Ben-Hur
distribuer, l’une d’elles sera à moi. Je te l’apporterai et je la placerai sur ta tête, là où je viens de poser mes lèvres. Tu seras reine, – ma reine, – et il n’en sera point de plus belle que toi !
Elle se dégagea tout à coup de son étreinte et, sans répondre un mot, s’enfuit dans la direction de la tente.
CHAPITRE XXXVIII
Le troisième jour de son voyage, la petite compagnie fit halte vers midi, au bord du Jabok, en un endroit où une centaine d’hommes, presque tous originaires de Pérée, se reposaient avec leur bétail. À peine les nouveaux venus avaient-ils quitté leurs montures, que l’un d’eux vint leur offrir à boire. Pendant qu’ils le remerciaient, il regardait avec admiration le chameau de Balthasar.
– J’arrive du Jourdain où il y a, en ce moment, des voyageurs venus comme vous de pays éloignés, mes illustres amis, dit-il, mais aucun d’eux ne possède un dromadaire comparable à celui-ci. C’est un noble animal ! Me serait-il permis de m’informer de la race dont il est issu ?
Balthasar lui répondit, après quoi il ne songea plus qu’à se reposer, mais Ben-Hur, plus curieux, continua la conversation.
– À quel point de la rivière se trouvent tous ces étrangers ? demanda-t-il.
– À Béthabara.
– C’était jadis un gué très fréquenté, je ne comprends pas ce qui lui a procuré tout à coup tant de notoriété.
– Je vois, dit l’étranger, que tu n’as pas encore appris la bonne nouvelle.
– Quelle bonne nouvelle ?
– Un homme est apparu au désert, un homme très saint, dont la bouche est pleine de paroles étranges, qui font une profonde impression sur ceux qui les entendent. Il s’appelle Jean, le Nazaréen, fils de Zacharie ; il dit qu’il est le messager envoyé pour annoncer le Messie.
Iras elle-même prêtait une oreille attentive à ce que racontait cet homme.
– On dit que ce Jean a passé sa vie, depuis son enfance, dans une caverne près d’En-Gedi, continua-t-il, priant et menant une vie plus sévère encore que les Esséniens. Des foules vont l’entendre prêcher, j’y suis allé comme tout le monde.
– Tous ces hommes-là en viennent-ils ?
– La plupart d’entre eux s’y rendent, le petit nombre seul en reviennent.
– Que prêche donc cet homme ?
– Une doctrine que, de l’avis de tous, personne n’avait jamais enseignée en Israël. Il parle de repentance et de baptême. Les rabbis ne savent que penser de lui, nous n’en savons pas davantage. Quelques-uns lui ont demandé s’il est le Christ, d’autres, s’il est Élie ; à tous il répond : Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : Aplanissez le chemin du Seigneur !
À ce moment, les compagnons de cet homme l’appelèrent et comme il se préparait à les quitter, Balthasar lui dit :
– Bon étranger ! Apprends-nous, je te prie, si nous trouverons encore le prédicateur à l’endroit où tu l’as laissé ?
– Oui, à Béthabara.
– Que serait ce Nazaréen si ce n’est le héraut de notre roi ? s’écria Ben-Hur s’adressant à Iras qu’il considérait déjà comme plus directement intéressée à la venue du mystérieux personnage que son vieux père.
Néanmoins, ce fut lui qui répondit, en se levant avec une vivacité dont personne ne l’aurait cru capable :
– Partons en toute hâte, je ne suis plus fatigué.
Ils campèrent pour la nuit à l’ouest de Ramoth de Galaad et ne s’attardèrent pas longtemps à causer.
– Il faudra nous lever de bonne heure, fils de Hur, dit le vieillard, le Sauveur pourrait arriver avant que nous fussions là pour le voir.
– Le roi ne peut être bien éloigné de son héraut, murmura Iras, et Ben-Hur lui répondit :
– Demain nous le verrons.
Le lendemain, à la troisième heure, les voyageurs, après avoir contourné le mont de Galaad, débouchèrent dans une steppe aride, à l’est de la rivière sacrée. En face d’eux ils apercevaient l’extrême limite de la plaine de Jéricho, qui se déroulait, ombragée par ses vieux palmiers, jusqu’au pied des collines de Juda.
– Réjouis-toi, excellent Balthasar, dit Ben-Hur, nous voici presque arrivés au gué de Béthabara.
L’Éthiopien excitait le chameau de la voix ; ils avançaient rapidement et bientôt ils distinguèrent des tentes, des animaux attachés tout auprès et une foule immense, groupée sur les deux rives du Jourdain.
Weitere Kostenlose Bücher