Azteca
de l’histoire de notre pays et des autres peuples, un enseignement
un peu plus large sur la nature de nos dieux et les nombreuses fêtes qui leur
étaient dédiées et l’on apprenait les arts rituels du chant, de la danse et des
instruments de musique qui servaient à célébrer toutes ces cérémonies
religieuses.
Ce n’est que dans ces telpochcalli, ou écoles élémentaires, que nous,
gens du peuple, nous trouvions d’égal à égal avec les enfants des nobles et
avec certains éléments parmi les plus brillants et les plus méritants de la
classe des esclaves. Cette éducation primaire, qui mettait l’accent sur la
politesse, la piété, la grâce et l’adresse, était considérée comme bien
suffisante pour les jeunes gens de la classe moyenne et comme un grand honneur
pour la poignée d’enfants d’esclaves qui en était jugée digne et capable.
Cependant, aucun fils d’esclave et très peu d’entre nous, garçons de la
classe moyenne, – et surtout, jamais une fille, même de la noblesse – ne
pouvait espérer bénéficier d’une instruction plus poussée que celle qui était
donnée dans les Maisons de l’Edification de la Force. En général, les fils de
nos nobles quittaient l’île pour aller dans l’une des calmecac, car il n’y
avait pas ce genre d’école à Xaltocán. Le personnel enseignant de ces instituts
d’instruction supérieure était formé d’un ordre spécial de prêtres et les
étudiants apprenaient eux-mêmes à devenir prêtres, officiers gouvernementaux,
scribes, historiens, artistes, physiciens ou à pratiquer toute autre
profession. L’entrée dans un calmecac n’était pas interdite à un garçon
ordinaire, mais les études et la pension étaient trop coûteuses pour les
familles de la classe moyenne, à moins que l’enfant ne soit pris gratuitement,
pour avoir montré de grandes dispositions à l’école élémentaire.
Je dois avouer que je ne me distinguais en aucune façon à l’Ecole de
l’Apprentissage des Manières, comme à celle de l’Edification de la Force. La
première fois que j’entrai dans la classe de musique à l’école des manières, le
maître des garçons me demanda de chanter quelque chose pour juger de la qualité
de ma voix. Je m’exécutai et il me dit, « C’est une chose extraordinaire,
mais je ne crois pas que ce soit du chant. On va essayer plutôt un
instrument. »
Lorsque j’eus prouvé mon égale incapacité à tirer un son de la flûte à
quatre trous, ou une quelconque harmonie des différents tambours, le maître,
exaspéré, m’envoya dans une classe où l’on apprenait une danse de débutants,
celle du Serpent Tonnant. Chaque danseur fait un petit bond en avant, en
frappant des pieds, puis tourne complètement sur lui-même, se baisse sur un
genou et, dans cette position, fait un nouveau tour, puis il fait un autre bond
en avant, toujours en frappant des pieds. Quand une rangée de garçons et de
filles exécute cette danse comme il faut, on entend un bruit de roulement
continu et on a l’impression de voir un long serpent se tortiller le long de
courbes sinueuses. C’est, du moins, ce qui doit se produire.
« C’est la première fois que je vois un Serpent Tonnant qui a une
crampe ! cria la maîtresse des filles.
— Sors de la rangée, Malinqui ! » cria à son tour le
maître des garçons.
A partir de ce jour, je fus pour lui Malinqui, « la Crampe »
et lorsque les élèves de l’école se produisaient en public, au cours des
cérémonies, sur la place de la pyramide de l’île, ma seule contribution à la
musique et à la danse était de frapper avec une petite paire de bois de cerf,
sur un tambour en écaille de tortue, ou de faire claquer une paire de pinces de
crabe dans chaque main. Heureusement, ma sœur sauvait l’honneur de la famille,
dans ces occasions, car elle dansait presque toujours en solo. Tzitzitlini
aurait pu danser sans musique en faisant croire aux spectateurs mâles qu’il y
en avait.
Je commençais à avoir l’impression de n’avoir aucune identité, ou au
contraire des personnalités si nombreuses que je ne savais plus laquelle
m’appartenait réellement. A la maison, j’étais Mixtli, le Nuage. Dans Xaltocán,
on me connaissait sous le nom de Tozani, la Taupe. A la Maison de l’Apprentissage
des Manières, j’étais Malinqui, la Crampe et à la Maison de l’Edification de la
Force, je devins rapidement Poyautla, Perdu dans le Brouillard.
Par chance, je ne
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