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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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son chapeau d'un air crâne ;
j'y cours à l'instant.
    – Dites donc milord et non pas monsieur,
jeune homme, si vous voulez bien, quand Sa Seigneurie vous fait
l'honneur de vous adresser la parole, dit le second gentleman avec
un air de doux reproche ; si vous n'avez pas reconnu lord
Georges Gordon tout de suite, il est grand temps maintenant.
    – Non, non, Gashford, dit lord Georges,
pendant que Barnabé se découvrait et lui faisait un beau salut. Ça
ne fait pas grand'chose dans un jour comme celui-ci, que tout
Anglais fidèle se rappellera avec orgueil et plaisir ;
couvrez-vous, l'ami, et suivez-nous, car vous êtes en arrière et
vous allez arriver trop tard. Voilà qu'il est dix heures passées.
Vous ne saviez donc pas que le rassemblement se faisait à dix
heures précises ?
    Barnabé secoua la tête en les regardant l'un
après l'autre, comme s'il ne se doutait pas de ce qu'on voulait lui
dire.
    « Vous auriez dû le savoir, l'ami, dit
Gashford. C'était bien convenu. D'où venez-vous donc, que vous êtes
si mal informé ?
    – Il n'est pas dans le cas de vous
répondre, monsieur, dit la veuve. Cela ne sert à rien de
l'interroger. Nous ne faisons que d'arriver de bien loin dans la
province, et nous ne savons rien de tout cela.
    – Il paraît que la cause a poussé loin
ses racines, et qu'elle étend déjà ses branches de tous côtés, dit
lord Georges à son secrétaire. Bonne nouvelle, et que Dieu soit
loué !
    – Ainsi soit-il ! cria Gashford d'un
air solennel.
    – Vous ne m'avez pas comprise, milord,
dit la veuve. Pardon, vous vous méprenez cruellement sur ce que
j'ai voulu dire. Nous n'entendons rien à tout ce qui se passe, et
nous n'avons ni l'intention ni le droit d'y prendre avec vous la
moindre part. Ce jeune homme est mon fils, mon pauvre fils, infirme
d'esprit, et qui m'est plus cher que la vie. Au nom du ciel,
milord, allez-vous-en sans lui ; épargnez-lui la tentation de
vous suivre dans quelque danger.
    – Ma bonne femme, dit Gashford, comment
est-il possible ? Je ne vous comprends pas. Qu'est-ce que vous
nous parlez de tentation et de danger ? Est-ce que vous prenez
milord pour le lion de l'Écriture, qui chercha quelqu'un à
dévorer ? Que le bon Dieu vous bénisse !
    – Non, non, milord ; pardonnez-moi,
reprit la veuve éplorée, lui mettant les deux mains sur la
poitrine, sans savoir ce qu'elle faisait ni ce qu'elle disait, dans
le trouble de son ardente prière ; mais j'ai des raisons de
vous supplier de céder à mes larmes, aux larmes d'une mère. Au nom
du ciel ! laissez-moi mon fils. Il n'est pas dans son bon
sens ; il ne sait pas ce qu'il fait, je vous le jure.
    – Voyez, dit lord Georges, reculant
devant les mains de la veuve et rougissant tout à coup, voyez un
peu la perversité de ce siècle ! On traite de folie le zèle de
ceux qui veulent servir fidèlement la bonne cause. Avez-vous bien
le cœur de parler comme cela de votre propre fils, mère
dénaturée ?
    – Vous m'étonnez, dit Gashford à la
veuve, avec une espèce de sévérité sans aigreur ; voilà un
triste échantillon de la dépravation des femmes !
    – Il n'en a toujours pas l'air, dit lord
Georges jetant un coup d'œil sur Barnabé, et demandant tout bas à
son secrétaire s'il était vrai que le gars avait l'esprit dérangé.
Et, quand ce serait, nous ne devons pas nous arrêter à une
bagatelle comme ce prétendu dérangement d'esprit. Qui de nous (et
il rougit encore) échapperait à ce reproche, si c'était un cas
d'exclusion ?
    – Pas un de nous, répliqua le secrétaire.
Dans un cas comme celui-ci, plus il y a de zèle, de fidélité, de
bonne volonté, plus la vocation est écrite là-haut, et plus sainte
est la folie. Quant à ce jeune homme, milord, ajouta-t-il en
retroussant légèrement sa lèvre, pendant qu'il regardait Barnabé,
qui était là debout, à tourner dans les mains son chapeau, et à
leur faire signe en cachette de partir, soyez sûr qu'il a toute sa
raison, et qu'il est aussi sain d'esprit que pas un.
    – Ah çà ! désirez-vous faire partie
de la
Grande Association
 ? dit lord Georges en
s'adressant à lui ; avez-vous l'intention d'être un des
nôtres ?
    – Oui ! oui ! dit Barnabé,
l'œil étincelant. Certainement que j'en ai l'intention. Je le lui
disais à elle-même, pas plus tard que tout à l'heure.
    – Je vois ce que c'est, répliqua lord
Georges en jetant à la malheureuse mère un regard de
reproche ; je m'en doutais.

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