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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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enclos. Peu à peu, la campagne sortit de sa léthargie nocturne.
    Chez les Beauchemin, Marie alluma le poêle de la cuisine d’été en se promettant de fermer dorénavant les fenêtres de la pièce chaque soir tant il faisait une fraîcheur désagréable si tôt le matin. Avant de réveiller son monde, elle alla chercher Alexis debout dans son lit qui la réclamait et elle l’installa dans une chaise berçante près du poêle avec un biscuit. Elle allait crier à Ernest et à Bernadette de descendre quand elle se rappela brusquement la présence des deux religieuses et eut un frisson à la pensée d’avoir à supporter sa belle-sœur jusqu’au déjeuner. Elle décida de monter à l’étage, de réveiller sans bruit sa fille et l’homme engagé avant de s’esquiver dans sa chambre pour s’habiller.
    À son retour en bas, elle trouva Donat, Bernadette et Ernest prêts à sortir pour s’occuper du train. Elle se mit immédiatement à la préparation du déjeuner. Quand sa belle-sœur et sa compagne descendirent une demi-heure plus tard, elle proposa à Mathilde d’aller tenir compagnie à Eugénie pendant que sœur Sainte-Anne l’aidait à confectionner une grosse omelette garnie de tranches de lard.
    — Comme tous les ans, à cette période de l’année, c’est à peu près la seule viande qui nous reste avec une couple de morceaux de bœuf pour le bouilli.
    — C’était comme ça aussi chez nous quand j’étais jeune, fit la petite religieuse. On n’en est pas mort personne, ajouta-t-elle avec un sourire.
    Au retour des hommes et de Bernadette, on passa à table. Sœur Sainte-Anne prépara une assiette qu’elle alla porter à Eugénie avant de venir s’asseoir. Donat récita le bénédicité et chacun se servit après s’être découpé une épaisse tranche de pain de ménage.
    — On a une bien grosse journée devant nous autres, déclara Donat. On va commencer à fumer le champ de blé avant qu’il mouille.
    — Nous autres, on va remettre un peu d’ordre dans la maison et après ça, on va rentrer les carottes et les patates dans le caveau, annonça la maîtresse de maison, sachant fort bien que les religieuses avaient compris le sens du « nous autres ».
    — Il y en a une qui va être chanceuse d’échapper à cette corvée-là, laissa tomber Mathilde Beauchemin, la voix un peu aigre.
    — Si vous dites ça pour moi, ma tante, vous saurez que je m’en vais pas me reposer à l’école aujourd’hui. En plus, vous devriez savoir que le meilleur temps pour venir en visite à la campagne, c’est l’hiver. Vous savez aussi bien que moi que c’est le temps où il y a le moins à faire pour les femmes. À part filer et faire des catalognes et des courtepointes, il y a juste l’ordinaire.
    Prise ainsi à partie, la religieuse se retrouva pour une fois sans voix. Bernadette fut la première à quitter la table pour aller changer de vêtements. Elle prit la direction de son école quelques minutes plus tard, armée de son parapluie et de son sac en cuir, premier cadeau offert par Constant Aubé. La rivière qu’elle longeait charriait lentement des eaux uniformément grises, de la couleur du ciel. Au passage devant la maison du meunier, elle ne put que se rendre compte que les grandes ailes du moulin tournaient déjà, signe que les grosses meules écrasaient les grains d’une récolte.
    À son arrivée à l’école, elle n’eut d’autre choix que de saluer de la main Angélique Dionne qui venait de monter dans la voiture de son père pour aller donner sa première journée de classe dans la nouvelle école du rang Saint-Paul. Elle s’empressa d’entrer dans la petite maison blanche et d’ouvrir toutes grandes les fenêtres pour aérer le local. Puis elle se mit à remplir son tableau de directives jusqu’à ce qu’elle entende les cris excités de ses premiers élèves entrant dans la cour. Elle alla les surveiller.
    À huit heures trente, elle sonna la cloche et invita ses dix-huit élèves à entrer dans la classe. Comme chaque année, en ce premier matin, tous étaient présents, mais elle savait qu’ils ne seraient probablement que douze ou treize durant le reste du mois parce que les parents allaient garder les plus âgés à la maison tant qu’il y aurait du travail pressant à exécuter. D’ordinaire, il s’agissait de garçons en cinquième ou sixième année.
    Elle passa l’avant-midi à organiser sa classe, associant des élèves plus âgés avec les plus

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