Azteca
à tambouriner à l’unisson sur nos boucliers, jusqu’à ce
qu’ils soient souillés par le sang de nos mains.
D’autres nations avaient des armes différentes de nous autres Mexica et
certaines de nos unités de guerriers étaient équipées d’armes particulières, de
plus chaque homme pouvait choisir l’arme qui lui convenait le mieux. Au nombre
de ces armes, il y avait un lance-pierres, une hache de pierre émoussée qui
servait de matraque, une lourde massue dont la crosse était incrustée de
morceaux d’obsidienne, une lance d’os à trois pointes barbelées aux extrémités,
qui faisait des blessures atroces, ou encore une épée façonnée dans le mufle
dentu du poisson-scie.
Mais les armes traditionnelles des Mexica étaient au nombre de quatre.
Pour ouvrir le combat contre un ennemi, à longue distance, on se servait d’arcs
et de flèches. Les enfants s’entraînaient pendant longtemps avec des flèches
dont le bout était muni de balles d’oli molles, à la place de la tranchante
obsidienne. Par exemple, une fois, le Maître fit mettre en rang une vingtaine
d’entre nous et dit :
« Supposez que l’ennemi se tient dans ce carré de cactus
nopalli. » Il montra un endroit qui, pour ma vision embrumée, ne semblait
être qu’une tache de vert floue à une centaine d’enjambées de là. « Je
veux que vous tiriez de toutes vos forces sur la corde de l’arc et que vous
pointiez vos flèches en plein milieu de la ligne qui va du soleil à l’horizon.
Prêts ? Mettez-vous en position. Visez les cactus. Allez-y. »
Il y eut un sifflement, puis un concert de grognements. Toutes les
flèches étaient fichées en terre, bien groupées et à une centaine d’enjambées
environ, car Gourmand de Sang avait bien précisé quels devaient être la force
et l’angle de tir. Les enfants grognaient car tous avaient lamentablement
frappé en dehors de la cible ; les flèches avaient atterri bien trop à
gauche des cactus. Nous regardions le maître, attendant qu’il nous donne la
raison de cet échec.
Il indiqua les enseignes de guerre accrochées à des pieux plantés çà et
là sur le terrain.
« A quoi servent ces drapeaux ? » demanda-t-il.
Tout le monde se regarda. Enfin, Pactli, le fils du Seigneur Héron
Rouge, répondit :
« Ce sont les étendards qui doivent être portés sur le champ de
bataille par les chefs d’unités. Si les soldats se dispersent pendant le
combat, ces étendards leur indiquent le lieu de regroupement.
— Très bien, Pactzin, dit Gourmand de Sang. Et maintenant,
celui-ci, ce long oriflamme de plume, à quoi sert-il ? »
Il y eut un nouvel échange de regards et Chimali hasarda
timidement :
« C’est pour montrer notre fierté d’être des Mexica.
— La réponse est fausse, mais elle ne manque pas de noblesse,
aussi je ne te fouetterai pas, lui rétorqua le Maître. Observez donc cet
emblème, mes enfants, voyez comme il flotte dans le vent. »
Tous regardèrent. Ce jour-là, il n’y avait pas assez de vent pour que
la bannière se redresse. Elle pendait vers le sol.
« Ça souffle vers la gauche ! s’écria un autre garçon, tout
excité. On n’a pas visé dans la mauvaise direction, mais le vent a fait dévier
nos flèches.
— Quand on manque sa cible, c’est qu’on a mal visé, répondit
sèchement le Maître. Vous avez mal visé, le vent n’est pas une excuse. Pour
ajuster correctement son tir, il faut prendre en compte la force et la
direction vers laquelle Ehecatl souffle dans sa trompette. Voilà à quoi sert
cette bannière de plume. Le sens où elle est placée vous montre le sens où le
vent emportera vos flèches. Son angle d’élévation vous indique sa force. Et
maintenant, tous en marche pour aller récupérer vos flèches. Quand vous serez
là-bas, retournez-vous, mettez-vous en rang et visez dans ma direction. Le
premier qui m’atteindra sera dispensé du fouet pendant dix jours, même s’il le
mérite. »
Nous nous mîmes à courir plutôt qu’à marcher vers les flèches et nous
les renvoyâmes allègrement sur le cuachic, mais aucune ne le toucha.
Pour les combats qui se déroulaient à une distance inférieure à la
portée d’une flèche, nous avions des javelots faits d’une lame pointue en
obsidienne, emmanchée sur un court bâton. Ils n’avaient pas de plumes et la
précision ainsi que la force du tir dépendaient uniquement de la puissance de
projection.
« N’envoyez pas votre javelot
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