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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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bord herbetix et ensoleillé de la carrière, et elle bavarda gaiement
pendant que je mangeais ma ration de corégones du lac, aux arêtes minuscules,
enroulés et cuits dans une tortilla. Elle les avait enveloppés dans un linge et
ils étaient encore tout chauds. Je remarquai que ma sœur, elle aussi, semblait
avoir chaud, malgré la fraîcheur de la journée. Elle ne cessait d’éventer le
haut de son corsage à encolure carrée, pour le décoller de sa poitrine.
    Les beignets de poisson avaient un petit goût aigre. Je pensai que
Tzitzi les avait préparés à la place de ma mère et qu’elle parlait avec tant de
volubilité pour m’empêcher de plaisanter sur son manque évident de dons
culinaires. Toutefois, ils n’avaient pas un goût désagréable. J’avais faim et
ils me rassasièrent complètement. Tzitzi me conseilla de m’allonger pour que je
puisse digérer confortablement ; elle monterait la garde contre les petits
ours hérissés.
    Je m’étendis sur le dos en regardant les nuages qu’autrefois je voyais
se détacher si distinctement dans le ciel ; ils n’étaient plus que d’informes
masses blanches sur d’informes masses bleues. Je m’y étais habitué maintenant.
Soudain, quelque chose de plus déroutant commença à apparaître. Le blanc et le
bleu se mirent à tournoyer, lentement au début, puis de plus en plus
rapidement, comme si un dieu, là-haut, s’amusait à mélanger le ciel avec un
batteur à chocolat. Surpris, je voulus m’asseoir, mais ma tête tournait tant
que je retombai sur l’herbe.
    J’éprouvai une sensation étrange et je dus émettre des sons bizarres,
car Tzitzi se pencha sur moi et me regarda. Malgré mon trouble, j’eus
l’impression qu’elle attendait que quelque chose m’arrive. Elle mordit de ses
dents blanches le bout de sa langue et ses yeux étroits prirent une expression
furtive. Puis, ses lèvres sourirent malicieusement, elle passa dessus la pointe
de sa langue et son regard s’illumina d’un éclat triomphateur. Elle examina mes
yeux et sa voix se mit à résonner étrangement comme un lointain écho.
    « Comme tes pupilles se sont agrandies, petit frère. » Elle
continuait à sourire et je n’éprouvais aucune inquiétude. « Il n’y a
presque plus de brun dans ton iris, il est presque tout noir. Qu’est-ce que tu
vois avec ces yeux-là ?
    — Je te vois, ma sœur, dis-je, d’une voix épaisse. Mais tu n’es
pas comme d’habitude. Tu es…
    — Quoi ? me pressa-t-elle.
    — Tu es si belle », lui dis-je. Je ne pus pas m’en empêcher.
    Comme tous les garçons de mon âge, je me devais de dédaigner et de
mépriser les filles – si même je devais les remarquer – et une sœur était
encore plus à dénigrer que les autres. Pourtant, je me serais aperçu que
Tzitzitlini était belle, même si les adultes ne l’avaient pas si souvent fait
remarquer en ma présence, femmes et hommes pareillement, qui avaient le souffle
coupé quand ils la voyaient pour la première fois. Aucun sculpteur n’aurait pu
rendre la grâce féline de son jeune corps, car la pierre et l’argile ne bougent
pas, tandis qu’elle donnait l’impression d’un flot qui coule, même quand elle
était parfaitement immobile. Pas un peintre n’aurait su obtenir une teinte
comparable au brun doré de sa peau ou à la couleur de ses yeux de biche
parsemés d’or…
    Mais ce jour-là, elle avait une magie supplémentaire et c’est pourquoi
je ne pouvais pas refuser de reconnaître sa beauté, même si je n’en avais pas
eu l’intention. Cette magie l’entourait comme l’auréole de perles d’eau dans le
ciel, quand le soleil réapparaît après la pluie.
    « Je vois des couleurs », dis-je, de cette voix bizarre et
épaisse. « Des bandes de couleurs, comme une brume de perles d’eau. Tout
autour de toi, ma sœur. Un éclat rouge… et puis, un éclat pourpre… et… et…
    — Ça te fait plaisir de me regarder ? me demanda-t-elle.
    — Oui, ça me fait plaisir.
    — Alors, tais-toi, frère, et laisse-moi te faire plaisir. »
    Je suffoquais. Sa main s’était glissée sous mon manteau. Rappelez-vous
que je portais le pagne depuis moins d’un an. Le geste de ma sœur aurait dû me
paraître une outrageuse violation de mon intimité, mais je ne la ressentis pas
comme telle et de plus j’étais trop faible pour faire un geste et la repousser.
Je n’éprouvais pas grand-chose, sauf le grossissement d’une partie de mon corps
qui,

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