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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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Eh bien ! vous n'avez qu'à me
suivre, moi et ce gentleman, et vous allez accomplir votre
désir. »
    Barnabé déposa sur la joue de sa mère un
tendre baiser, et lui disant d'avoir bon courage, que leur fortune
était faite, il marcha derrière eux. Elle aussi, la pauvre femme,
elle se mit à les suivre, en proie à une terreur et à un chagrin
inexprimables.
    Ils marchèrent rapidement le long de
Bridge-Road, dont toutes les boutiques étaient fermées ; car
en voyant passer cette cohue, et dans la crainte de leur retour,
les gens n'étaient pas rassurés pour leurs marchandises et les
vitres de leurs fenêtres ; on pouvait apercevoir à l'étage
supérieur de leurs maisons tous les habitants réunis à leurs
croisées, regardant en bas dans la rue avec des visages alarmés, où
se peignaient diversement l'intérêt, l'attente et l'indignation.
Les uns applaudissaient, les autres sifflaient. Mais sans faire
attention à ces manifestations, et tout entier au bruit du vaste
rassemblement voisin, qui retentissait à ses oreilles comme le
mugissement de la mer, lord Georges Gordon hâta le pas et se trouva
bientôt dans les Champs de Saint-Georges.
    C'étaient réellement des champs à cette
époque, et même très étendus. On y voyait rassemblée une multitude
immense, portant des drapeaux de toute forme et de toute grandeur,
mais tous d'une couleur uniforme, tous bleus, comme les cocardes.
Il y avait des pelotons qui faisaient des évolutions militaires,
d'autres en ligne, en carré, en cercle. Un grand nombre des
détachements qui marchaient sur le champ de parade et de ceux qui
restaient stationnaires, chantaient des psaumes et des hymnes. Quel
que fût le premier qui en avait eu l’idée, elle n'était pas
mauvaise : car le son de ces milliers de voix élevées dans les
airs était fait pour remuer l'âme la plus insensible, et ne pouvait
manquer de produire un effet merveilleux sur les enthousiastes de
bonne foi dans leur égarement.
    On avait posté en avant du rassemblement des
sentinelles pour annoncer l'arrivée du chef. Quand celles-ci se
furent repliées pour passer le mot d'ordre, il circula en un moment
dans toute la troupe, et il y eut alors un moment de profond et
morne silence, pendant lequel les masses se tinrent si tranquilles
et si immobiles, qu'on ne voyait plus, partout où pouvaient se
porter les yeux, d'autre mouvement que celui des bannières
flottantes. Puis tout à coup éclata un hourra terrible, puis un
second, puis un autre. L'air en était ébranlé et déchiré comme par
un coup de canon.
    « Gashford, cria lord Georges, serrant le
bras de son secrétaire tout contre le sien, et parlant avec une
émotion qui se trahissait également par l'altération de sa voix et
de ses traits, je sens maintenant que je suis prédestiné ; je
le vois, je le sais. Je suis le chef d'une armée. Ils me
sommeraient en ce moment, d'une commune voix, de les conduire à la
mort, que je le ferais ; oui ! dussé-je tomber le premier
moi-même.
    – En effet, c’est un fier et grand
spectacle, dit le secrétaire ; une noble journée pour
l'Angleterre et pour la grande cause du monde. Recevez, milord,
l'hommage d'un humble mais dévoué serviteur…
    – Qu'allez-vous faire ? lui cria son
maître en le prenant par les deux mains, car il avait fait mine de
s'agenouiller à ses pieds ; cher Gashford, n'allez pas me
mettre hors d'état de remplir les devoirs qui m'attendent dans ce
glorieux jour. » Et en disant ces mots le pauvre gentleman
avait des larmes dans les yeux. « Passons à travers leurs
rangs ; il nous faut trouver une place dans quelque division
pour notre nouvelle recrue. Donnez-moi la main. »
    Gashford glissa sa froide, son insidieuse
main, dans l'étreinte fanatique de son maître, et alors, la main
dans la main, toujours suivis de Barnabé et de sa mère, ils se
mêlèrent à la foule.
    L'
Association
, pendant ce temps-là,
s'était remise à chanter, et, à mesure que leur chef passait dans
les rangs, tous élevaient leurs voix à qui mieux mieux. Parmi ces
ligueurs, coalisés pour défendre jusqu'à la mort la religion de
leur pays, il y en avait beaucoup qui n'avaient pas même entendu ni
psaume ni cantique de leur vie. Mais comme c'étaient de fameux
lurons, pour la plupart, cela ne les empêchait pas d'avoir de bons
poumons, et, comme ils aimaient naturellement à chanter, ils
braillaient toutes les ribauderies et toutes les sottises qui leur
passaient par la tête,

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