Ben-Hur
était inébranlable ; il ne doutait ni de sa propre habileté, ni des moyens de ses quatre associés, comme volontiers il eut appelé ses superbes arabes.
– Qu’il vienne se mesurer à nous, disait-il en les caressant tour à tour. Qu’en dis-tu, Antarès, et toi, honnête Rigel ? N’apprendra-t-il pas à ses dépens ce que nous valons ? Qu’en penses-tu, Aldébaran, toi, le roi des coursiers ? Nous le battrons, Ataïr, nous le battrons, mes braves cœurs !
À la tombée de la nuit Ben-Hur vint s’asseoir à la porte de la tente, pour attendre Ilderim, qui n’était pas encore revenu de la ville. Soit que cela provînt de la satisfaction que lui avait causée les progrès réalisés par les chevaux, ou du bain pris après son travail, ou simplement l’effet de la réaction qui se produit toujours chez un jeune homme après une crise d’abattement, sa disposition d’esprit était des meilleures. Il se sentait entre les mains d’un Dieu qui, après l’avoir longtemps éprouvé, allait se montrer favorable à ses desseins. Il entendit le bruit des sabots d’un cheval qui approchait rapidement ; un instant plus tard, Malluch s’arrêtait devant lui.
– Fils d’Arrius, s’écria-t-il, après avoir échangé les salutations d’usage, je viens de la part du cheik Ilderim ; il te prie de prendre un cheval et de le rejoindre à la ville.
Ben-Hur se leva, sans faire de question, et se dirigea vers l’endroit où paissaient les chevaux.
Et bientôt Malluch et lui galopèrent sur la route d’Antioche. À une petite distance du pont de Séleucis ils passèrent la rivière sur un bac, puis la traversèrent encore sur un autre et entrèrent enfin dans la ville, du côté de l’occident. Ils avaient fait un long détour, mais Ben-Hur ne s’en plaignait pas, il comprenait fort bien la raison de tant de précautions. Ils chevauchèrent jusqu’à l’endroit où abordaient les vaisseaux de Simonide, et quand ils furent arrivés devant la porte des entrepôts, Malluch arrêta sa monture.
– Nous voilà arrivés, dit-il, descends de ton cheval.
Ben-Hur reconnut aussitôt la maison.
– Où est le cheik ? demanda-t-il.
– Viens avec moi, je te conduirai.
Un homme veillait près de la porte ; il vint prendre leurs chevaux, et avant même que Ben-Hur fût revenu de son étonnement, il entendait une voix lui crier :
– Entre, au nom de Dieu.
CHAPITRE XXVI
Au moment où Ben-Hur soulevait le rideau qui fermait l’entrée de la chambre d’où partait la voix, Malluch se retira, et le jeune homme entra seul. Rien n’était changé dans cette chambre, depuis sa première entrevue avec Simonide, si ce n’est qu’elle était éclairée par une demi-douzaine de lampes d’argent, posées sur les bras d’un haut chandelier de cuivre. Leur lumière brillante illuminait toute la pièce et faisait ressortir les moulures des boiseries, les corniches dorées du plafond et la voûte garnie de plaques de mica, aux reflets violets.
Ben-Hur fit quelques pas en avant et s’arrêta. Trois personnes le regardaient, Simonide, Ilderim et Esther. Ses regards allaient de l’un à l’autre, comme s’il espérait trouver sur leurs visages l’explication du motif pour lequel ils l’avaient fait appeler. Enfin ses yeux s’arrêtèrent sur ceux d’Esther. Les deux hommes le considéraient avec bienveillance, mais il y avait sur le gracieux visage de la jeune fille quelque chose de plus que de la bienveillance, quelque chose de trop éthéré pour le définir, et qui toucha profondément Ben-Hur.
– Fils de Hur !
Il se tourna brusquement vers celui qui venait de l’appeler ainsi.
– Fils de Hur, répéta lentement Simonide, avec une emphase qui semblait destinée à donner une signification particulière au nom qu’il prononçait, que la paix de l’Éternel, du Dieu de nos pères, soit avec toi ! – accepte mon vœu… il s’arrêta un instant, – mon vœu et celui de ma fille.
Il était assis dans son fauteuil d’invalide, et Ben-Hur oubliait ses membres difformes et son cœur brisé, pour ne voir que sa tête royale, son pâle visage et ses yeux noirs pleins d’autorité. Ces yeux se fixèrent pendant un moment sur le jeune homme, puis il se croisa les mains sur sa poitrine et s’inclina. Il n’y avait pas à se méprendre sur la signification de ses paroles et de son attitude.
– Simonide, répondit Ben-Hur avec émotion, j’accepte ton vœu et je te
Weitere Kostenlose Bücher