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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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Loew.
    — Putain, s’écria le journaliste, c’est le scoop de l’année !
    Des centaines d’hommes et de femmes couraient dans tous les sens. Le policier tentait de se frayer un passage pour approcher l’orateur.
     
    À vingt mètres de l’estrade, caché dans un petit réduit qui servait à entreposer des outils de jardinage, un homme repliait vivement un fusil à lunette et à canon articulé. Il inséra l’arme dans un gros tube de canne à pêche, retira son gant de protection et sortit de la cabane. D’un pas rapide, il prit l’allée centrale, passa les grilles et s’arrêta près d’une Rover noire. Il ouvrit le coffre, y déposa son nécessaire de pêcheur, et s’assit à l’arrière.
    — Bonne pêche ? demanda le chauffeur en démarrant.
    Une ambulance remontait l’avenue à toute allure.
    Le tireur saisit la Bible posée sur le siège avant, l’ouvrit à la page marquée d’un signet et répondit :
    — Évangile selon Matthieu, verset 13 : 49-50 : « Triez dès aujourd’hui les bons des mauvais poissons. Il en sera de même à la fin du monde. »

18
     
    New York
    Hôtel Astoria
    21 juin 2009
     
    La première robe longue passa la porte à battant sous le feu roulant des flashs. La journaliste de Vogue , d’un doigt fébrile, indiquait à son photographe les shootings à ne pas manquer. Robe d’organdi à liseré bleu émail, soie de Chine sur les épaules, corset ruisselant de dentelle, rien ne devait échapper à l’œil vorace des objectifs. Le lendemain, la presse people mettrait en couverture ces icônes de la haute société venues en tenue d’apparat à la plus prestigieuse soirée de charité de l’année. En être ou pas, telle était la cruelle question qui torturait bien des consciences en attente du carton d’invitation, le sésame tant désiré. Une angoisse existentielle liée au fait que l’association caritative lançait ses invitations selon des critères connus d’elle seule et sur lesquels les journalistes mondains les plus subtils s’interrogeaient à longueur d’articles. L’American Faith Society ne donnait qu’une réception dans l’année et, en une seule soirée, elle récoltait assez de fonds pour financer l’intégralité de ses programmes de développement.
    Nul ne savait qui décidait de la liste des 358 invités qui auraient l’insigne honneur de signer un des plus gros chèques de leur existence. Dans les salles de rédaction, on murmurait qu’une fortune personnelle dépassant les huit zéros était la première des conditions, ensuite d’autres considérations plus ténues entraient en jeu, mais la question demeurait entière. Certes on remarquait que les détenteurs de fortunes acquises dans le monde du cinéma et de la musique étaient fort peu représentés tandis qu’avocats, financiers et politiques se taillaient la part du lion. Pour autant, à chaque nouvelle soirée des exceptions remarquées venaient troubler le jeu des pronostics. Ainsi une star noire du hip hop new-yorkais venait de faire son entrée en robe Versace tandis qu’une fois encore le planétaire Bill Gates ne passerait pas les portes de l’hôtel Astoria.
    À l’entrée de la salle de réception, John Miller, président de l’American Faith Society, se faisait un devoir de saluer lui-même ses invités. Une oreillette discrètement placée sous une mèche de cheveux gris le renseignait aussitôt sur le patronyme de l’inconnu en smoking lustré ou de la blonde en escarpins qui montait les marches. Un mot de bienvenue, un sourire appuyé et chacun entrait dans la grande salle, secrètement flatté d’être reconnu par un des hommes les plus puissants du pays. À l’intérieur, une noria de serviteurs prenait le relais, conduisait les invités à leur place avant de s’enquérir de leur moindre désir. Chaque table accueillait six convives, pour la plupart des couples, mais aussi des célibataires soigneusement appariés afin d’être immortalisés d’un flash. Chaque photo, après analyse de la responsable de communication, serait subtilement distillée, les jours suivants, dans les magazines les plus en vue. De quoi alimenter la chronique mondaine et la rumeur publique pendant des semaines. Un choix éminemment stratégique qui renforçait, s’il en était besoin, le prestige unique de cette soirée.
    D’un regard, John Miller indiqua au responsable de la sécurité qu’il souhaitait faire une pause. Les prochains invités attendraient

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