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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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jusqu’à dire qu’il est seul à tirer les ficelles, car il me semble que Chirac les tire, pour le moins, avec lui.

    Puis rencontré à l’Élysée Xavier Marchetti 12 . La majorité, me dit-il, semble, d’après les chiffres du dernier référendum, avoir perdu deux millions de voix par rapport à 1967. Ces électeurs reviendront-ils ? Le président reconnaît qu’il a subi un revers. « Ça fait mal, mais il n’est pas K-O. »
    Pour le reste, il m’explique comment, en réalité, c’est le gouvernement qui est responsable de ce mauvais climat général. Il cite la hausse des prix, les viticulteurs, les petits commerçants, Chaban lui-même...
    « Aujourd’hui, finit-il par dire, il faut passer de l’expectative à la réflexion, de la réflexion à l’action ! »
    Traduction : les jours de Chaban sont comptés.

    Pendant ce temps-là, la question de l’ORTF et de la publicité clandestine révèle, au Parlement comme ailleurs, que tout est bon pour charger Chaban de tous les maux. Comme si Chaban, et Desgraupes aussi d’ailleurs, étaient directement responsables de la publicité clandestine !

    À la sortie de la salle des Quatre-Colonnes, Jacques Chirac, sans y toucher, dit aux journalistes que le groupe parlementaire UDR est braqué contre le gouvernement et que beaucoup (à commencer par lui ?) pense qu’il faut changer de Premier ministre.
    Les députés de la majorité ne veulent plus voir Debré, Frey, Chaban. Ils en ont assez. Certes, la semaine dernière, le président a dit qu’il n’y aurait pas de remaniement. Mais il pourrait ne pas tenir, sous la pression de la majorité. Alors, nommerait-il à Matignon Olivier Guichard jusqu’aux élections ?

    6 mai
    Déjeuner avec Jacques Baumel, qui avoue que – ce sont ses propres termes – « la crise d’autorité est ouverte ».
    Après le référendum, l’ORTF est la deuxième « source de grimaces » entre Chaban et les députés de la majorité. Depuis 1969, la télévision, dit-il peu ou prou, est considérée comme le terrain privé de Chaban. On lui reproche un manque d’objectivité à l’égard... de l’UDR ! Les plaintes de toute nature affluent. Onreproche aujourd’hui à la télévision d’avoir contribué à affaiblir la position de Pompidou. À l’entendre, la campagne officielle n’a pas rééquilibré le climat et les préférences personnelles de certains journalistes.
    Après cette mise en cause par les députés UDR du militantisme anti-européen des rédactions de l’audiovisuel, le rapport Le Tac-Griotteray, qui donne un coup de chapeau à l’objectivité des journalistes, n’apporte aucun soulagement chez les députés. Au contraire. Baumel ne le dit pas, mais je le comprends : il veut signifier qu’un peu moins d’objectivité serait la bienvenue. Il continue : « Il y a un problème de la télévision [je ne suis pas sûre qu’il n’ait pas employé le mot “scandale”] dans la mesure où il s’agit de personnalités familières, connues du grand public, d’un organisme public, de surcroît, même si, justement, Chaban a voulu donner à la télévision d’État un semblant d’autonomie.
    « Après Paris la folle en Mai 1968, continue-t-il, aujourd’hui c’est Paris la pourrie. Et ce pourrissement rejaillit sur le royaume tout entier. Car, au-delà de la TV, c’est tout un climat qui est en train de se dégrader : il y a les scandales immobiliers, financiers, et puis l’ORTF... »
    Je lui demande comment Pompidou a pris le succès plus que mitigé du référendum : « Il y a eu plusieurs phases dans la réaction de Pompidou, me répond-il. Dans une première phase, il a été optimiste : “Notre noyau a tenu”, a-t-il dit. » Puis l’optimisme a fait place au doute. La majorité a perdu près de deux millions de voix. Ce qui alimente – et il y a de quoi ! – l’angoisse à l’Élysée. Quelles sont les catégories sociales mécontentes ? Les commerçants et artisans, les vignerons, les vieux. Comment les reconquérir ? Naturellement, dans ce cas, comme l’Élysée n’a pas les moyens de récupérer d’un coup ces deux millions de voix manquantes, et comme il faut bien un responsable, ce responsable, c’est la télé ! À en croire Baumel, c’est dans cette direction que Pompidou a décidé de frapper. Il lui faut épurer l’ORTF, nommer un grand épurateur en chef, et Pompidou a trouvé pour ce faire Malaud, « instructeur, me dit Baumel, de

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