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Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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rapproche de mes amis. Je peux ainsi passer ce beau dimanche après-midi
     en votre compagnie.
    — C’est un plaisir de vous recevoir chez nous, lui certifia Isabelle.
    — En plus, Georges a été assez aimable pour faire un détour et m’offrir une
     place dans leur voiture.
    — Bateau, Jonquière pis Arvida, c’est collé, dit Georges d’un ton bourru.
    Isabelle regarda la tablée. Ils étaient bien moins nombreux qu’elle l’avait
     espéré. Pour commencer, sur les huit enfants Rousseau, il manquait les quatre
     plus vieux. Bon, Pierre en Gaspésie et Laura missionnaire en Afrique, leur
     présence n’avait même pas été envisageable. Mais Isabelle avait tellement été
     déçue qu’Yvette refuse de descendre de Montréal. Tout ce qu’elle avait pu
     obtenir, c’est la promesse d’un appel téléphonique au cours de l’après-midi. Ah,
     Yvette... Qu’il était loin, le temps où la jeune fille résidait avec elle à la
     pension de madame Marie-Ange ! Isabelle la reverrait toujours dans sa belle
     robe, chaussée de ses fameux souliers rouges, ses premières chaussures à talon
     haut. Yvette avait été témoin de la naissance de ses sentiments pourHenry, cet ami de la famille, plus âgé qu’elle, mais qui lui
     avait tout de suite plu. Ensuite, Yvette était partie à Paris plusieurs années.
     Depuis son retour, Yvette était devenue une étrangère. Isabelle n’avait jamais
     osé en discuter avec Julianna. Malgré une certaine amitié qui, au cours des sept
     derniers étés passés au chalet, s’était forgée entre les deux femmes, Isabelle
     s’était vite rendu compte qu’il y avait des sujets tabous. La froideur d’Yvette
     en était un, ainsi que... le silence de Mathieu. Mathieu, qui avait quitté
     Normandin pour Montréal et qui ne donnait presque jamais de ses nouvelles.
     Isabelle n’avait aucune idée de ce qui pouvait pousser le filleul de son mari à
     s’isoler. Henry n’en était pas étonné. Mathieu avait toujours été tourmenté. En
     revanche, Henry avait eu beaucoup de difficulté à accepter que Jean-Marie, le
     fils aîné de Georges, ait décliné l’invitation. Qu’un père coupe les ponts avec
     son seul fils survivant, cela lui était inconcevable. Isabelle l’avait calmé. Il
     ne fallait pas s’attendre à un miracle. Les deux hommes avaient rompu les liens
     depuis si longtemps… C’était déjà beau que Georges soit présent aujourd’hui.
     Même Hélène ne se faisait plus d’illusions sur sa relation avec son père.
     Georges lui adressait la parole du bout des lèvres. Hélène en était attristée.
     Isabelle ne pouvait rien y changer. Décidément, elle aurait troqué ce dimanche
     de fête pour un après-midi tranquille avec ses enfants. Tout cela pour plaire à
     Henry, qui avait adopté ces familles comme les siennes. Au moins, les quatre
     derniers fils de François-Xavier et de Julianna étaient présents. Jean-Baptiste,
     qui s’était marié l’été précédent, était accompagné de sa jeune femme Gertrude,
     qui n’avait d’intérêt que pour son ventre rebondi, qu’elle entourait de ses
     mains jointes. Isabelle se doutait bien que l’attitude effacée de la future mère
     était due en grande partie au désirde se tenir à l’écart de sa
     belle-mère. Julianna ne rendait vraiment pas la vie facile à la pauvre Gertrude.
     En tout cas, Jean-Baptiste ne semblait jamais affecté par la mauvaise relation
     entre les deux femmes. Même aujourd’hui, il ne se formalisait pas du manque
     d’entrain de ses parents. Ah, ce Jean-Baptiste, toujours en train de farcer, bon
     vivant et vaillant en plus. Habile de ses mains, il pouvait vous réparer et vous
     construire n’importe quoi. Grâce à son aide, Isabelle avait réussi à garder le
     chalet fonctionnel. Avec Henry, qui ne faisait pas grand-chose de ses dix
     doigts, le toit leur aurait croulé sur la tête à chaque belle saison ! La
     plupart du temps, Jean-Baptiste refusait d’être payé. Sa bonhomie sauvait un peu
     du désastre ce dîner de fête, se dit Isabelle en le regardant faire honneur au
     repas tout en discutant joyeusement avec ses deux jeunes frères, Zoel et
     Adélard. Quant à Léo, le fils sourd-muet, il suivait Hélène comme son ombre. En
     ce moment, il était certainement dans la cuisine avec sa cousine, qui terminait
     de préparer la salade. En bonne hôtesse, Isabelle vérifia que tout le monde ne
     manquait de rien. En réalisant

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