bistrots à l’aspect
engageant.

    N’ayant rien à faire jusqu’au lendemain, je flâne
le reste du jour. Depuis mon premier rendez-vous
avec Schmidt, j’ai repéré au coin de la place Bellecour
la vaste librairie Flammarion. Les librairies me sont
toujours apparues comme des lieux enchantés dans
lesquels j’aime à passer des heures à feuilleter des
livres, découvrir des auteurs inconnus ou rêver
devant des titres que je ne lirai jamais.

    Suivant un rite immuable, j’examine d’abord les
vitrines, regardant chaque livre exposé, accompagné
parfois de comptes rendus élogieux et d’une photo
de l’auteur. Puis, j’entre et vogue à l’intérieur du
magasin. Après avoir parcouru les livres politiques
et les romans, je feuillette les ouvrages de poésie.
Ici, les vitrines sont dédiées aux nouveautés. Dans
l’une d’elles, un gros bouquin tient la vedette : LesDécombres , de Lucien Rebatet. Un panneau de coupures de presse élogieuses annonce que sa parution
est un événement. L’auteur ne m’est pas inconnu : il
avait rédigé des articles dans deux numéros spéciaux de Je suis partout consacrés aux Juifs. J’avais
été captivé, dans le dernier, de 1939, par son long
article sur l’affaire Dreyfus, qui était dans le ton de
ce que j’entendais dans ma famille.

    Les autres vitrines présentent des ouvrages
d’auteurs familiers : Giono, Mauriac, Montherlant,
Valéry, etc. Décidé à renouer avec mes habitudes,
j’entre dans le magasin. Spécialisé dans les livres
neufs, il n’a malheureusement pas le charme désordonné des bouquinistes. Je me dirige vers la table
où se dresse une pile des Décombres . Après avoir
sauté la préface, j’attaque la première page. Emporté
par la prose torrentielle, je parcours la seconde : les
images cocasses le disputent à la cruauté des jugements. Mon goût pour la polémique est comblé. Du
coup, les autres ouvrages perdent toute saveur. Je paie
et traverse la rue pour m’asseoir sous les ombrages
de la place Bellecour. Saisi par la lecture, j’oublie
tout le reste.

    C’est la confession d’un homme ayant vécu l’agonie et la mort de la III e  République. Il est d’autant plus
familier des événements et des personnages qu’il a
été le secrétaire de Maurras. La méchanceté d’un
titre de chapitre, « L’inAction française », révèle que
ce dernier n’était en rien un homme d’action et que
le coup de force n’était pour lui qu’une figure de
style. Les Décombres se révèlent déterminants dans
ma rupture avec les idées maurrassiennes. J’admets
pour la première fois les défauts et les erreurs de la
doctrine, ainsi que

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