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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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sachant bien que cela se perdrait dans le
chœur général des voix, et ne s'inquiétant guère d'ailleurs qu'on
s'en aperçût ou non. Il y eut bien de ces gaudrioles chantées
jusque sous le nez de lord Georges Gordon ; mais sans faire
attention à leurs flonflons, il continua sa marche avec sa roideur
habituelle et sa majesté solennelle, charmé, édifié de la piété de
ses partisans.
    Ils allaient donc toujours, toujours, tantôt
sur le front de cette ligne, tantôt derrière celle-là, tournant
autour de la circonférence de ce cercle, longeant les quatre côtés
de ces carrés, et il y en avait sans fin à passer en revue, de ces
cercles, de ces carrés, de ces lignes. La chaleur du jour était
arrivée à son apogée ; la réverbération du soleil sur la place
du rassemblement la rendait encore plus étouffante : ceux qui
portaient les lourdes bannières commençaient à se sentir défaillir,
et prêts à tomber de lassitude. La plupart des frères et amis ne se
gênaient pas pour ôter leurs cravates et déboutonner leurs habits
et leurs gilets. Dans le centre, un certain nombre d'entre eux,
accablés par l'excès de la chaleur rendue plus insupportable encore
par la multitude dont ils étaient entourés, se jetaient sur le
gazon, tout haletants, offrant d'un verre d'eau tout ce qu'ils
avaient d'argent. Et pourtant pas un homme ne quittait la place,
pas même parmi ceux qui souffraient le plus ; et pourtant lord
Georges, tout ruisselant de sueur, continuait sa marche avec
Gashford ; et pourtant Barnabé et sa mère les suivaient de
près avec persévérance.
    Ils étaient arrivés au bout d'une longue ligne
d'environ huit cents hommes sur une seule file et lord Georges
avait tourné la tête derrière lui, quand on entendit un cri de
reconnaissance, à demi étouffé comme tous les cris que la voix fait
entendre en plein air au milieu d'une foule ; et aussitôt un
homme sortit des rangs avec un grand éclat de rire, et posa sa
lourde main sur l'épaule de Barnabé.
    « Eh quoi ! s'écria-t-il, Barnabé
Rudge ? Voilà un siècle qu'on ne vous a vu. Où diable
étiez-vous donc caché ? »
    Dans ce moment-là, Barnabé pensait à toute
autre chose ; l'odeur du gazon foulé aux pieds lui rappelait
ses vieilles parties de cricket, du temps qu'il était petit garçon
et qu'il allait jouer sur la pelouse de Chigwell. Surpris de cette
apostrophe soudaine et tapageuse, il fixa sur le personnage ses
yeux effarouchés, sans pouvoir dire autre chose que « Est-ce
bien Hugh que je vois ? »
    – Oui-da, Hugh en personne, répéta
l'autre ; Hugh du Maypole. Vous rappelez-vous mon chien ?
Il vit toujours et il va bien vous reconnaître, je vous en réponds.
Mais, Dieu me pardonne ! je crois que vous portez nos
couleurs ? Tant mieux, ma foi, tant mieux ! Ha !
ha !
    – Vous connaissez ce jeune homme-là, à ce
que je vois ? dit Lord Georges.
    – Si je le connais, milord ! je le
connais aussi bien que ma main droite. Mon capitaine aussi le
connaît : nous le connaissons tous.
    – Voulez-vous le prendre dans votre
division ?
    – Il n'y a pas un garçon meilleur, ni
plus agile, ni plus décidé que Barnabé Rudge, dit Hugh ; je
parie avec qui voudra qu'on ne trouve pas son pareil. Il va
marcher, milord, entre Dennis et moi ; et c'est lui qui va
porter, ajouta-t-il en prenant un drapeau des mains d'un camarade
fatigué, c'est lui qui va porter le plus gai drapeau de soie de
cette vaillante armée.
    « Dieu du ciel ! non, cria la veuve
eu s'élançant devant eux. Barnabé… milord… voyez… il faut qu'il
revienne ; Barnabé, Barnabé.
    – Comment, des femmes dans le camp !
cria Hugh se jetant entre eux et les séparant. Holà !
capitaine, à l'ordre !
    – Qu'est-ce qu'il y a donc ? cria
Simon Tappertit, qui accourut en toute hâte et tout échauffé. Vous
appelez cela de l'ordre !
    – Ma foi ! non, capitaine, répondit
Hugh, tenant toujours la veuve en respect avec ses mains
étendues ; c'est bien plutôt du désordre. Les dames ne sont
bonnes ici qu'à détourner nos vaillants soldats de leurs devoirs.
Elles auraient bientôt rempli la place, si on les laissait faire.
Allons, vite !
    – Serrez les rangs ! cria Simon à
plein gosier ; en avant, marche ! »
    La pauvre femme était tombée sur le gazon.
Tout le camp était en mouvement. Barnabé était entraîné au cœur
d'une masse épaisse de ligueurs ; elle ne le voyait plus.

Chapitre 7
     
    La populace ameutée

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