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Belle Catherine

Belle Catherine

Titel: Belle Catherine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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le tour par cette ruelle. Ils ne vous verront pas et vous gagnerez la campagne sans être aperçus. J'essayerai de les retenir autant que je pourrai.
    — Si tu n'avais pas tellement peur pour ta peau, goguenarda Gauthier, je dirais que tu es un brave homme ! Adieu, Martin. On se reverra peut-être un jour.
    Mais déjà Catherine avait talonné Morgane et s'engouffrait dans la ruelle en pente. Au risque de se rompre le cou, elle prit le galop aussitôt. Les sabots de Morgane claquaient joyeusement sur la terre battue du chemin et, derrière elle, la jeune femme pouvait entendre le galop pesant de Rustaud. Bientôt, ils furent dans un petit bois, hors de vue de Montjean.
    Le chemin s'écartait du bord de Loire et plongeait à travers les branches dépouillées pour devenir une invraisemblable fondrière boueuse. Gauthier rejoignit Catherine et se mit à sa hauteur.
    Je pensais, fit-il sans cesser de galoper. Si nous retournions à Orléans ? Maître Jacques Boucher, bien certainement, vous accueillerait. Vous avez là des amis solides.
    — En effet, dit Catherine, mais le trésorier Jacques Boucher est, avant tout, un solide, un fidèle sujet du roi Charles.
    C'est un homme rigide et droit comme une lame d'épée. Il ne résisterait pas, quelque amitié qu'il ait pour moi, à un ordre de son souverain. Or, si j'ai bien compris et même si Jacques Boucher l'ignore, le Roi, c'est La Trémoille.
    — Où aller alors ? J'espère que vous ne songez pas à vous précipiter tête première, et dans l'état où vous êtes, à Sully-sur-Loire ? Vous devez vivre, Madame, si vous voulez venir à bout de vos ennemis.
    — Il m'importe peu de les vaincre ou non, répondit Catherine, les lèvres serrées. Mais il y a Arnaud... il y a mon enfant. Je pourrais retourner en Bourgogne où j'ai des amis, où je trouverais une sûreté relative, mais ce serait me séparer d'Arnaud. Il faut que je reste sur les terres du roi Charles au risque de tomber aux mains de son favori. Il faut que quelqu'un nous accueille, nous cache et me permette d'atteindre d'une façon ou d'une autre ceux qui pourront efficacement nous aider : les compagnons d'armes de messire de Montsalvy, les capitaines du Roi qui, tous, haïssent La Trémoille.
    — Et ce refuge, vous savez où le trouver ?
    Catherine ferma les yeux un instant comme pour
    rappeler un visage du fond de sa mémoire.
    — Si je sais juger un homme à son poids réel, je crois que oui. Si je me suis trompée, alors il n'y aura plus ni recours ni salut pour moi. Mais je ne me trompe certainement pas.
    — Ainsi nous allons ?
    — À Bourges. Chez maître Jacques Cœur.
    Les cavaliers sortaient du bois. Une étendue plate et herbeuse, à la gauche lointaine de laquelle luisait le fleuve, s'allongeait devant eux sous le gris monotone du ciel. Catherine et Gauthier s'y lancèrent éperdument.
    Dans le fond de sa pensée, Catherine s'était parfois demandé si sa situation personnelle était aussi mauvaise que Gilles de Rais avait bien voulu le lui dire et si l'étrange seigneur n'avait pas intentionnellement noirci le tableau afin de mieux la tenir à sa merci. Mais ce n'était là qu'un faible espoir. Les paroles de Gilles rendaient ce son inimitable que possède la seule vérité. Elle en eut d'ailleurs assez promptement l'inquiétante confirmation.
    Pour se mettre à l'abri des surprises, elle avait décidé, de concert avec Gauthier, que l'on voyagerait la nuit, malgré les dangers de mauvaises rencontres que cela pouvait comporter, et que l'on se tiendrait cachés le jour. Il y avait à cette décision plusieurs raisons dont la première était une plus grande sécurité vis-à-vis des gens du Roi, la seconde, le fait que les nuits en ce triste mois de novembre étaient infiniment plus longues que les jours, et la troisième que le chemin vers Bourges ne présentait aucune difficulté à suivre, même la nuit. Il suffisait de remonter la Loire, puis le cours du Cher qui amènerait les voyageurs non loin de leur destination dernière. On passa donc le jour des Morts à Chalonne, où le Prieur accueillit chrétiennement ces étrangers qui demandaient asile, mais on quitta l'abri de Saint-Maurille à la nuit close.
    Jusqu'au lever du jour, on fit près de vingt lieues, ce qui représentait pour Rustaud, doublement chargé, une sorte de record. Mais, quand le paysage se dégagea des brumes matinales, il révéla les clochers, les tours, les lanternes ajourées, les rudes murailles et les immenses

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