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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
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dans sa ville avant que l’armée d’Henri et Aliénor n’y mette le siège.
    Ainsi Louis VII était allé au bout de sa logique. Sans armée, par sa seule présence dans la ville, il met Henri et Aliénor face à leurs responsabilités de vassaux. La personne du roi est sacrée, c’est la regia dignitas. En aucun cas, un vassal ne peut s’en emparer ; il peut lui faire la guerre, le battre, négocier sa reddition mais jamais le faire prisonnier. Si les Plantagenêt s’emparent de la ville, ils se saisissent du même coup de la personne du roi, commettant alors une des plus grandes forfaitures selon le droit féodal. Leur puissance militaire ne leur est d’aucun secours. Louis les a entraînés sur un terrain où ils sont à égalité, celui du droit et de la morale féodale. La décision qu’Henri et Aliénor ont à prendre est extrêmement lourde de signification et de conséquences. S’ils poursuivent leur dessein, ils bousculent l’équilibre qui s’est instauré entre eux-mêmes et la couronne de France, mais également l’équilibre politique de l’Ouest de l’Europe. La question se pose de la réaction de l’empereur d’Allemagne, du pape, des rois de Sicile, d’Aragon, de Castille, de tous les grands vassaux de Louis VII comme par exemple le comte de Flandres. En cet été 1159, avec leur puissante armée encerclant Toulouse et le roi de France enfermé dans la ville, les Plantagenêt peuvent « techniquement » s’emparer du trône de France. Car n’oublions pas que leur fils aîné, Henri le Jeune, est fiancé à la dernière fille de Louis ; Henri et Aliénor pourraient s’assurer de la personne du roi, se comporter ensuite comme des régents jusqu’à la majorité de leur fils et la mort de Louis… La chose ne serait pas simple, mais encore une fois elle est possible. Ont-ils envisagé cette solution ?
    L’armée des Plantagenêt campe quelques semaines devant Toulouse. Pendant ce temps on négocie pour essayer de persuader le roi de France de sortir de la ville. Il se montre d’une fermeté absolue. Henri hésite. Autour de lui, les avis divergent. Nous savons que Thomas Becket est des plus acharnés à vouloir donner l’assaut et en finir avec ce petit roi de France qui nargue la puissance anglaise. Le chancelier est bien placé pour savoir combien l’expédition coûte, il ne veut pas imaginer un seul instant que tout cet argent dépensé ne serve à rien. Et puis, nous laissent entendre ses biographes, il semble prendre un certain plaisir à conduire une armée et envisage sans doute d’ajouter le prestige militaire de quelques belles actions à sa réputation de grand administrateur et d’excellent diplomate. Nous ne savons rien de l’attitude d’Aliénor pendant ces semaines. Elle est à l’origine de l’opération. Elle considère que le comté de Toulouse lui revient de droit et peut également dans ces conditions estimer que Louis se met hors la loi féodale en couvrant de son autorité royale une mauvaise querelle. Peut-être avance-t-elle cette opinion en rappelant que le roi de France, lorsqu’il était son mari, voulut aussi s’emparer du comté en son nom. Mais elle sait aussi que les choses ne sont pas aussi simples. Pourtant, si tous deux décident de reculer et d’abandonner la partie, Toulouse est définitivement perdue. Jamais ils ne pourront renouveler l’opération.
    Henri II prendra finalement la décision de retirer ses troupes sans donner l’assaut à la ville. Cette décision, prise sans doute avec beaucoup d’amertume et de colère, fera couler quantité d’encre. Combien d’historiens se sont étonnés qu’un homme qui savait par ailleurs ne pas respecter sa parole, ait tout à coup reculé devant le risque de commettre un parjure ? On a évoqué des raisons militaires et en particulier l’éloignement de l’armée de ses bases, ce qui rendrait délicate une campagne trop longue. Régine Pernoud fait remarquer que, quelques années plus tard, Henri conquerra l’Irlande avec un éloignement de ses bases beaucoup plus conséquent… On a aussi imaginé des disputes, de graves dissensions entre Henri et ses vassaux, des trahisons pourquoi pas ! La raison de ce repli est totalement liée aux règles féodales. Henri et Aliénor sont vassaux du roi de France pour leurs possessions continentales, tout comme ils ont eux-mêmes des vassaux en Angleterre. S’ils bafouent le serment d’allégeance qu’Henri a prêté au Capétien,

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