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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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contenté de saluer Donat avant de lui demander :
    — Monsieur le curé est venu me voir cet après-midi pour que je lui fasse une paire de souliers. Quand je lui ai dit que je chargeais soixante-quinze cennes, ça a été comme si je lui arrachais une dent.
    — Ça me surprend en torrieu, avait répliqué le cultivateur. D’habitude, l’argent lui pèse pas trop au bout des doigts.
    — Là, il m’a dit que le conseil voudrait jamais payer ce montant-là.
    — Il a eu raison de le dire. Il reçoit un petit salaire pour son entretien et c’est avec ça qu’il doit payer. Le conseil a rien à voir avec ses souliers.
    — Bon, ben, je suis bien content d’apprendre ça. Remarque que je les lui aurais faits pour rien, ses souliers, s’il savait se montrer reconnaissant de temps en temps, conclut Constant.
    — Je te comprends et je trouve que tu ferais aussi ben de te faire payer en les apportant, sinon tu risques de te faire payer avec des prières ou dans la semaine des quatre jeudis.
    — Merci, j’y vais, fit le meunier en le saluant de la main au moment où Bernadette apparaissait sur la galerie.
    Le jeune homme ne tourna même pas la tête vers elle et remit son attelage en route pour sortir de la cour des Beauchemin. Donat remonta sur la galerie et s’assit dans sa chaise berçante.
    — Qu’est-ce qu’il voulait ? lui demanda sa sœur, incapable de cacher son dépit.
    — Rien qui te regarde, répondit-il.
    — Il aurait pu au moins me saluer, l’air bête !
    — Il t’a probablement pas vue. Il a bien autre chose en tête.
    — Comme quoi ? Laurence Comtois, je suppose ?
    — Si c’était ça, ça te regarderait pas, laissa-t-il tomber abruptement.
    — Bedette ! cria Marie du fond de la cuisine. Veux-tu ben me dire ce que t’as à niaiser dehors quand la vaisselle est même pas finie ?
    — J’arrive, m’man, fit-elle d’une voix exaspérée.
    Dès qu’elle posa le pied dans la pièce en prenant soin de laisser claquer la porte moustiquaire derrière elle pour bien montrer son mécontentement, sœur Marie du Rosaire vint mettre son grain de sel.
    — Dis donc, Bernadette, c’est pas le boiteux, ton ancien ami de cœur, qui parlait avec ton frère ?
    — Je le sais pas, ma tante, il est parti au moment où je sortais.
    — Bien oui, j’ai remarqué qu’il t’a même pas saluée, fit l’incorrigible curieuse. T’as dû lui faire quelque chose de pas correct, ma fille, parce qu’il m’a paru un garçon bien élevé chaque fois que je l’ai vu.
    Bernadette allait lancer à sa tante une remarque cinglante quand la voix de Camille se fit entendre à l’extérieur. L’aînée de la famille venait d’arriver à pied en compagnie de son mari et des enfants pour une courte visite. Marie s’empressa d’aller rejoindre les visiteurs sur la galerie, suivie de près par sa belle-sœur, pendant que Bernadette demeurait avec sœur Sainte-Anne qui n’avait pas encore soufflé mot.
    — Tu peux y aller avec les autres, suggéra la douce religieuse. On a fini.
    Bernadette préféra prendre la direction de la cuisine d’hiver, s’arrêta un instant pour échanger quelques paroles avec Eugénie toujours alitée avant de monter à sa chambre. Elle n’avait qu’une envie, celle de se retrouver seule pour analyser ce qu’elle éprouvait à se voir aussi ostensiblement ignorée par son ancien cavalier.
    Elle venait à peine de s’étendre sur son lit après avoir retiré ses chaussures qu’on frappa à sa porte.
    — Je veux pas te déranger, fit Camille en entrant, un peu essoufflée par l’escalier qu’elle avait dû monter. Je voulais juste te dire que j’ai fini par convaincre Liam de renvoyer Ann à l’école après les fêtes.
    — C’est correct, accepta sa jeune sœur en s’assoyant sur son lit.
    — Penses-tu que tu vas pouvoir lui donner des devoirs de temps en temps avant les fêtes pour qu’elle prenne pas trop de retard ?
    — Je vais essayer, lui promit Bernadette sans trop d’enthousiasme.
    — Liam a fini par en faire une question de fierté si sa fille avait son diplôme à la fin de l’année, ajouta Camille.
    — Je vais faire mon possible.
    — T’es pas malade, au moins ?
    — Pourquoi tu me demandes ça ? fit l’institutrice.
    — Couchée à sept heures et quart un beau dimanche, expliqua sa sœur aînée avec un petit sourire.
    — L’école commence demain matin et j’ai eu une grosse semaine, mentit Bernadette

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