Au Coeur Du Troisième Reich
du 10 au 14 septembre 1944.
6. D’après la U.S. Air University Review, vol. XVII, n° 5 (juillet-août 1966), un quadrimoteur B 17 (« forteresse volante ») coûtait, en 1944, 204 370 dollars (858 000 RM) ; un V 2 en revanche coûtait, selon les renseignements très précis fournis par David Irving, 144 000 RM, donc le 1/6 d’un bombardier. Six fusées transportaient au total 4 500 kg d’explosifs (750 kg par fusée). Elles ne servaient qu’une fois et étaient détruites à la première utilisation. Tandis qu’un B 17 pouvait être utilisé sans arrêt, et son rayon d’action de 1 600 à 3 200 kilomètres lui permettait de transporter deux tonnes d’explosifs sur un objectif très éloigné.
Sur la seule ville de Berlin furent lâchées au total 49 400 tonnes d’explosifs et de bombes qui endommagèrent gravement ou détruisirent totalement 20,9 % des logements (Webster, vol. IV). Pour envoyer sur Londres une quantité d’explosifs équivalente, il nous aurait fallu utiliser 66 000 grandes fusées, c’est-à-dire la production totale de six années. Je fus donc obligé de reconnaître, le 29 août 1944, au cours d’une réunion de propagande dirigée par Goebbels : « La question se pose de savoir si le V 2 … peut, en produisant un effet psychologique quel qu’il soit, décider de l’issue de la guerre. Sur le plan purement technique il ne le peut pas… Il ne m’appartient pas de me prononcer sur l’effet psychologique qu’il peut exercer. Mais ce que je peux dire, c’est qu’il faudra toujours un certain temps pour que l’effet de notre nouvelle arme atteigne sa véritable ampleur. »
7. A cette solution conforme au bon sens s’opposaient non seulement la volonté de Hitler, mais aussi le fait que Peenemünde travaillait pour l’Armée alors que la défense contre les attaques aériennes était l’affaire de la Luftwaffe. Les intérêts de l’Armée et ceux de la Luftwaffe étaient si différents, l’ambition si forte dans les trois armes, que l’armée n’aurait aucunement accepté de céder à la Luftwaffe concurrente son potentiel de recherches établi à Peenemünde. La séparation des trois armes ne permettait même pas d’unifier les recherches et la mise au point des projets (cf. n. 33 du chapitre 16). Si on avait exploité à fond et en temps voulu le potentiel de recherches et d’études de Peenemünde, « Cataracte » aurait pu passer plus tôt au stade de la fabrication. Le 1 er janvier 1945, 2 210 chercheurs et ingénieurs étaient occupés à Peenemünde à mettre au point les fusées à longue portée A 4 et A 9 , mais 220 seulement travaillaient sur « Cataracte » et 135 sur « Typhon », une autre fusée antiaérienne, ce qui montre bien quels programmes étaient prioritaires.
Le professeur C. Krauch, responsable de l’industrie chimique, m’avait envoyé, le 29 juin 1943, deux mois à peine avant notre décision malheureuse, un mémoire circonstancié dans lequel il me confiait le point de vue suivant : « Les partisans d’une mise au point accélérée des armes aériennes offensives, c’est-à-dire des armes de représailles et de terreur, partent du principe que la meilleure défense est l’attaque, et que si nous ripostons aux raids anglais en envoyant nos fusées sur l’Angleterre, nous contraindrons les Anglais à ralentir leurs raids aériens sur le Reich. Même en supposant – ce qui jusqu’à présent n’est pas prouvé – que la fusée à longue portée puisse être employée de façon illimitée et qu’elle puisse réellement causer des destructions très importantes, le raisonnement que je viens de rappeler apparaît comme erroné si l’on en croit nos expériences antérieures. Si nous attaquons l’Angleterre avec nos fusées, les hommes qui, dans ce pays, se sont jusqu’à présent opposés aux raids de terreur visant la population allemande exigeront alors de leur gouvernement une recrudescence impitoyable de ces raids sur nos centres de population, auxquels nous sommes toujours exposés presque sans défense… Ces considérations militent en faveur d’un accroissement considérable de la production d’armes aériennes défensives, et en particulier de la fusée C 2 dite "Cataracte". Il faudra employer ces armes brusquement en très grand nombre… En d’autres termes, chaque technicien, chaque ouvrier qui travaillera à l’accélération extrême de ce programme, chaque heure de
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