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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Indiens qui, douze ans plus tôt, avaient tué quatre Français. Le missionnaire assassiné avait été envoyé en Louisiane par le séminaire de Québec pour évangéliser les Indiens. Certes, ce religieux n'avait jamais fait preuve d'un grand zèle apostolique et ses supérieurs lui avaient souvent reproché son instabilité notoire. Il était connu pour ses mœurs dissolues et on lui attribuait même la paternité d'un petit mulâtre. On pouvait peut-être en déduire qu'il avait péri pour des raisons n'ayant rien à voir avec la propagation de la foi !
    Bienville était néanmoins contraint d'envisager, dès qu'il en aurait les moyens, une expédition pour punir les meurtriers du religieux, mission dont il se serait bien passé au moment où l'on s'efforçait de rester en bons termes avec les tribus de la région 5 .
    Autre plaie chronique de la colonie : les désertions. « Les soldats et matelots envoyés à la mer désertent à la première terre espagnole et pour ramener les bateaux il faut en engager d'autres à des prix exorbitants. » Ceux qui ne vont pas chez les Espagnols vont, dit-on, grossir les rangs des pirates, forbans, corsaires ou flibustiers, qui arraisonnent les navires marchands de toute nationalité. On murmure que mille cinq cents écumeurs des mers maraudent au long des côtes de l'Atlantique et à l'entrée du golfe du Mexique et qu'ils ont leurs quartiers généraux à New Providence et dans les îles Bahamas, d'où aucune marine ne se soucie de les déloger.
    En ce mois de février 1707, il reste à Bienville quarante-cinq soldats sur la centaine de militaires, deux compagnies, que le roi entretient dans la colonie. Quant aux « Sauvages alliés qui se comportent bien aux petites guerres qu'ils se font les uns sur les autres », on ne peut qu'à demi compter sur eux en cas d'engagement sérieux. Ils menacent parfois, s'ils ne reçoivent pas ce qui leur a été promis, de piller les maigres biens français. Et le commandant manque de façon tragique de ces petits cadeaux qui entretiennent l'amitié !
    Il semble qu'en plus de toutes ces difficultés Bienville ait à faire face aux problèmes que pose l'activité des religieux. Certains sont des incapables qu'on a envoyés en Louisiane parce qu'on ne savait qu'en faire en France, comme « ce missionnaire à la vue tout à fait basse et à la prononciation fort mauvaise dont les Sauvages se moquent ».
    Serviteur dévoué du roi et rusé compère, Bienville ne manque pas d'ajouter que, las des atermoiements de Paris, consterné par l'incapacité où il se trouve de faire de l'établissement de Mobile une tête de pont coloniale digne de la France, déçu par le comportement licencieux des uns et les jérémiades des autres, critiqué, calomnié, incompris, malade, il a envie de renoncer à la carrière coloniale et réclame de l'avancement !
    « À l'âge de vingt-neuf ans je me trouve attaqué d'une goutte sciatique et j'ai la poitrine tout à fait mauvaise. On m'assure que je ne me rétablirai jamais dans ce pays-ci et que l'air de la France me remettrait dans ma première santé. J'espère, Monseigneur, que vous voudrez bien m'accorder mon congé et de l'emploi dans la marine où j'ai servi neuf ans, garde de la marine. Servant en qualité d'officier avec M. d'Iberville dans les campagnes qu'il a fait [sic] au nord et m'étant trouvé dans tous les combats qu'il y a rendu [sic] . Il me serait bien fâcheux, Monseigneur, si pour être resté ici pour l'établissement de cette colonie je me voyais privé de mon avancement. J'espère que vous voudrez bien faire attention à mes services passés et à ceux que je rends actuellement. Je n'ai point de douceur à attendre que de Votre Grandeur à laquelle je demande une lieutenance de vaisseau pour M. d'Iberville, sous lequel j'ai appris mon métier. »
    À la lecture de ce rapport et bien avant d'avoir choisi de faire acte d'autorité, Pontchartrain avait accordé l'autorisation demandée, qui ne prendrait cependant effet qu'au moment où Bienville aurait un substitut. Or ce remplaçant, le sieur de Muys, ne devait jamais prendre possession de son poste. Il mourut des fièvres lors de l'escale de la Renommée à La Havane et l'ordonnateur Martin Diron d'Artaguiette débarqua à Mobile le 12 février 1708. Ce dernier était accompagné de son jeune frère, Bernard Diron d'Artaguiette, âgé de treize ans, qu'il fit immédiatement incorporer dans la troupe, et de trois artisans

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