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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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désintéressée. Son supérieur hiérarchique direct, Rudolf Hess, semblait aussi apprécier la commodité que constituait la présence de son collaborateur auprès de Hitler.
    Certes, les potentats hitlériens, tels les diadoques avant la mort d’Alexandre, s’observaient, dès cette époque, d’un œil jaloux. Ainsi, il y eut très tôt des luttes d’influence entre Goebbels, Göring, Rosenberg, Ley, Himmler, Ribbentrop et Hess ; seul Röhm était déjà hors course ; quant à Hess, il devait bientôt perdre toute influence. Mais aucun des adversaires n’avait reconnu le danger qui les menaçait tous en la personne de l’infatigable Bormann. Celui-ci avait réussi à se faire passer pour un personnage insignifiant, bâtissant ainsi son bastion sans se faire remarquer. Or, même parmi ces potentats sans foi ni loi, il tranchait par sa brutalité et la rudesse de ses sentiments. Il ne possédait pas ce minimum de culture qui lui aurait imposé un frein. Dans tous les cas, il réussissait à faire exécuter les ordres de Hitler ou les indications de Hitler qu’il interprétait comme des ordres. De nature subalterne, il traitait ses subordonnés comme s’il avait eu affaire à des veaux ; c’était un vrai paysan. J’évitais Bormann ; depuis le début, nous ne pouvions pas nous sentir. Nous entretenions des relations correctes comme l’exigeait l’étroite cohabitation sur l’Obersalzberg. Mais je n’ai jamais travaillé pour lui, sauf lorsque je fis les plans de mon atelier.
    Le séjour « à la montagne » apportait à Hitler, comme il le soulignait souvent, le calme et la certitude intérieurs nécessaires à ses décisions surprenantes. C’est là aussi qu’il préparait ses discours importants et la façon qu’il avait de les écrire vaut la peine d’être rapportée. Quelques semaines avant le Congrès de Nuremberg, il se retirait à l’Obersalzaberg pour élaborer les longs discours où il définirait les principes de sa politique. Le terme approchait ; ses aides de camp le pressaient de commencer à dicter, le coupant de tout, lui soustrayant même ses plans et ses projets, éloignant tout visiteur, pour le forcer à travailler. Mais Hitler repoussait toujours le moment de se mettre au travail, de semaine en semaine d’abord, de jour en jour ensuite. Il ne se consacrait à cette tâche que sous la pression du temps et encore en dernière extrémité. La plupart du temps, il était alors trop tard pour terminer tous les discours, et Hitler devait, pendant le Congrès, passer la plupart de ses nuits à rattraper le temps gaspillé à l’Obersalzberg.
    J’avais le sentiment qu’il lui fallait cette contrainte pour pouvoir travailler et qu’à la manière de la bohème artiste, il méprisait la discipline dans le travail, ne voulant ni ne pouvant se forcer à un labeur régulier. Il laissait, dans les semaines d’apparente inactivité, mûrir le contenu de ses discours ou de ses pensées, jusqu’au moment où tout ce qu’il avait retenu et emmagasiné se déversait comme un torrent sur ses partisans ou sur ses interlocuteurs.
     
    Notre départ de la vallée pour l’Obersalzberg ne fut pas profitable à mon travail. La répétition de ces journées toujours semblables fatiguait ; le cercle d’intimes, toujours le même, ces mêmes personnes qui avaient l’habitude de se rencontrer à Munich, de se réunir à Berlin, ennuyait. La seule différence avec Berlin et Munich venait de la présence des épouses. En plus de celles-ci, il y avait deux ou trois secrétaires et Eva Braun.
    Hitler faisait son apparition dans les pièces du bas à une heure tardive, vers onze heures, étudiait le dossier de presse, écoutait quelques rapports de Bormann et prenait ses premières décisions. Sa véritable journée débutait par un déjeuner interminable. Les invités se rassemblaient dans l’antichambre. Hitler choisissait savoisine de table tandis que Bormann, à partir de 1938 environ, eut le privilège d’être le cavalier attitré d’Eva Braun, qui, à table, était assise à la gauche de Hitler ; ce privilège montrait sans ambiguïté qu’il occupait une position dominante au Berghof. La salle à manger présentait ce mélange de rusticité artistique et d’élégance citadine qu’on rencontre souvent dans les maisons de campagne de riches citadins. Les murs et les plafonds étaient lambrissés de mélèze clair et les sièges recouverts d’un maroquin rouge clair. La

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