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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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Stamford. Il pouvait presque distinguer chaque fil de la broderie. Le roi au-delà du ruisseau… Et l’énigme de tout un destin. Allait-il mourir cette fois, s’inclinant devant la fatalité qu’il avait jadis déjouée, ou bien son destin était-il de conquérir toujours de la même manière ? Le roi au-delà du ruisseau. Odin choisit pour lui. Avec un hurlement qui ébranla littéralement les premiers rangs de l’infanterie anglaise devant lui, le roi du Nord chargea, laissant derrière lui le sanctuaire précaire du museau du sanglier.
    Les soldats de la garde montée du roi anglais reculèrent au premier coup de la hache de Haraldr Sigurdarson, pétrifiés par l’invincibilité de sa lame. Haraldr les chargea, sans voir les cadavres qu’il enjambait, jusqu’à ce qu’il sente le froid de l’eau dans ses bottes. Pendant un instant, il croisa le regard de Harold Godwinnson, puis le roi anglais se retrouva au milieu de sa garde qui battait en retraite. Le marchand de destin commença à franchir le gué de la Derwent vers la victoire.
    Au bout de trois pas, les yeux de Haraldr se fixèrent sur un autre fragment de la mosaïque. Deux gros doigts crispés sur la corde d’un arc, puis Haraldr regarda les yeux de l’archer anglais et vit l’éclat noir du corbeau. La flèche demeura immobile un instant, et Haraldr put voir la hampe droite et le barbillon d’acier noir à la pointe. Puis la flèche devint floue et s’envola vers la rivière. Haraldr entendit le sifflement juste avant que la pointe ne lui frappe le cou. Le choc ne fut pas plus violent qu’un coup du tranchant de la main au cours d’une lutte. Haraldr se redressa, attendant les adversaires qui, même en le voyant blessé, refusèrent d’avancer vers lui. Ses karls le rejoignirent. Puis il sentit de la chaleur sur sa clavicule et fut surpris de s’apercevoir qu’il était tombé à genoux. Sa garde le dépassa, et soudain tous les bruits de la bataille retombèrent sur lui ; la musique de l’acier, les craquements du bois et ceux des os, les jurons et les gémissements des hommes, la terreur hennissante des chevaux. Incapable de rester plus longtemps à genoux, il bascula en arrière, mais quelque chose lui prit la tête et le redressa. Il reconnut le visage au-dessus de lui seulement quand le scalde Thjodolf parla. Il ne put distinguer le sens des mots mais reconnut la voix au-dessus des cris de ses karls. Il était parfaitement conscient. Il se rendit compte que Thjodolf et plusieurs de ses karls l’avaient traîné sur la berge orientale de la rivière. Il se dit qu’il vivrait – jusqu’à l’instant où, en essayant de respirer, il sentit du sang dans sa trachée-artère.
    Tostig parut à ses côtés.
    Acceptez… les conditions de votre frère, haleta Haraldr. Je les ai déjà… acceptées… Sauvez-vous. Et sauvez mes hommes.
    Jamais ils n’accepteront ça. Ni moi. Je boirai avec vous ce soir, Haraldr Haardraada.
    Haraldr fut incapable de répondre, il ferma les yeux et accepta la beauté de sa mort dans les bras d’un scalde et d’un homme courageux, avec ses karls en train de se battre autour de lui. Les dieux l’aimaient encore. Il vit les belles images de la vie qui traînaient dans l’ombre de la mort : il avait huit ans, dans une forêt fraîche et sombre, et ses doigts touchaient la surface rugueuse d’une pierre de rune. Olaf lui apportait un petit bateau. Elisevett était une fillette aux joues douces comme du duvet. Maria, avec ses yeux pareils à des fanaux bleus dans la nuit. Maria sa fille, qui lui faisait la grimace en plein milieu du conseil. Puis son père, Sygurd Syr, plus nettement qu’il ne l’avait jamais vu. Tant de beautés, la mort oubliée, seulement la vie. Puis les mains froides se refermèrent autour de son cou, les ombres devinrent plus denses et le bruissement des énormes ailes annonça que le ciel s’assombrissait. Une frayeur glacée courut dans ses membres mourants. Il fit appel à toute sa volonté pour affronter l’épreuve finale de l’être, le dernier dragon. Il n’eut pas le temps de respirer : il bascula soudain de la vie dans le puits sombre de l’oubli.
    Il n’y avait pas de dragon, comprit-il à la fin, il n’y en avait jamais eu. En réalité, le dernier dragon n’avait aucune forme, c’était simplement une obscurité si totale, si dévastatrice, que lui attribuer une forme, si terrifiante soit-elle, revenait à le doter d’une miséricorde qui

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