Alias Caracalla
de les accepter parmi eux. C’est originellement la position de Léon Blum, qui dénonce la différence de traitement entre les communistes, acceptésofficiellement, et les socialistes, présents dans les
mouvements à titre individuel seulement.
C’est une bataille qu’ils sont décidés à mener
jusqu’à la reconnaissance officielle du parti socialiste. La conclusion du commandant tient en une
phrase : « C’est dire l’urgence de votre manifeste. »
Après un temps, * Rex répond sur le fond : « Une
partie de la solution tient au déroulement des opérations d’enlèvement. Nous avons déjà compris le
danger d’une présence à Londres de * Francis avant
notre arrivée. Toutefois, nous devons tenir compte
d’obstacles non négligeables : selon ce que vous
m’avez rapporté des intentions du Général, il refuse
tout ce qui ressemble au retour des partis. La campagne de * Brumaire, en septembre, que vous m’avez
révélée, n’a pu que le conforter. » Il ajoute : « Un
autre élément, plus déterminant peut-être, est le refus
du retour des anciens partis par les mouvements.
Les différents comités socialistes se briseront sur
cet écueil. Seul le Général a autorité pour leur faire
accepter l’inacceptable, et encore… Je poursuis donc
mes consultations et serais heureux de connaître vos
objections au texte que je vous ai adressé.
— Au sein de la confusion actuelle, c’est une prise
de position sans ambiguïté. Ce n’est pas son moindre
mérite. »
Je suis heureux qu’il ait remarqué la justesse du
ton que Bidault estimait « trop carré ». Il est vrai
que ce dernier est un résistant, et à ce titre mieux à
même d’apprécier les réactions épidermiques des
chefs.
Manuel poursuit : « La participation des forces
ouvrières à côté des partis et des mouvements me
semble une innovation qui renforce la légitimité du
conseil : la nation est ainsi représentée, sans doutepour la première fois dans l’histoire, dans la variété
de ses composantes. La présence du PSF (nuance
Vallin) me semble une nécessité. Mais attendez-vous
à déchaîner les socialistes contre vous. Quand vous
viendrez à Londres, je vous ferai communiquer les
comptes rendus du comité Jean-Jaurès, où * Brumaire
lui-même s’est fait malmener : c’est dire ! De toute
manière, vous aurez ce dernier contre vous. Il
condamne le retour des partis, qui, selon lui, ne
sont plus que des étiquettes sans signification. Il a
d’ailleurs l’ambition de créer un grand parti gaulliste qui occuperait tout le territoire politique. Vous
vous doutez de la place qu’il s’y réserve. »
Comme toujours, * Rex écoute les objections puis
intervient : « C’est le Général qui tranchera. Le choix
est aujourd’hui sans ambiguïté : ou les socialistes
mettent en œuvre un des trois projets de comité, et
le contrôle des résistances échappera au Général ;
ou les mouvements s’isolent dans un comité de
coordination interzone, avec les risques d’un conflit
permanent avec de Gaulle ; ou encore ce dernier
impose une direction commune au kaléidoscope des
Résistances. Je souhaite le convaincre de cette dernière solution. »
Jeudi 14 janvier 1943
Exigences politiques de la Résistance
*Rex est reparti sur le terrain lorsque Bidault me
demande de passer un câble urgent. En le codant,
je reconnais la conclusion d’une de leurs dernières
conversations.
Bidault relate une exigence du CGE, qui n’a aucuneliaison directe avec Londres : il estime que, sous
peine de « confusion irrémédiable des esprits », un
accord de la France combattante avec Alger exige
l’exclusion de certains personnages : Chautemps,
Flandin, Pucheu, Peyrouton, etc.
Je ne suis nullement étonné de cet oukase. Depuis
le débarquement du 8 novembre, c’est un thème
récurrent dans les conversations de l’ensemble des
résistants, Français libres compris. Beaucoup d’hypothèses peuvent être envisagées autour de la conclusion d’un accord entre de Gaulle et Giraud, sauf le
retour des hommes qui ont trahi la République.
C’est d’ailleurs la difficulté soulevée par le projet de
conseil politique de * Rex.
C’est alors qu’un danger surgit inopinément.
Bidault a appris en écoutant la BBC que Fernand
Grenier, ambassadeur du parti communiste, est arrivé
à Londres le 12 janvier. Il s’agit d’un des représentants en zone libre avec lesquels * Francis avait
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