Apocalypse
quelques minutes. Le président abandonna son sourire de commande et se dirigea vers un entresol protégé.
À l’intérieur, un jeune homme en chemise blanche inclina la tête et désigna un ordinateur portable posé sur une table :
— J’ai la connexion Internet que vous désirez, monsieur.
— Elle est sécurisée ?
— Au niveau maximum. Toutes les sept secondes, un rupteur modifie les paramètres de votre connexion. Impossible à détecter.
— Parfait, Harold. Vous pouvez me laisser.
Une enveloppe clignotante surgit à l’angle droit de l’écran. Miller cliqua sur la souris. Une page Web apparut, constellée de chiffres et de signes mathématiques. John enclencha le logiciel de décodage. Les lignes se brouillèrent et l’unité centrale se mit à vrombir à plein régime. Une minute d’attente.
Soudain un texte se dégagea : le compte rendu des opérations parisiennes de la veille. Le président de l’American Faith Society se cala dans son fauteuil et commença sa lecture. L’enlèvement du Canadien n’avait rien apporté, le dessin était entre les mains de la police française, néanmoins ses deux envoyés avaient fait leur travail.
Quand il eut terminé, il porta la main à sa poche intérieure et en sortit un étui à cigarettes. Il ne fumait qu’exceptionnellement. Quand il avait une décision définitive à prendre. Avant d’ouvrir l’étui, ses doigts caressèrent les deux initiales gravées sur le dessus.
J. B.
Un instant, il pensa à tous ses prédécesseurs qui, eux aussi, avaient eu à faire des choix cruciaux pour qu’un jour la Vérité survienne et que les Élus soient sauvés.
J. B.
Ils n’étaient qu’une poignée à connaître le sens véritable de ces deux lettres.
Lentement il prononça le nom secret de la confrérie.
Judas Brothers.
Maintenant il était prêt.
Il alluma sa cigarette et se concentra sur la photo qui accompagnait le rapport. Une quarantaine d’années. Le cheveu court et rebelle. Des yeux sombres dans un visage en amande. Miller fixa l’électron libre qu’il n’avait pas prévu. Toute opération clandestine comporte une part d’aléatoire. Elle venait de surgir sous la forme d’un flic français. John aspira une longue bouffée et la rejeta lentement. L’imprévu allait devoir être géré. Pour l’utiliser ou pour l’éliminer. Restait à bien connaître son profil pour prendre une décision.
Il tapota sur la note jointe rédigée par ceux du groupe de Paris, qui avaient infiltré le ministère de l’Intérieur. Rapides et efficaces, ils connaissaient déjà sa fonction et son nom : un commissaire spécialisé dans le trafic d’œuvres d’art.
Antoine Marcas.
Il était indiqué que la France envoyait le commissaire Marcas à Jérusalem pour… Il ne continua pas sa lecture, connaissant la suite et tapa sur la rubrique cursus .
La biographie du commissaire défila rapidement. Naissance, études, entrée dans la police, progression dans la carrière, engagement dans la maçonnerie…
John Miller s’arrêta net. D’un clic, il revint à la photo et fixa le visage du Français qui s’était mis en travers de son chemin. Du chemin millénaire des Judas Brothers .
Cette fois sa décision était prise.
Il enclencha le logiciel de cryptage et tapa quatre mots sur la page de mail : « Ne le lâchez pas ! »
Dans la salle de réception, un présentateur vedette de CNN venait de faire son apparition. Paré comme dans son émission d’une chemise de soie safranée et d’une paire de bretelles rayée de noir, il serrait nonchalamment les mains qui se tendaient vers lui. Aux félicitations qui pleuvaient, il répondait par un sourire convenu, un mot rapide, tout en jetant un œil sur l’estrade où il allait animer la soirée. Trois heures de show ininterrompu pour convaincre les puissants de l’Amérique de faire pleuvoir une pluie de dollars sur l’association. Déjà il voyait le sourire béat des donateurs quand il prononcerait d’une voix mielleuse leur nom et le montant de leur chèque. Il tourna discrètement le regard vers le prompteur où s’inscrirait le montant final des dons. Tous ces imbéciles qui se pressaient autour de lui, bourdonnant comme dans une ruche, allaient faire sa fortune. L’Association lui avait promis un pourcentage de rêve si, ce soir, il dépassait les cent millions de dollars. Et bien, il allait les dépasser. Son sourire redoubla et il fit claquer ses bretelles sur son
Weitere Kostenlose Bücher