Au bord de la rivière T4 - Constant
ombilical du nouveau-né.
La veuve de Baptiste Beauchemin prit ensuite l’enfant par les pieds et lui frappa légèrement le derrière pour l’inciter à pleurer et l’aider ainsi à dégager ses voies respiratoires. Le cri poussé par le bébé tira sa mère de sa semi-somnolence.
— Est-ce un garçon ou une fille, m’man ? demanda-t-elle d’une voix affaiblie.
— Un beau garçon, répondit Marie en tendant le bébé à Catherine venue le chercher pour le laver dans la pièce voisine.
Marie suivit sa jeune bru dans la cuisine et revint dans la chambre un instant plus tard avec tout ce qui était nécessaire pour faire la toilette de sa fille aînée.
— À cette heure, t’as fait ton devoir, déclara-t-elle à Camille assoupie. Repose-toi. On s’occupe de tout.
— Et la viande ? s’inquiéta la jeune mère.
— On a presque fini. Dors, lui ordonna-t-elle. Catherine va t’apporter ton petit pour que tu puisses le voir, une fois bien nettoyé. Il a tous ses membres et il va être beau comme tous les Beauchemin.
Peu après, le bébé fut déposé dans les bras de sa mère, puis installé dans le petit berceau qui avait accueilli chacun des enfants Connolly à leur naissance. Avant le retour de Liam en compagnie du docteur Samson, Ann, Patrick et Xavier avaient eu le temps de venir admirer l’enfant.
Dès son arrivée, le médecin de Saint-Zéphirin s’enferma quelques minutes dans la chambre pour examiner la nouvelle mère et l’enfant.
— Tout est parfait, déclara-t-il en quittant la pièce et en endossant son veston. Tout ce qu’il faut à la mère, c’est un peu de repos.
— Est-ce que je peux aller voir ma femme et le petit ? demanda Liam à bout de patience.
— Vas-y, fit le médecin. Je reviendrai voir ta femme la semaine prochaine.
Liam laissa Marie et Xavier raccompagner le docteur Samson jusqu’à son boghei et pénétra enfin dans la chambre où il retrouva Camille tenant leur bébé dans ses bras. Elle le lui montra.
— Puis, qu’est-ce que t’en penses ?
— Il est ben beau, répondit son mari après avoir longuement examiné l’enfant.
— Comment on va l’appeler ? demanda-t-elle.
— Qu’est-ce que tu dirais si on l’appelait Paddy, comme mon oncle ? Je pense que ça lui ferait ben plaisir, ajouta-t-il.
— Pourquoi lui faire plaisir ? Quand est-ce qu’il fait quelque chose pour nous ou pour les enfants ?
Liam dut reconnaître que sa femme n’avait pas tort.
— Comment s’appelait ton père ?
— Damian.
— Pourquoi on n’appellerait pas notre petit Damian, en l’honneur de ton père irlandais ?
— T’as raison, reconnut Liam après un court silence. Et qui on va choisir pour être dans les honneurs ?
— Qu’est-ce que tu dirais de prendre Ann comme marraine et Patrick comme parrain ? Tous les deux vont en prendre soin. Ma mère pourrait être la porteuse, si elle veut.
— C’est correct. J’ai pas dételé, je mange un morceau rapidement et je vais l’enregistrer au presbytère, fit Liam en déposant un baiser sur le front de sa femme.
— Tu serais fin d’arrêter chez Rémi pour lui apprendre la nouvelle, dit-elle au moment où son mari quittait la pièce.
Ce soir-là, Rose et Duncan découvrirent avec stupéfaction qu’ils avaient un nouveau petit frère.
Le lendemain, Ann et Patrick Connolly, pleins de fierté, portèrent sur les fonts baptismaux leur jeune frère qui fut baptisé Damian Connolly. Saint-Bernard-Abbé venait de s’enrichir d’un nouvel habitant, un garçon qui symbolisait bien le nouveau climat alors qu’un petit-enfant Beauchemin portait maintenant un nom anglophone. Les temps avaient bien changé depuis l’établissement de Marie et Baptiste dans la région.
Quelques jours plus tard, Bérengère Mousseau découvrit un beau matin, par une fenêtre du presbytère, deux hommes debout près d’une charrette en train d’examiner la cloche. La ménagère s’empressa d’alerter le curé Désilets, en train de lire son bréviaire dans la pièce qui lui tenait lieu de salon.
Le prêtre quitta précipitamment son fauteuil et sortit sur la galerie pour héler les deux inconnus. Ceux-ci vinrent vers lui sans se presser, montèrent l’escalier et le saluèrent en retirant poliment leur casquette à oreillettes.
— Est-ce que je peux vous demander ce que vous faites là ? fit-il, l’air sévère.
— On travaille à la fonderie Dupuis. Nous sommes venus chercher la
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