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Borgia

Titel: Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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dit :
    – Piérina, allez donc dire à l’abbé Angelo que je n’ai pas besoin de lui ce soir. J’ai sommeil et la lecture me fatiguerait. Puis, revenez.
    La matrone s’éclipsa. Borgia s’approcha vivement de la carafe. D’une main qui ne tremblait pas, il laissa tomber dans l’eau trois gouttes de la liqueur contenue dans le flacon. L’eau ne changea pas de couleur. Il la flaira : aucun parfum spécial. Alors, il regagna son fauteuil.
    Lorsque la matrone reparut, son premier coup d’œil fut pour la carafe. Elle attendit en silence, certaine de ce qui devait être fait maintenant.
    – Vous pouvez vous retirer, dame Piérina, lui dit tranquillement le pape. Je n’ai plus besoin de vous… À propos, reportez donc cette carafe où vous l’avez prise. Que diable voulez-vous que j’en fasse ?…
    La matrone saisit la carafe qu’elle couvrit ostensiblement d’un pan de son écharpe, comme pour bien indiquer son intention de la cacher. Puis elle se retira.
    Enfoncé dans son fauteuil, le pape s’était remis à méditer sur ce qui allait se passer. Puis, l’impatience commença à battre sourdement à ses tempes. Il se leva et fit quelques pas, attendant la minute qu’il s’était fixée.
    Vers neuf heures et demie, il sortit de sa chambre et se dirigea aussitôt vers celle de Rosita, marchant d’un pas assuré. Dans un couloir obscur, Piérina se dressa soudain devant lui.
    – Elle a bu, murmura-t-elle. Puis elle s’est bientôt endormie. J’ai fermé la porte. Voici la clef…
    Borgia prit la clef. La matrone s’était effacée et disparut.
    Le pape arriva devant la porte. Il ouvrit lentement, un peu pâli, avec un léger tremblement des mains, la gorge sèche et la respiration courte. Il entra.
    Une faible lueur éclairait la chambre.
    Le lit était à gauche, enveloppé de ses grandes courtines de soie brochée. Près de la tête du lit, une élégante petite table supportait un plateau de cristal. Sur le plateau, la fatale carafe et un verre presque vide. Au pied du lit, en retrait de la courtine, une autre table, avec un flambeau de cire qui donnait une lumière douce. Il résultait de cette disposition que la jeune fille endormie se trouvait dans l’ombre.
    Borgia la distinguait à peine. Il devina plutôt qu’il ne vit la masse de ses cheveux encadrant son visage, le profil du corps sous la couverture, et un bras qui reposait à nu, par-dessus la couverture, un bras d’une blancheur éclatante dans l’obscurité. Il frémit…
    Alors, il referma doucement la porte et s’avança sur la pointe des pieds. Il se pencha…
    Comment la réveiller, sinon par un baiser qui la ferait se dresser toute palpitante de la volupté que le philtre lui avait versée ?… Alors, il chercha la bouche de la jeune fille et sa main se posa, brûlante, sur son bras.
    Mais il se redressa, hagard, sa main violemment retirée… ses lèvres n’ayant pas eu le temps de toucher celles de la vierge… Il se releva, la sueur de l’angoisse au front, les yeux empreints d’une inexprimable terreur.
    Ce bras qu’il venait de toucher était froid – de cette froideur glaciale qu’ont les cadavres. De cette bouche qu’il cherchait, aucun souffle ne s’exhalait.
    Il recula et regarda. L’immobilité de la jeune fille était absolue. Les lignes du corps devinées sous la couverture avaient une raideur à laquelle il était impossible de se méprendre… Stupide d’étonnement et d’épouvante, il recula encore, jusqu’au pied du lit, et saisit le flambeau. Mais il n’osa pas tout de suite éclairer le visage…
    Il attendit une minute, cherchant à dompter l’impression nerveuse qui le faisait grelotter… Enfin, plus sûr de lui, il s’avança. La lumière tomba sur le visage de la Fornarina… Borgia étouffa l’exclamation d’horreur qui montait à sa gorge : la jeune fille était morte !
    Ses yeux entr’ouverts étaient déjà vitreux ; une pâleur de cire avait blanchi les chairs, et les lèvres, légèrement retroussées par le rictus de la mort, laissaient voir ses petites dents nacrées.
    Alors, brusquement, comme s’il eût craint d’être surpris dans un assassinat, Borgia éteignit le flambeau. Mais, aussitôt, les ténèbres le remplirent d’horreur… Sa main laissa échapper le flambeau… Il recula jusqu’à la porte, respirant à peine… et ce ne fut qu’au moment où il l’eut franchie qu’il reprit peu à peu possession de lui-même…
    Pendant un laps de temps qui

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