Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
Vom Netzwerk:
Mitterrand et Sanguinetti s’installent.
    Mitterrand a réglé son ton : il sait – ce n’est pas faute qu’on le lui ait dit – qu’il n’est pas, ici, en orateur de meeting. Il doit parler à chaque téléspectateur dans les yeux. Est-ce le récepteur ? Son œil est plus clair, son sourire moins fabriqué. Sangui, lui, est excellent. Une bonne tête, bien carrée. Débat de bon, de très bon niveau, tour à tour drôle et sérieux. Sanguinetti un peu plus court, un peu plus à ras de terre. Mais à peine. Efficace, très efficace.

    11 janvier
    Conférence de presse de Georges Marchais dans la grande salle marbre et or du Grand Hôtel. Une salle trop vaste pour les journalistes présents. Les communistes ont vu trop grand. Déjà la grosse tête...
    Même question qu’à Pompidou sur la phrase de Mitterrand : « Pompidou, on le gardera. » Il fait mine de ne pas même comprendre la question : « Ben quoi, ce sont des élections législatives, répond-il, et pas des élections présidentielles ! » Sous-entendu : personne ne demandera au chef de l’État de partir. S’il veut le faire, qu’il le fasse !
    Électoralement, la seule réponse intéressante a trait aux désistements entre communistes et socialistes au second tour des élections. Contrairement à ce que je pensais (et à ce que pensaient, semble-t-il, les socialistes), il n’écarte pas l’idée de voir des communistes arrivés en tête au premier tour se retirer pour laisser la place à un candidat socialiste mieux à même de gagner au second tour. « Y aura-t-il des cas particuliers ? Il y en a eu, rappelle-t-il : 13 en 1967, 8 en 1968. Cette fois-ci, c’est possible. Nous les examinerons. »

    15 janvier
    Congrès réformateur à Versailles 2 . Jean-Jacques Servan-Schreiber laisse pour la première fois la vedette à Jean Lecanuet. Lequel est trèsclair : « François Mitterrand en est réduit à expliquer que l’absence de pression militaire soviétique sur la France permet de prendre à Paris le risque pris à Prague. En aucun cas il n’est possible pour nous d’ajouter nos suffrages à ceux des communistes et de leurs alliés pour créer une majorité nouvelle. »
    Voilà qui est dit. Avec conviction. Bien sûr, il critique aussi la majorité actuelle et semble penser qu’il y a, pour le centre, un avenir rose. Mais, à côté de la virulence de la condamnation de François Mitterrand, plus rien n’existe.

    Commentaire de François Mitterrand, qui me dit avec ironie le lendemain matin : « À Bordeaux, J-J S-S m’avait dit : À vous la France, à moi l’Europe. Aujourd’hui, à Jean Lecanuet il dit : À vous Sotteville, à moi Yvetot ! »

    18 janvier
    Nous jouons, avec Maurice Faure, à constituer le gouvernement de la gauche s’il était appelé par Pompidou après une victoire électorale. Mitterrand, bien sûr, est à Matignon.
    Nous nommons deux ministres d’État : Guy Mollet (Justice) et Georges Marchais. Faure parle de Duclos comme troisième. Je le récuse : trop vieux.
    Gaston Defferre, nous le mettons aux Finances, Robert Fabre à l’Intérieur, Roland Leroy à l’Éducation nationale, un communiste à l’Équipement, Robert Pontillon secrétaire d’État aux Affaires étrangères, et Pierre Mauroy à la Défense. Jean-Pierre Chevènement, Pierre Joxe et Claude Estier sont secrétaires d’État.

    Puis, quelques minutes après l’élaboration de ce gouvernement fantôme (qui prouve tout de même à quel point la perspective de la victoire de la gauche aux législatives est dans les têtes, y compris celle, plus que sceptique, de Maurice Faure), conférence de presse de Giscard d’Estaing.
    Ponia, en ouverture, concentre ses attaques sur Mitterrand avec pour thème : qui est le vrai Mitterrand – celui qui a toujours dit vouloir lutter contre le communisme, ou celui qui a signé le programme de gouvernement avec eux ? Il ironise sur la description queMitterrand fait du Chili : « Eh bien, c’est gai ! dit-il. Quel modèle ! Un pays ruiné, au bord de la guerre civile, aux portes de la famine ! »
    La vedette, évidemment, c’est Giscard. Un Giscard effectivement très orthodoxe, se déclarant « prêt à continuer notre action avec nos partenaires d’hier », annonçant que les trois mouvements de la majorité feront campagne ensemble. Pas d’ironie sur le Programme commun ; la question qu’il pose à l’assistance est révélatrice : « Comment se

Weitere Kostenlose Bücher