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Barnabé Rudge

Barnabé Rudge

Titel: Barnabé Rudge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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serrurier, elle n'avait pas envie de dormir, aussi,
mettant la lumière sur la table, et écartant le rideau de la petite
fenêtre, elle contempla d'un air pensif le vaste ciel nocturne.
    Peut-être se demandait-elle avec étonnement
quelle étoile était destinée à lui servir de séjour lorsqu'elle
aurait parcouru sa petite carrière ici-bas ; peut-être
cherchait-elle à pénétrer laquelle de ces sphères brillantes
pouvait être le globe natal de M. Tappertit, peut-être
s'émerveillait-elle qu’elles s'abaissassent à regarder cette
perfide créature, l'homme, sans en avoir mal au cœur, sans en
devenir tout à coup vertes comme les lampes des pharmaciens,
peut-être ne pensait-elle à aucune chose en particulier. Quel que
fût l'objet de ses réflexions, elle resta assise là jusqu'à ce que
son attention, éveillée par tout ce qui se rattachait à l'insinuant
apprenti, fut attirée par un bruit dans la chambre voisine de sa
propre chambre, dans sa chambre à lui, la chambre où il dormait et
rêvait, où quelquefois peut-être il rêvait d'elle.
    Qu’il ne rêvât pas maintenant, à moins qu’il
ne se promenât tout endormi, rien de plus clair car d’instant en
instant il venait de là une espèce de frottement, comme s’il était
occupé à polir le mur blanchi à la chaux, puis sa porte cria
doucement, puis il y eut une faible indication de sa marche furtive
sur le palier. Notant cette dernière circonstance, Mlle Miggs
pâlit et frissonna, comme si elle se méfiait de ses intentions, et
plus d'une fois elle s'écria, en retenant son souffle.
« Oh ! c'est un effet de la Providence que j'aie mis le
verrou ! » En cela elle se trompait, c'est sans doute la
frayeur qui lui faisait confondre en idée un verrou et son usage
car il était bien vrai qu'il y avait un verrou à la porte, mais il
n'était pas mis en dedans.
    Quoi qu'il en soit, le sens de l’ouïe ayant,
chez Mlle Miggs, un tranchant aussi effilé que son caractère,
et se trouvant de la même nature hargneuse et soupçonneuse,
l'informa bientôt que le promeneur nocturne dépassait sa porte, et
paraissait avoir quelque but tout à fait distinct d'elle-même, sans
le moindre rapport avec sa personne. À cette découverte elle fut
plus effrayée que jamais, et elle allait donner libre issue à ses
cris de : « Au voleur ! à l’assassin ! »
qu'elle avait jusqu'ici comprimés, quand elle s'avisa d'ouvrir
doucement sa porte et de regarder, pour savoir si ses craintes
avaient quelque fondement solide et palpable.
    En conséquence, regardant dehors, et étendant
son cou au-dessus de la rampe elle aperçut, à sa grande
stupéfaction, M. Tappertit complètement habillé, qui
descendait à la dérobée l'escalier, une marche à la fois, avec ses
souliers dans une de ses mains et une lampe dans l’autre. Elle le
suivit des yeux, et, descendant elle-même quelques marches pour
profiter d'un angle propice, elle le vit passer la tête par la
porte de la salle à manger, la retirer avec une grande promptitude,
et commencer immédiatement une retraite vers le haut de l’escalier
avec toute la célérité possible.
    « Il y a là un mystère ! dit la
demoiselle, lorsqu'elle fut rentrée dans sa propre chambre saine et
sauve, mais ne pouvant plus respirer. Bonté divine ! il y a là
un mystère ! »
    La perspective de surprendre n'importe quel
secret de n'importe qui aurait suffi pour tenir éveillée
Mlle Miggs même sous l'influence de la jusquiame. Bientôt elle
entendit encore le pas de l'apprenti ; d'ailleurs elle aurait
entendu celui d'une plume automate qui serait descendue sur la
pointe du pied. Puis elle se glissa hors de sa chambre, ainsi
qu'auparavant, et aperçut de nouveau le fuyard qui revenait à la
charge : il regarda encore avec précaution à la porte de la
salle à manger ; mais cette fois, au lieu de battre en
retraite, il entra et disparut.
    Miggs était de retour dans sa chambre, et
avait mis la tête à la fenêtre, en moins de temps qu'il n'en faut à
un homme d'âge pour cligner de l'œil et se remettre. L’apprenti
sortit par la porte de la rue, la ferma soigneusement derrière lui,
s'en assura en y appuyant le genou, et partit avec une allure de
fanfaron, en mettant quelque chose dans sa poche tandis qu'il
s'éloignait. À ce spectacle, Miggs cria derechef :
« Bonté divine ! » puis : « Juste
ciel ! » puis : « Seigneur,
protégez-moi ! » puis, prenant une chandelle en main,
elle

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