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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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jardinier, où il s’occupa de triturer et de broyer des plantes que Boniface lui apportait en prenant soigneusement note de tout ce que faisait le jeune Pétrus. Il va sans dire que Ragastens connaissait maintenant le pavillon de fond en comble. Il avait mis de côté deux paquets de cordelette et deux sortes de bâillons qu’il avait fabriqués avec des linges.
    – Un pour maître Boniface, un pour son illustre Sainteté, avait-il murmuré.
    Une seule chose lui échappait ; malgré ses investigations, il n’arriva pas à découvrir où le jardinier cachait la clef de la petite porte dérobée.
    La journée s’écoula lentement. Rongé d’impatience, Ragastens était obligé de continuer à causer fleurs et fruits et de répondre aux mille questions que lui posait Boniface sur l’art du jardinage en Allemagne. Enfin, le soir vint. Le jardinier ferma soigneusement les jalousies du pavillon et alluma une chandelle.
    – Peut-être Sa Sainteté fera-t-elle ce soir sa promenade ? dit-il.
    – À quelle heure le Saint-Père descend-il d’habitude ?
    – Vers neuf heures. Il se promène une demi-heure environ. À dix heures tout dort dans la villa…
    Ragastens ne répondit pas. Il était nerveux et ne tenait pas en place. Neuf heures sonnèrent… Il prit place derrière la jalousie. Les minutes passèrent…
    – Voici dix heures ! fit tout à coup Boniface… Le Saint-Père ne descendra pas ce soir… Ce sera pour demain, sans faute. Car, rarement, il passe deux jours sans venir respirer l’air pur et méditer dans la solitude.
    Ragastens dissimula un geste d’impatience.
    Déjà, le vieux jardinier, revenant à son thème favori, lui racontait les peines qu’il avait eues pour certain prunier qu’il lui désignait… Cependant, la nuit s’avançait.
    – Allons, fit-il enfin, il est temps d’aller nous reposer, jeune homme.
    Il pouvait être à ce moment onze heures et demie. Tout à coup, le son lugubre d’une cloche retentit tristement. Boniface ôta gravement son bonnet.
    – Qu’est-ce que cela ? fit Ragastens en tressaillant.
    – Cela ? C’est la cloche de la chapelle qui sonne le glas. Il y a quelqu’un de mort dans la villa… et quelqu’un de considérable… Sans cela, on ne sonnerait pas en pleine nuit…
    Quelque chose comme un affreux pressentiment traversa l’esprit de Ragastens. Le vieux jardinier s’était approché de la fenêtre. La cloche, d’intervalle en intervalle, continuait à jeter dans la nuit son appel sinistre.
    – C’est pour une femme ! ajouta le vieillard.
    – Une femme ! s’écria Ragastens dans un cri de terreur.
    – Oui, si c’était un homme, la cloche sonnerait un coup double… Écoutez… Ah ! s’exclama-t-il soudain.
    – Qu’avez-vous ?…
    – Le pape !…
    Ragastens bondit à la fenêtre. Du doigt, Boniface lui désigna une ombre qui se promenait avec agitation.
    – Que se passe-t-il donc ? murmura le vieux jardinier. Pour que le Saint-Père soit éveillé à cette heure-ci et qu’il laisse paraître un tel désordre dans sa marche…
    Boniface n’eut pas le temps d’achever sa phrase. Un bâillon venait de lui être vigoureusement appliqué sur la bouche et noué en un instant derrière la tête. Il voulut se retourner, épouvanté. Mais il trébucha et tomba à la renverse, livide d’effroi…
    Alors, il vit Ragastens qui, agilement, lui liait les jambes… En un clin d’œil, Boniface se trouva ficelé, dans l’impossibilité de faire un geste ou de pousser un cri.
    – Si tu essaies de bouger, tu es mort !… Où est la clef de la petite porte du jardin ? Vite !… Un signe avec tes yeux me suffira…
    Boniface ferma héroïquement les yeux pour indiquer qu’il ne répondrait pas. Ragastens tira son poignard et en plaça la pointe sur la gorge du bonhomme.
    – Dépêche ! dit-il froidement.
    Boniface vaincu par la terreur, abaissa les yeux sur sa propre poitrine.
    Ragastens se hâta de fouiller. Ses doigts heurtèrent la clef… Il la glissa dans sa ceinture. Alors, ayant ramassé le deuxième bâillon et le paquet de cordelettes qu’il avait jetés sur la table au moment où il s’était précipité sur le jardinier, il se glissa au dehors…
    La nuit était obscure. D’arbre en arbre, Ragastens, plutôt rampant que marchant, atteignit l’allée où se promenait le pape.
    Une double rangée de tilleuls jetait sur cette allée une ombre épaisse. Ragastens, cependant, reconnut parfaitement Borgia :

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