Amy, ma fille

son sang.
    Dans un premier temps, cette nouvelle l’a attristée : elle aurait tellement aimé chanter devant ses pairs ! Mais quand je lui ai parlé de l’idée de Raye, elle a retrouvé le sourire même si elle restait profondément déçue.
    Elle en avait vraiment marre du Capio Nightingale et voulait partir. J’ai réussi à la convaincre de rester un jour supplémentaire. Quand elle a quitté la clinique, je lui ai réservé une suite au Plaza on the River, près du palais de Westminster. Amy appréciait que les appartements soient indépendants de l’hôtel et que sa vie privée soit ainsi préservée. J’ai demandé à Wood de rester avec elle, pour le plus grand plaisir d’Amy.
    Le vendredi 10 février dans la matinée, Raye, Lucian, le docteur Ettlinger, le docteur Kelleher (le nouveau psychiatre de ma fille), Amy et moi avons eu une réunion au Capio Nightingale au cours de laquelle nous lui avons bien fait comprendre que si elle reprenait de la drogue à sa sortie de la clinique, la retransmission en direct de son concert pour les Grammy serait annulée. Elle a accepté nos conditions et Raye et moi l’avons ensuite conduite jusqu’à sa chambre pour y discuter des modalités du concert. Il était prévu qu’elle chante d’abord pour quelques invités avant de chanter deux titres en live . Elle était très enthousiaste et tandis que nous discutions des détails, j’ai revu ma fille telle qu’elle était auparavant. Elle m’a promis qu’elle ne reprendrait pas de drogue avant le concert. J’avais vraiment envie de la croire mais le doute subsistait dans mon esprit.
    Le lendemain, j’ai emmené ma sœur Melody et son mari Elliott assister à une répétition avant le concert. J’ai été parcouru de frissons quand j’ai entendu Amy ; elle aurait pu chanter immédiatement, sans plus de répétitions. Elle était géniale et ne donnait aucun signe d’avoir pris de la drogue. En revanche, elle avait beaucoup bu au cours du repas que nous avions pris ensemble à l’hôtel, ce qui m’avait inquiété. J’espérais que ça n’annonçait pas de nouveaux problèmes.
    Le concert d’Amy devait débuter à vingt-trois heures trente pour coïncider avec la cérémonie des Grammy Awards à Los Angeles, mais je voulais être présent très tôt pour garder un œil sur elle. Je suis arrivé à dix-huit heures trente aux Riverside Studios d’Hammersmith, dans l’ouest de Londres. La salle avait été aménagée en boîte de nuit. Je suis resté avec les membres du groupe en attendant le début du concert.
    Amy a offert une superbe prestation à sa famille et à ses amis. C’était encourageant. Elle a chanté « You Know I’m No Good » et « Rehab » et le public, à Londres comme à Los Angeles, l’a applaudie très longtemps. Ça a été un très grand moment. Même dans la tourmente, elle était capable du meilleur. Je l’avais vue chanter devant des milliers de gens, dans des petites salles de concert et dans des pubs, dans mon salon ou encore à l’arrière de mon taxi, mais ce soir-là, elle s’est surpassée. Elle débordait d’énergie et a pris un grand plaisir à chanter.
    Elle a remporté cinq Grammy : celui de l’Enregistrement de l’année et de la Chanson de l’année (les deux pour « Rehab »), de la Révélation de l’année, du Meilleur Album Vocal Pop (pour Back to Black ) et de la Meilleure Prestation féminine. Un record pour une artiste étrangère.
    Quand Tony Bennett a annoncé qu’elle avait gagné le Grammy de l’Enregistrement de l’année, nous nous sommes tous précipités sur scène et Janis, Alex, Amy et moi nous sommes pris dans les bras.
    — Je n’arrive pas à le croire, papa. Tony Bennett a prononcé mon nom !
    Dans son discours de remerciements, Amy a dit en toute simplicité : « Merci beaucoup. C’est un honneur d’être ici. Merci, merci beaucoup. » Et quand le public a scandé son nom, elle a passé ses bras autour de Janis et moi et a dit : « À mon père et ma mère. »
    Quand j’ai entendu ces mots, je n’ai pas pu retenir mes larmes. Cette émotion n’était pas seulement causée par son succès, mais par tout ce que ma fille avait enduré ces six derniers mois.
    Toute la famille a fait la fête jusque tard dans la nuit et nous sommes rentrés à l’hôtel à cinq heures et demie du matin. La chambre était envahie de monde. J’ai pris Amy à part et nous sommes sortis sur la terrasse. Nous avons frissonné