Au Coeur Du Troisième Reich
firent effectivement de moi pour un temps l’homme le plus important après Hitler.
----
46 . « Pomme impériale » est la traduction littérale du mot Reichsapfel , qui en allemand désigne le globe impérial, symbole de souveraineté et attribut des empereurs du Saint Empire. (N.D.T.)
Deuxième partie
14.
Nouvelles fonctions
Sepp Dietrich, l’un des premiers fidèles de Hitler, commandait à cette époque un corps blindé SS qui était aux prises avec les Russes non loin de Rostov, dans le sud de l’Ukraine. Le 30 janvier 1942, il partait avec un avion de l’escadrille du Führer pour rejoindre Dniepropetrovsk et je le priai de m’emmener. Mon état-major se trouvait déjà là-bas, pour préparer la réfection des installations ferroviaires du sud de la Russie 1 . Évidemment la simple idée de faire mettre un avion à ma disposition ne m’était pas venue à l’esprit, ce qui montre bien que je n’estimais pas jouer un très grand rôle dans le déroulement de la guerre.
Très à l’étroit dans cet avion, un bombardier Heinkel aménagé pour le transport des passagers, serrés les uns contre les autres, nous survolions les plaines désolées et enneigées du sud de la Russie. Dans les grandes exploitations, nous distinguions des granges et des étables brûlées. Pour nous orienter, nous suivions la ligne de chemin de fer. On voyait rarement un train, les gares étaient incendiées, les ateliers détruits, les routes rares et désertes. Sur les étendues que nous traversions régnait un silence de mort, un silence lugubre que nous percevions jusque dans l’appareil. Des chutes de neige rompaient la monotonie ou plutôt l’accentuaient. Ce voyage fut pour moi l’occasion de prendre conscience du danger que couraient nos troupes, qui étaient presque coupées de leurs communications avec le pays. Le crépuscule tombait lorsque notre appareil se posa à Dniepropetrovsk, une grande ville industrielle.
Mon état-major se composait de plusieurs techniciens formant une équipe que l’on appelait le « Baustab Speer » conformément à la tendance, coutumière à l’époque, d’assimiler les personnes aux fonctions qu’elles assuraient. Ils avaient trouvé un cantonnement de fortune dans un wagon-lit ; de temps à autre, une locomotive envoyait un peu de vapeur dans les canalisations du chauffage pour l’empêcher de geler. Un wagon-restaurant faisait office de bureau et de pièce de séjour, les conditions de travail y étaient déplorables. La réfection des voies ferrées se révélait plus difficile que nous ne l’avions pensé. Les Russes avaient détruit toutes les stations secondaires ; il n’existait plus nulle part d’ateliers de réparation ni de réservoirs d’eau protégés contre le gel ; les bâtiments des gares étaient par terre, les postes d’aiguillage ne fonctionnaient plus. Les questions les plus élémentaires, que chez nous un employé aurait réglées par un coup de téléphone, constituaient ici un véritable problème, même s’il s’agissait simplement de se procurer des clous ou du bois de construction.
Il neigeait sans discontinuer. Sur les routes et les voies ferrées, la circulation était totalement interrompue, la piste d’envol de l’aérodrome disparaissait sous la neige. Nous étions bloqués là, et je dus remettre mon retour à plus tard. Nous passions notre temps à voir nos ouvriers. Des soirées étaient organisées entre camarades, on chantait des chansons, Sepp Dietrich prononçait des discours, on lui faisait fête. J’assistais moi aussi à ces réunions mais, médiocrement doué pour l’éloquence, je ne me hasardais pas à adresser à mes collaborateurs la moindre allocution. Parmi les chants qu’exécutaient les militaires, il en était de fort tristes qui exprimaient la nostalgie du pays natal et évoquaient la désolation des immensités russes. Ils étaient l’indice de la tension morale qui régnait dans ces positions avancées. Et pourtant, fait assez révélateur, ces chants étaient ceux que les troupes préféraient.
Entre-temps la situation était devenue préoccupante. Un petit détachement de chars russes avait rompu nos lignes et s’approchait de Dniepropetrovsk. Des conférences eurent lieu pour décider quelle défense nous pourrions leur opposer. Nous n’avions pratiquement rien : quelques fusils et un canon abandonné sans munitions. Les Russes s’approchèrent à une vingtaine de kilomètres et se
Weitere Kostenlose Bücher