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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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Matignon. Il est 9 heures et quart du matin. Pompidou, vert de rage, entre en trombe dans le bureau de Juillet. « À qui servez-vous, dit-il aux deux hommes présents dans la pièce, si vous êtes incapables d’éviter ça ? »
    « Ça », c’est un article de journal faisant état de la dernière blague de Giscard : interrogé à Versailles par deux ou trois étudiants, il a dit qu’il serait éventuellement – l’occasion, l’herbe tendre... – candidat à la future présidentielle.
    « Il est complètement fou, ou quoi ? » demande-t-il à la cantonade.
    Dominati le calme :
    « Ne vous inquiétez pas, je connais Giscard. Il n’a aucune intention de se présenter contre vous. Il s’amuse, en ce moment. »
    Pompidou part à demi rassuré – à demi seulement.
    Épisode n o  4  : le rabibochage avec Giscard.
    « Tu es insupportable, lui dit Chirac. Tu es un giscardien et Giscard ne t’adresse pas la parole. Tu es au Conseil de Paris et tu t’entends mal avec toute la majorité.
    – Tu as raison. Je vais me réconcilier », lui dit Dominati.
    Comment procède-t-il ? Frontalement, pour ne pas dire brutalement : en parvenant à se faire nommer vice-président des Républicains indépendants en forçant la main à Ponia. Voici comment : Ponia est l’objet d’attaques au sein du conseil national du mouvement. Dominati appelle Chinaud, son lieutenant le plus proche, au téléphone. Il est midi :
    « Dis à Ponia qu’il n’a encore rien vu, ce matin. Si je ne suis pas vice-président ce soir, j’attaque Ponia, je le descends en flammes. Et pas pour rigoler ! Il ne s’en relèvera pas. À vous de juger. »
    L’après-midi, en début de séance, il rencontre bien sûr Poniatowski.
    « Allons, lui dit celui-ci, patelin, tu ne vas pas tout casser ?
    – Je serai vice-président ou pas ?
    – Oui, bien sûr !
    – Alors, je ne casserai rien... »
    En écoutant Dominati, je suis médusée par ce récit. Je lui fais remarquer que, partout, cela s’appelle du chantage.
    « Et Giscard, me dit-il, il n’a peut-être pas fait du chantage à Pompidou pour obtenir le ministère des Finances ? »
    Édifiante conversation...
    Épisode n o  5 . Nomination à la présidence de la commission des Finances. Duval, dit-on, a les faveurs de Giscard. Dominati est néanmoins candidat. Il est dissuadé de le faire par Ponia et Chinaud, qui lui conseillent d’appeler Giscard au téléphone. Michel d’Ornano lui tient le lendemain le même discours.
    Dominati finit par joindre Giscard.
    « Voulez-vous faire acte de candidature ? lui demande Giscard qui, depuis 1968, ne le tutoie plus.
    – Oui.
    – Vous me mettez dans l’embarras ; Duval est dévoué, précieux.
    – Lequel de nous a vos préférences ?
    – Difficile à dire, répond Giscard.
    – Dites-le-moi, insiste l’autre. Si vraiment vous ne le voulez pas, dites-le-moi bien franchement, je m’inclinerai, mais j’ai besoin de le savoir.
    – Ce sera toi, laisse tomber Giscard qui retrouve du coup le tutoiement. Il est temps de ne plus parler de tout cela. Reviens me voir quand tu voudras. »
    Quelques jours après, ils dînent ensemble. Giscard le raccompagne en voiture. Voilà les deux hommes réconciliés.
    Le moins que l’on puisse dire est que les rapports sont musclés. Cyniques aussi, fondés sur la connaissance par les uns des méfaits des autres. Dominati est d’origine corse : est-ce pour cela qu’il voit la vie de cette façon, comme un long et permanent rapport de force ?

    Rencontre de Giscard avec les journalistes économiques dans la salle de la Commission des comptes de la nation, une sorte de salle de classe aux murs couleur coquille d’œuf, rectangulaire et terne, en un mot austère. Il parle une heure trois quarts, entouré de tous les membres de son cabinet, et aborde tous les thèmes de réflexion qui sont les siens depuis quatre ans. « C’est du delorisme indolore », medit Régis Paranque, qui y assiste pour L’Express . Inégalités, formation permanente, qualité de la vie, objectifs chiffrés de réduction des écarts entre les revenus, revalorisation des bas salaires, protection des sites. Pas un mot sur la participation, sur la vie de l’entreprise.

    Élections législatives de mars 1973
    Claude Estier avait raison (et Jean Lecanuet aussi) : ce sont les socialistes qui profitent de l’union de la gauche. Et ce, malgré la campagne de Pierre Messmer, au plus haut point

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