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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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sa gorge était comme envahie d’un plâtre chaud, ses muscles lui pesaient comme du plomb. Elle ne comprenait pas pourquoi elle souffrait autant. Elle voulut cracher mais ne parvint qu’à expulser un filet de bave. La jeune femme s’était accroupie à côté d’elle et lui caressait la tête.
    — Mamie, tu vas nous faire gagner du temps. Je veux le dessin que le gentil monsieur français t’a ramené et ensuite quelques précisions. Tu réponds vite et je te laisse la vie sauve, tu me fais perdre mon temps et ce que tu viens de subir ne sera qu’un petit début d’une série de gâteries…
    Malgré la douleur, Hannah sentit la colère monter en elle. Son bourreau mentait, comme les policiers qui avaient emmené sa famille il y a très longtemps. Elle l’achèverait sans doute, mais n’aurait pas la satisfaction de la voir humiliée. Sa nuque était déjà rigide, son corps ne lui obéissait plus, elle savait qu’elle ne survivrait pas à une telle épreuve. Son esprit basculait peu à peu, le décor familier de son appartement dansait devant elle. Hannah sut que son dernier jour était arrivé. À cause du dessin. Ce même dessin qui avait abrégé la vie de ses proches plus de soixante ans plus tôt. Dans un ultime sursaut, elle se redressa et fixa la jeune femme de tout son mépris.
    — Je vous plains, ma pauvre fille, balbutia-t-elle. Vous avez l’air stupide.
    La tueuse la regarda, interloquée. Sa tête tourna légèrement autour de son cou, comme si elle assouplissait sa nuque. Une vague de fureur indicible l’envahit. Ses mains agrippèrent Hannah par le col de sa robe de chambre.
    — Tu te fous de moi, vieille truie ? De toute façon, je trouverai le dessin sans toi. Tu n’as pas eu le temps de le cacher !
    Hannah tenta de réagir, mais son corps n’obéit plus. L’os de son bras droit craqua. Elle sentit la douleur, comme un souvenir. Elle était loin déjà. Quelque part en Arcadie. Dans un album photo où souriaient des fées en crinoline et des princes en souliers vernis. Elle murmura comme en extase :
    — Rennes-le-Château…
    Kyria leva les yeux vers le plafond et brandit son index droit sous la lumière. L’ongle pointu laqué de rouge carmin scintilla un instant et s’engouffra dans l’œil d’Hannah.

36
     
    Rouen
    30 mai 1430
     
    Seul dans la loge, Aymon attendait. Une heure auparavant, on l’avait fait descendre de la cathédrale, on lui avait passé de nouveaux vêtements et recommandé d’attendre. Désormais, il ne ressemblait plus à un maçon, mais à un pèlerin. Équipé de solides chausses, d’un pantalon élimé et d’une tunique grise, un chapeau décoloré par la pluie sur le front, il tenait dans sa main une longue canne recourbée d’où pendait une coquille Saint-Jacques.
    — Tu t’appelles Jean le Servien, lui annonça Geoffroy en entrant, tu viens de Compostelle et tu rentres chez toi en Artois.
    — En passant par Rouen ?
    — Tu as longé la côte, car tu voulais aller porter tes dévotions au Mont-Saint-Michel. Voilà pourquoi tu es de passage dans notre bonne ville.
    La mine indécise, Aymon contempla de nouveau ses habits d’emprunt.
    — Et je suis censé faire quoi, habillé en pèlerin ?
    Geoffroy le regarda avec malice.
    — Mais ce que fait tout bon pèlerin : demander l’hospitalité.
    — Et où ?
    — Au Castel Vieux.
     
    — Détachez-la.
    Le cachot sentait la fiente et la paille pourrie. Un des soldats s’exécuta et s’approcha de la prisonnière. Elle était debout, les pieds nus entravés par une chaîne. À sa vue, l’évêque Cauchon laissa échapper un geste de dégoût. Ses cheveux courts coupés au couteau étaient noirs de crasse. Ses vêtements grouillaient de vermine. Seuls ses yeux semblaient encore refléter un peu de pureté. La chaîne tomba au sol, dans un bruit mat, amorti par la paille souillée d’urine. Pour autant, Jeanne ne put bouger. Autour de son cou, un collier de fer relié par de lourds maillons à un piton scellé dans le mur la maintenait encore captive. Comme un animal.
    — Détachez-la totalement, répéta Cauchon, qu’on en finisse.
     
    Le regard incrédule, Aymon fixait Geoffroy qui vérifiait son costume de pèlerin.
    — Et je fais quoi au Castel Vieux ?
    — Tu vas prendre tes quartiers à l’hospice. Tu as beaucoup marché ces jours derniers et tu as besoin de repos. On t’offrira une paillasse au dortoir et, si tu as de la chance, une écuelle de

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