Au Coeur Du Troisième Reich
l’aspect primitif de l’ancienne maison de week-end était toujours là, mais porté à la dimension supérieure.
Tous les devis furent dépassés et Hitler connut quelques difficultés financières. « Les revenus tirés de la vente de mon livre, expliquait-il, sont complètement mangés, bien que j’aie obtenu d’Amann une avance de quelques centaines de mille. Pourtant, ça ne suffit pas, Bormann vient de me le dire aujourd’hui. La maison d’édition m’a proposé de l’argent pour la publication de mon deuxième livre, celui de 1928 2 . Mais je suis trop heureux que ce livre n’ait pas été publié. Je n’ose penser aux difficultés politiques qui en résulteraient. Certes, je serais d’un seul coup tiré d’affaire. Amann m’a promis un million à valoir sur mes droits d’auteur, qui, eux, me rapporteraient plusieurs millions. Plus tard peut-être, quand ma situation aura évolué. Maintenant, c’est impossible. »
Pour le moment, il était là, prisonnier volontaire, le regard dirigé sur l’Untersberg où dormait, selon la légende, l’empereur Charles qui reviendrait un jour rétablir l’Empire dans sa magnificence passée. Naturellement, Hitler rapportait cette prédiction à sa personne. « Regardez l’Untersberg, disait-il, là-bas, de l’autre côté. Ce n’est pas un hasard si j’ai ma résidence en face de cette montagne. »
Son activité de constructeur à l’Obersalzberg n’était pas le seul lien qui unissait Bormann à Hitler. Bormann avait su en même temps attirer à lui la gestion du budget personnel de Hitler. Même la maison militaire de Hitler était condamnée à s’adresser à Bormann pour tout ce qui touchait à la gestion financière. La maîtresse de Hitler dépendait, elle aussi, elle me l’avoua franchement un jour, de Bormann, qui veillait, comme Hitler l’en avait chargé, à satisfaire ses besoins, en soi modestes.
Hitler faisait l’éloge de l’habileté financière de Bormann. Une fois, il nous raconta comment Bormann, en cette année de détresse que fut l’année 1932, avait bien mérité du parti en créant une assurance obligatoire pour les accidents du travail survenus dans l’exercice de fonctions du parti. Les recettes de cette caisse d’entraide avaient été alors beaucoup plus importantes que les dépenses et le solde positif alla au parti, qui put l’utiliser à d’autres fins. Pour délivrer Hitler de ses soucis d’argent, Bormann trouva, après 1933, deux autres expédients. De concert avec le photographe privé de Hitler et l’ami de celui-ci, le ministre des Postes, Ohnesorge, ils se dirent que Hitler possédait un droit sur la reproduction de son portrait sur les timbres. La part était certes minime, mais, comme le portrait de Hitler était sur toutes les valeurs, des millions se déversèrent bientôt dans la caisse privée gérée par Bormann.
Celui-ci trouva une autre source de revenus en fondant la « donation Adolf-Hitler de l’Industrie allemande ». Les industriels, qui profitaient de l’essor économique, furent conviés sans autre forme de procès à témoigner au Führer leur reconnaissance par des versements volontaires. Comme d’autres hauts fonctionnaires du parti avaient eu également à peu près la même idée, Bormann fit prendre un décret lui assurant le monopole de telles quêtes. Mais il fut assez avisé pour en reverser « au nom du Führer » une partie aux autres dirigeants du parti. Presque tous les potentats du parti reçurent des donations prélevées sur ces fonds. Leur influence sur le niveau de vie des différents Reichsleiter et Gauleiter semblait n’être qu’insignifiante, mais en réalité, elle conféra à Bormann plus de pouvoir que bien des positions à l’intérieur de la hiérarchie.
Avec une obstination qui le caractérise bien, Bormann mit en application à partir de 1934 une autre idée toute simple : rester toujours le plus près possible de la source de toutes grâces et de toutes faveurs. Ainsi il accompagnait Hitler au Berghof, restait près de lui en voyage, ne le quittait jamais à la Chancellerie, dût-il veiller jusqu’à une heure avancée de la nuit. De cette manière, il devint le secrétaire zélé, l’homme de confiance finalement indispensable. Il se montrait complaisant envers tout le monde, et presque tout le monde fit appel à ses services, d’autant plus qu’il semblait jouer ce rôle d’intermédiaire de façon parfaitement
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